La Banque Mondiale (BM) ne produit pas que des insanités. Dans la pléthore de documents qu'elle publie à un rythme à déforester la planète en moins de temps qu'il ne faudrait pour lire cet édito, de temps à autre une petite perle se détache. Il y a quelques jours, la brillante, et hélas peu connue, Ngozi Okonjo-Iweala, première femme ministre des Finances du Nigéria et actuellement numéro 2 de la Banque Mondiale, rebondissant sur une déclaration de son directeur Bob Zoellick, s'est livrée à une remise à l'heure des pendules. Pour ce dernier, « nous devons commencer à réfléchir au développement du monde de manière multipolaire ». Bonne nouvelle donc ! Pour Okonjo-Iweala, l'Afrique sub-saharienne avec une économie globale de près de 1.000 milliards de dollars et une perspective de développement unique qui devrait être plus rapide que celle des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) à l'horizon 2015 doit trouver la place qui lui revient dans cette nouvelle vision du monde. Que ce soit dans les télécommunications où les investissements ont triplé entre 2001 et 2008 pour atteindre 12 milliards de dollars ou dans le tourisme dont les recettes globales sont passées de 8,5 à 23 milliards de dollars dans la même période, l'Afrique sub-saharienne avec environ 820 millions d'habitants dont 43% ont moins de 14 ans et 65% moins de 30 ans, a bien résisté à la crise de 2008. Elle devrait même connaître un taux de croissance de 3,8% en 2010 et 4,5% en 2011, soit bien plus que l'Amérique latine, l'Europe ou l'Asie centrale. Afin que cette vision devienne réalité, Okonjo-Iweala, appelle à un gros effort au niveau des infrastructures pour fluidifier les échanges au niveau du Continent et avec le reste du Monde. Pour cela elle préconise le recours aux marchés pour financer des placements issus par les pays donateurs qui pourraient de ce fait débloquer les 100 milliards nécessaires d'un seul coup. Okonjo-Iweala plaide également pour un effort sur la scolarisation et conclut sur la nécessité pour l'Afrique de prendre son destin en charge pour devenir le « A » qui prolongerait les BRIC en rédéfinissant sa place à travers un agenda qui lui serait propre. L'Afrique passerait alors de l'état de réceptacle de l'aide internationale à celui de partenaire réel.