Dix mois de barbarie ne seront venus à bout ni d'un peuple déterminé qui paye chaque jour un lourd tribut à son désir de démocratie, ni à un pouvoir autiste qui s'est enfermé dans une spirale meurtrière. Après une tentative, utile mais infructueuse, de la Ligue arabe, c'est aux Nations Unies que la communauté internationale est allée chercher une solution qui pourrait s'imposer au président Bashar el-Assad. Sans plus de succès pour cause d'intransigeance russe. A chaque conflit qui secoue la planète, le groupe des pays qui imposent leur vue au reste du monde à travers le Conseil de sécurité, en agitant le spectre de leur veto, s'illustre sans vergogne. Au delà du fait que l'ONU soit née dans une configuration obsolète aujourd'hui, la question d'une justice internationale indépendante et impartiale se pose pour la Syrie, mais aussi pour la Palestine, l'Iran, le Soudan, l'Afghanistan et la majeure partie des points chauds de la planète. Au moment où la Russie pèse de son veto contre la majorité des pays du monde, le président américain reconnaît l'usage d'attaques avec des drones au Pakistan, pour exécuter des terroristes présumés. En procédant à des assassinats extra-judiciaires, sur un territoire tiers et souverain, Obama sape les fondements de la Justice et de ses relais incarnés par l'ONU. Si, d'un côté, les décisions proposées par les Nations Unies sont systématiquement bloquées par l'un des membres du Conseil de sécurité au nom d'une victoire datant de 1945 et, d'un autre, comme nous le voyons depuis des décennies, les pays les plus forts se font justice eux-mêmes, sur quelle base pourrions-nous exiger d'un Bashar el-Assad ou d'un Ali Saleh de se conformer aux injonctions d'une instance à géométrie variable ? D'autant plus que les règles du commerce international ont, elles, évolué pour s'adapter aux exigences de la mondialisation sans que personne y trouve à redire. Sachant que le politique et l'économique restent liés, il est illusoire de penser que la paix dans le monde peut s'accommoder d'une approche libérale, quand il s'agit de marchandises, et conservatrice-retrograde, quand il s'agit de vies humaines et de règles de vivre-ensemble.