Colère et indignation de la coalition « Printemps de la dignité ». Ce collectif associatif fédérant 22 ONG dénonce vigoureusement les déclarations des deux ministres, Mustapha Ramid et Bassima Hakkaoui, au sujet de l'affaire Amina el Filali, qui s'est donnée la mort après avoir été contrainte d'épouser son agresseur. C'était lors d'un point de presse, organisé jeudi dernier à Casablanca. « C'est avec beaucoup d'inquiétude et d'indignation que nous avons accueilli les propos tenus par la ministre de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social ainsi que ceux du ministre de la justice et des libertés, suite au drame de la mineure Amina el Filali, victime de viol et mariée à 15 ans », souligne Najat Errazi, présidente de l'AMDF (Association marocaine pour les droits des femmes), également coordinatrice de la coalition. Et de poursuivre : « Nous considérons que les déclarations des deux ministres vont à l'encontre des engagements du Maroc, exprimées dans le programme gouvernemental, par rapport à la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle. Il s'agit là également d'une rupture de la politique menée par l'ancien gouvernement, alors que nous souhaitons que l'action du cabinet Benkirane soit dans une logique de continuité ». Un projet de loi au SGG Pour rappel, Bassima Hakkaoui avait déclaré à un support de la presse électronique que « l'article 475 du code pénal ne risque pas d'être abrogé, du jour au lendemain, sous la pression de l'opinion publique internationale ». Lors de la conférence de presse, Najat Errazi a tenu à souligner que le processus de réforme du code pénal a été initié par l'ancien ministre de la justice. Un projet de loi, déjà élaboré en 2010 par ses services, prévoit l'amendement de plusieurs dispositions dont la suppression de l'alinéa 2 de l'article 475. Il est actuellement au secrétariat général du gouvernement (SGG) : « Nous avons même élaboré un mémorandum que nous avons soumis au ministère de la justice en 2011. Nous avons remarqué que malgré les avancées et les amendements positifs apportés par le projet de loi, ce dernier continue à véhiculer des discriminations importantes en matière de droits humains des femmes. Sa structure est fortement imprégnée d'une approche sécuritaire conférant la priorité à l'ordre public au détriment des libertés individuelles et des droits fondamentaux et considère les crimes contre la personne de la femme comme des atteintes à l'ordre moral public ou à l'honneur de la famille. Notre mémorandum comprend une série d'amendements à introduire dans le code pénal pour corriger ces discriminations », poursuit la coordinatrice de la coalition « Printemps de la dignité ». Ce collectif ne se contente pas de proposer la suppression de l'article incriminé, mais exige plutôt une réforme globale et radicale du code pénal. Propositions d'amendement « Nous réclamons un texte de loi qui met fin à l'impunité et protège les femmes contre toutes les violences. Nous revendiquons une loi qui préservent aux femmes leur dignité, leur intégrité physique et psychologique », insiste la coalition qui ne manque pas de soulever, également, la problématique de l'avortement : le collectif revendique la légitimé, aux victimes, de recourir à l'avortement en cas d'inceste ou de viol. Parmi les propositions formulées par la coalition l'incriminalisation, par le législateur, des actes toujours non incriminés comme le viol conjugal, le harcèlement sexuel et l'expulsion de la femme du domicile conjugal. Par ailleurs, la coalition du « Printemps de la dignité » propose également de dépénaliser des actes considérés comme des infractions comme « les relations sexuelles entre adultes consentants, définies dans le code pénal par “débauche” ». Le but, explique la coalition, est d'harmoniser ce texte de loi avec le code de la famille qui reconnaît la paternité des enfants nés pendant la période des fiançailles et ceux nés en dehors du mariage sur la base de l'aveu d'affiliation formulé par le père.