Transmettre, améliorer, interroger. Les verbes sont en pleine efflorescence, repris par les directeurs des plus prestigieuses écoles de cinéma, autour du colloque « Enseignement du cinéma- Approches comparées », qui s'est déroulé les 17 et 18 avril au sein de l'ESAV – comprenez le Maroc, la Tunisie, le Liban, la France, la Belgique, le Royaume-Uni : Vincent Melilli, directeur de l'ESAV (Ecole Supérieure des Arts Visuels de Marrakech), Youness Belahssen, doyen de la faculté polydisciplinaire de Ouarzazate, Michel Coteret, directeur de la formation initiale/ENS Louis Lumière, Ben Gibson, directeur de la London Film School, Ghassan Koteit, directeur-adjoint à l'ALBA (Académie libanaise des Beaux-arts de Beyrouth), Ikbal Zalila, enseignant à l'ISAMM (Institut supérieur des arts multimédias de la Mannouba), et Pierre Godower, de l'INSAS (Institut national supérieur des arts du spectacle de Bruxelles). L'objet de cette rencontre, organisée dans le cadre du projet Dia Sud Med, financé par le Programme Euromed Audiovisuel de l'Union européenne, a notamment réuni vingt-et-un participants et plus d'une quarantaine de professionnels du 7e art, de la télévision et des lauréats de l'ESAV. Parmi eux, les réalisateurs Faouzi Bensaïdi, Jilani Saadi (Tunisie), les producteurs Driss Tahri et Redounae Bayed, Saafa Kaddioui, chargée de communication et de culture à la Délégation de l'Union européenne à Rabat, Claude Bailblé, docteur, enseignant-chercheur et maître de conférence au département cinéma de l'Université Paris III, Saint-Denis et Sally Shafto, professeur habilité à la faculté polydisciplinaire de Ouarzazate. Si l'efficience des échanges a été relevée par les différents enseignants des écoles de cinéma comme Youssef Aït Hammou, (Université Cadi Ayyad), ou encore Hamid Aidouni, (Université de Tétouan), directement confrontés aux lacunes d'une jeunesse, pétrie de bonne volonté mais souvent dénuée de culture cinématographique et littéraire, un discours approchant a été repris, de concert, par leurs homologues tunisiens et libanais. Pour Vincent Melilli, l'apanage culturel bien qu'important ne doit cependant pas être un critère excluant. En ce qui concerne le concours d'entrée à l'ESAV, l'accent est mis sur « la créativité des futurs étudiants plus que sur la culture générale ». « Nous savons que le niveau des étudiants bacheliers est faible, notamment pour ce qui est de la culture artistique, c'est aux écoles d'aiguiser la curiosité des étudiants qui on été sélectionnés pour leur créativité », a souligné le directeur de l'ESAV, à l'origine de la création de cet établissement, il y a plus de sept ans. Vigueur des débats Présent le 18 avril, Nour-Eddine Saïl, directeur du Centre cinématographique marocain, a mis en lumière l'absence au Maroc, de métiers indispensables à la bonne réalisation d'un long-métrage. Il a particulièrement insisté sur la nécessité de former de bons directeurs de production, maillon indispensable pour la réussite des tournages et une bonne communication entre les équipes artistiques, techniques et de production. En complément de cette intervention, Rachida Taame, chef du département formation à 2M a insisté sur le fait que les besoins en formation ne concernent pas uniquement le cinéma. La télévision marocaine a également besoin de compétences sans oublier le web qui sera demain un filon doré qu'il convient d'explorer : « Nous sommes face à une génération en totale adéquation avec l'évolution constante du Net et du Web. Nos questionnements doivent dès lors être adaptés et offrir des contenus sur ces nouveaux médias ». Le modèle libanais semble quant à lui avoir trouvé un équilibre harmonieux entre cinéma et audiovisuel : « Il s'agit d'une réalité qui s'est rapidement imposée à nous. A l'ALBA, nous n'avons pas hésité à préparer nos étudiants aux métiers de la télé, car nous savons qu'ils ne seront pas tous cinéastes à l'issue de leurs diplômes », a déclaré sans ambages, Ghassan Koteit, Directeur Adjoint à l'ALBA. Quant à Pierre Godower de l'INSAS (Institut national supérieur des arts du spectacle de Bruxelles), les modèles marocains et libanais lui ont rappelé la configuration cinématographique de la Belgique, qui manquait cruellement de visibilité dans les années 60. En attendant l'embellie des cinémas du sud, le projet Dia Sud Med est le fruit d'un budget d'un million d'euros, qui vise, en s'appuyant sur les nouvelles générations, à soutenir l'industrie du film au sud de la méditerranée. Ayant fait halte à Beyrouth et à Marrakech, le prochain rendez-vous se tiendra à Tunis à l'automne prochain. L'objectif des trois écoles de cinéma, l'ESAV, l'ALBA et l'ISAMM, coagulateurs de jeunes talents, est de faire travailler ensemble dès leurs études ces futurs professionnels afin qu'ils développent des projets croisés, qu'ils se coproduisent et qu'ils touchent ce marché de plus de 260 millions d'arabophones de la région. Ainsi, le cercle vertueux du cinéma de la rive sud est lancé.