On ne fait pas un référendum sur une question purement médicale. L'avortement interpelle au premier plan les professionnels de la santé et les acteurs sociaux. ALM : Dans un entretien au quotidien «Al Ahdath Al Maghribia», Bassima Hakkaoui propose «un référendum populaire» sur l'avortement. Qu'en pensez-vous ? Chafik Chraïbi : Cela est complètement ridicule. On ne fait pas un référendum sur une question purement médicale. L'avortement interpelle au premier plan les professionnels de la santé et les acteurs sociaux. Ces personnes sont les seules à connaître véritablement les complications que peuvent engendré les avortements clandestins. La société marocaine compte beaucoup de personnes analphabètes qui ne comprendront l'avortement qu'au premier degré. Ce n'est pas la première fois que Bassima Hakkaoui propose un référundum sur le sujet. Légaliser l'avortement dans des conditions bien précises (voir ci-dessous) permettra de sauver de nombreuses vies mais également d'éviter de nombreuses situations notamment la prostitution, le suicide, des femmes tuées par leurs familles ou anéanties suite à l'annonce d'un viol. Tel est le cas d'une petite fille de 13 ans qui vient d'accoucher dans une maternité à Rabat. La jeune fille a été violée par l'un des membres de la famille chez qui elle vivait. Il a été impossible de la faire avorter car sa grossesse était à un stade très avancé. Le violeur, âgé de 57 ans a été arrêté et mis en prison. La jeune adolescente s'est retrouvée à la rue. Ces cas sont loin d'être isolés dans notre pays. Pour la ministre, l'avortement n'est pas une question d'actualité. Parmi ces dossiers prioritaires figure l'emploi des handicapés. Selon vous, est-ce un choix judicieux ? L'avortement est la priorité des priorités. Il est de son devoir d'agir dans ce dossier. Ce qui n'est malheureusement pas le cas. Elle devrait demandé son départ au lieu de rester à la tête du ministère du développement social, de la femme, de la famille et de la solidarité. Mme Hakkaoui doit comprendre que les malformations du fœtus constituent un sérieux problème de santé. Les enfants se retrouvent à la naissance avec des handicaps majeurs qui les empêchent de mener une vie normale. Mme Hakkaoui essaie toujours de se démarquer. D'ailleurs, elle est la seule membre du PJD qui est farouchement opposée à l'avortement. Lors d'une rencontre informelle avec Abdelilah Benkirane, il s'est montré favorable à un assouplissement de la loi notamment en cas de viol et d'inceste. Une séance de travail est prochainement prévue avec le chef de gouvernement pour débattre de l'avortement. A plusieurs reprises, Mme Hakkaoui avait déclaré à la presse qu ‘en légalisant l'avortement, mon seul objectif est d'enrichir les médecins. Ce qui est totalement faux. Je suis pour l'avortement dans les hôpitaux publics et ce à titre gratuit. Mme Hakkaoui appelle à l'ouverture d'un débat «profond» entre médecins, psychologues et ouléma. Quel commentaire faites-vous ? Le débat est ouvert depuis plusieurs années.L'avortement a été débattu à travers plusieurs manifestations (congrès, conférences, émissions radios et forum sur Internet). Il est urgent aujourd'hui de mettre en place une commission composée de médecins, sociologues, ONG spécialisées dans les droits de l'Homme et la protection de l'enfance qui débattra de cette question et émettra des recommandations. Je tiens à souligner qu'un congrès national sur l'avortement est prévu pour le mois de mai à la Bibliothèque nationale. Ce congrès réunira politiciens, religieux et acteurs de la société civile dans le but de dégager une politique consensuelle.