En réponse au point de vue de Bernabé Lopez Garcia publié le 16 juillet, à propos des conséquences pour le Maroc d'avoir désavoué Christopher Ross, il est utile de remettre les choses en contexte pour mieux les cerner. Tout d'abord, la construction de la démonstration de M. Lopez Garcia est partie d'une lecture erronée du fait en lui-même. Car, en adoptant une attitude partiale contraire à son mandat, M. Ross, s'est « désavoué » tout seul. Le Maroc n'a donc fait que récuser un médiateur à qui il reproche son parti-pris. Un droit que tout système juridique, à travers le monde démocratique, garantit en pareilles circonstances. Le représentant personnel du secrétaire général de l'ONU avait pour mission de veiller au rapprochement des deux parties afin de trouver une solution politique, durable et « mutuellement » acceptable et non de privilégier une solution aux dépens d'une autre. C'est sur cet aspect que M. Ross a failli. Il avait une feuille de route clairement tracée par les différentes résolutions en la matière autour du concept récurrent de « la négociation ». Sa mission était donc de promouvoir le débat autour d'une solution « négociée » et acceptée par les deux parties. Sur ce point, certains observateurs ont tendance à faire de la sur-analyse et oublier que les choses sont plus simples en réalité. Un petit rappel s'impose. Jusqu'à il y a quelques années, les deux parties avaient des positions diamétralement opposées : le Maroc prônait la souveraineté totale et le Polisario revendiquait l'indépendance totale. En 2007, le Maroc a eu le courage politique et diplomatique, la sagesse de proposer une solution intermédiaire où il renonce à la souveraineté totale au profit d'une autonomie élargie. A ce jour, le Polisario campant sur la même attitude depuis bientôt 37 ans, n'a pas fait un seul pas pour permettre à la médiation onusienne d'avancer. Et pourtant, selon M. Lopez Garcia, le Maroc « doit réfléchir à la mauvaise image donnée à l'extérieur en s'opposant à l'ONU ». D'abord, l'enjeu pour le Maroc n'est pas une question d'image, mais plutôt de cause d'une nation. Ensuite en récusant Ross, le Maroc ne s'est pas opposé à l'ONU. Dans le communiqué officiel, le gouvernement marocain a insisté sur son attachement à ce processus comme unique solution à la question saharienne. A travers sa décision, le Maroc veut remettre le processus de Manhasset sur la bonne voie et lui éviter une dérive qui risquerait de le condamner. De l'autre côté ; la direction du Polisario, qui n'émane pas de la volonté de la population sahraouie, qui s'est autoproclamée son «représentant unique », des camps de réfugiés hermétiquement fermés et dont la population ne jouit ni du droit de s'exprimer ni de celui de se déplacer librement. M. Ross s'est-il insurgé contre le refus de la direction du Polisario de permettre au Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) de recenser la population des camps de Tindouf ? Du côté marocain, contrairement à ce qu'avance M. Lopez Garcia, le discours séparatiste peut s'exprimer librement et ses auteurs se déplacer sans contrainte entre les provinces du Sud et Tindouf avec des passeports marocains, tandis que côté Polisario on refoule un Sahraoui comme Ould Salma et l'empêche de revoir ses enfants pour le simple fait d'avoir exprimé une opinion personnelle ! En évoquant le souvenir de Franco sous le régime duquel les Basques étaient interdits de revendiquer la spécificité de leur identité, il faut également rappeler que la spécificité culturelle sahraouie est, depuis le 1er juillet 2011, protégée par la Constitution du Royaume. Déclarer que « les Sahraouis originaires du territoire ne se sentent pas reconnus comme citoyens à part entière, mais comme des citoyens de seconde zone, dirigés et contrôlés par des gens qui proviennent d'autres régions... » c'est privilégier les dires de la rue à l'analyse scientifique. Car, pratiquement toutes les communes urbaines et rurales des provinces du Sud sont dirigées par des Marocains sahraouis. Sans oublier qu'au niveau central, très nombreux sont les Sahraouis qui sont investis de grandes responsabilités étatiques. Où est donc cette exclusion ? Bien au contraire, le système inclusif mis en place par les autorités marocaines en faveur de l'intégration économique et sociales des Sahraouis a généré parfois des dérives rentières qui n'ont pas manqué de frustrer une jeunesse plus égalitariste que les aînés attachés par culture à une gouvernance clanique ou tribale. C'est dans ce sens peut-être qu'il faut comprendre les évènements de Gdim Izzik de novembre 2010 avant leur manipulation tragique par les séparatistes avec la complicité irresponsables de certains médias espagnols. Le discours de M. Lopez Garcia est malheureusement caduque. Ni le Maroc d'aujourd'hui ni le contexte régional et international actuel ne correspondent à son argumentation. Le Maroc d'aujourd'hui est ouvert, démocratique, capable d'assimiler toutes les spécificités identitaires de sa population. Au-delà de ses frontières, il est de notoriété publique, qu'il s'agit d'un foyer de stabilité et de prospérité. La nécessité d'un Maghreb uni dans la diversité est la solution incontournable pour éviter à la population maghrébine de se retrouver déstabilisée. En réalité, au Maroc, tout a changé. Là-bas, tout est figé et rien ne bouge. Ni les discours ni les gens. Peut-on alors, dans ce contexte, accepter qu'un représentant du secrétaire général de l'ONU tire le processus onusien vers le bas et nous ramène des années en arrière ? Que le Polisario en fasse tout un tapage et que ses soutiens intéressés relayent son discours, cela ne changera rien à la réalité saillante à savoir que le Maroc a fait preuve d'ouverture dans le processus onusien tandis que l'autre partie souffre d'une sclérose politique chronique dont elle n'a aucune volonté de se soigner. C'est donc de ce côté qu'il faut chercher les raisons du blocage.