Les filiales agroalimentaires de l'ONA (Cosumar, Centrale Laitière et Lesieur Cristal) qui devront, pour rappel, faire l'objet d'une augmentation de flottant en bourse, permettant ainsi au holding royal d'y réduire sa participation à moins de 30% du capital sont-ils concurrençables ? Pour Cosumar, unique opérateur de l'industrie du sucre, nous avons déjà répondu en détail, à cette question dans une de nos précédentes éditions. Dans un contexte mondial où seul les géants de ce métier arrivent à résister, il est difficile pour un nouvel intrant de s'installer sur le marché marocain du sucre. Dans les deux autres métiers, la situation est complètement différente. «Les investissements industriels dans l'huile ou le lait ne sont pas aussi colossaux que dans le sucre. De ce fait, les opérateurs industriels peuvent s'installer plus facilement», note une source au sein du au groupe ONA. En effet, l'investissement industriel dans l'industrie du lait ou des corps gras nécessite, pour une unité de production moyenne, entre 300 et 400 millions de DH, selon nos sources. Un montant important certes, mais pas aussi colossal que celui exigé pour une raffinerie de sucre qui nécessite jusqu'à 2,5 milliards de DH. Ceci concernant l'investissement industriel, qu'en est-il de l'amont agricole ? Dans le cas du lait, le développement de la filière de l'élevage et de la production laitière est en forte progression, sous l'impulsion notamment du Plan Maroc Vert. D'ailleurs, plusieurs projets sont en train de se développer, en se basant sur le modèle de l'agrégation. Ce qui différencie Centrale Laitière des autres opérateurs dans ce métier, c'est qu'elle collecte sa matière première sur l'ensemble du pays. Ce n'est pas le cas des autres opérateurs qui se concentrent autour d'une ou de quelques régions. Mais cela ne les a pas empêchés de partir de ces régions pour faire parvenir leurs produits à l'ensemble du pays. La question de l'amont agricole est plus compliquée à gérer dans le secteur des corps gras. La question de l'amont agricole est plus compliquée à gérer dans le secteur des corps gras. En effet, la production de l'huile de table dépend, presque exclusivement, de l'importation de matière première de l'étranger. «Le plus difficile dans cette filière est de fidéliser l'agriculteur comme c'est le cas pour les producteurs de betteraves, de cannes à sucre et de lait», explique notre source. Une tentative a été menée il y a quelques années pour faire émerger un amont agricole pour la production de tournesol, mais celle-ci a rapidement échoué à cause de l'irrégularité des paiements. En attendant, l'éventuelle émergence d'un tel amont agricole pour l'Huile, le secteur dépendra toujours des fluctuations mondiales des matières premières. Si hausse des cours des matières premières il y a, elle est en majeure partie répercutée sur le prix de vente. La situation étant ce qu'elle est, qu'est-ce qui empêche l'émergence d'une rude concurrence pour les filiales de l'ONA qui se positionnement confortablement en tant que leaders incontestés sur leurs marchés respectifs ? Notre interlocuteur au sein de l'ONA affirme que la concurrence rude est déjà là. «Dans un supermarché les produits de Danone ou Lesieur sont loin d'être les seuls sur les étalages», précise-t-il. Néanmoins les rumeurs indiquant un traitement privilégié pour les filiales du groupe ONA, aussi dans le sucre ou le lait, ont souvent fait tâche d'huile dans le marché. Tout le monde se souvient du réveil impromptu du Conseil de la concurrence pour couper court au dumping de Savola. A l'époque, cette intervention a été interprétée comme un service rendu à Lesieur. «Ce que l'on ne sait pas c'est que Savola se comportait de manière hautaine avec ses concurrents. Elle voulait les doubler en cassant les prix et prendre rapidement le leadership. D'ailleurs, ce n'est pas Lesieur qui a été le plus affecté mais des opérateurs de moindre taille, dont certains d'entre eux ont fait faillite», explique notre source. Dans le secteur du lait, les rumeurs circulent depuis plusieurs mois sur une éventuelle entente sur le marché, permettant aux différents opérateurs de garder chacun des positions sans chercher à empiéter sur celles des autres. Notre source se dit ne pas être au courant d'un tel comportement. Maintenant que le prétexte ONA, comme le disent d'ailleurs les managers des holdings royaux ONA et SNI, ne sera plus valable pour justifier le leadership, les filiales agroalimentaires en question arriveront-elles à préserver leur position ? «Elles sont bien armées pour le faire», précise notre source. Et d'ajouter, «le potentiel de croissance du marché est tellement important qu'il permet à l'ensemble des opérateurs actuels de maintenir des rythmes de croissance élevés même si de nouveaux investisseurs arrivent». C'est ce potentiel qui attirera plusieurs nouveaux opérateurs pour s'installer sur le marché marocain.