Tout porte à croire que la révolution n'est pas encore terminée en Libye. Une manifestation anti-CNT a rassemblé 5 000 personnes à Benghazi, mardi. Les protestataires réclament plus de transparence de la part des nouvelles autorités au sujet de la gestion des affaires du pays. Après la révolution, l'évolution bien sûr ! C'est le message que compte faire comprendre le peuple libyen à ses nouveaux dirigeants. Benghazi semble, à nouveau, en effervescence. Mardi, des milliers de personnes ont manifesté dans cette ville, qui a vu naître la révolte contre l'ancien régime. Le peuple libyen n'entend donc pas dormir tranquillement sur ses lauriers, car il sait que le plus dur reste à faire. Selon les officiels, ils étaient, au total, 5 000 opposants rassemblés sur la place Al-Chajara pour dénoncer l'inaction des nouvelles autorités. «À bas le nouveau régime!», scandaient-ils. C'est la première fois depuis la chute du régime de Muammar Kadhafi ( en août) qu'une manifestation publique d'une telle envergure est organisée en prenant les membres du Conseil National de Transition(CNT) pour cible. Les manifestants ont, en particulier,fustigé le manque de transparence dans la gestion des affaires du pays par le CNT depuis sa prise de pouvoir. Les slogans de la veille, lors de la première manifestation, étaient encore plus virulents. «Le peuple veut une nouvelle révolution!», «Le peuple veut faire tomber le Conseil de transition», avaient crié les manifestants. Le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, a dû sortir de son silence, lundi, pour rassurer la population. «Je veux rassurer les Libyens, avec de la patience, beaucoup de choses vont être réalisées», a t-il déclaré aux manifestants. La nouvelle manifestation de ce mardi est la preuve que le message du CNT n'a pas eu d'effet. Le peuple libyen, qui a arraché sa liberté au prix d'un combat sanglant, ne peut plus d'attendre, encore longtemps, pour récolter les fruits de son labeur. «Abdeljalil doit apporter des réponses à de nombreuses questions. Le régime n'a pas changé. Ce sont toujours les mêmes qui oppriment et marginalisent les villes », a dénoncé Tahani al-Charif, une avocate de Benghazi. Manque de transparence L'organisation Human Rights Watch, avait aussi fait part, dimanche, de ses préoccupations concernant l'opacité des nouvelles autorités libyennes sur certaines lois adoptées pendant la période de transition. Pour montrer sa bonne foi, le CNT a promis d'activer son site internet, de donner la liste de ses membres et publier leurs CV et va également rendre publiques toutes ses activités. «Le processus de la révolution est sur la bonne voie», a assuré le conseil de transition dans un communiqué. Les nouvelles autorités ont de même décidé de faire de Benghazi, la capitale économique de la Libye. Les manifestants anti-CNT demandent, de surcroît, dans un communiqué en 14 points que la liberté d'expression soit garantie, que les responsables de l'ancien régime et les opportunistes soient écartés et que les jeunes soient plus impliqués dans la vie politique. Cependant, le CNT peut toujours compter sur ses partisans puisque dans la même journée du mardi une contre manifestation rassemblant des milliers de Libyens a été organisée pour soutenir les nouvelles autorités. «Le peuple veut Moustapha Abdeljalil», ont-ils crié. Selon Abir Imnina, professeur de Sciences Politiques à l'Université de Benghazi, qui s'expliquait sur RFI, «les gens voient que les nouvelles autorités n'ont rien fait et c'est pour cela qu'ils manifestent. Nous avons eu ça pendant 40 ans, et ce n'est pas maintenant que nous allons l'accepter. C'est nous qui avons fait la révolution ! Il faut changer le conseil local de Benghazi. Il faut penser aux jeunes, aux femmes. Personne ne sait qui est le CNT. Il vit dans un autre monde, une autre vie ! Notre colère est justifiée». Une nouvelle vision Par ailleurs, le gouvernement libyen a décidé, mardi, de revoir certaines clauses du traité d'amitié signé avec l'Italie sous l'ancien régime. «La vision de la nouvelle Libye par rapport à sa coopération avec l'Italie diffère de ce qu'elle était sous l'ancien régime. Ces clauses ont besoin d'être discutées à nouveau entre les deux pays », a déclaré le vice-ministre des affaires étrangères, Mohamed Abdelaziz. Ce traité d'amitié, signé en 2008 entre Silvio Berlusconi et Muammar Kadhafi, prévoit des investissements italiens en Libye de 5 milliards de dollars en compensation de la période coloniale, dont notamment la construction, d'une autoroute littorale de 1 700 km dont le coût est estimé à 3 milliards de dollars. Cet accord donnait aussi la liberté aux autorités italiennes de refouler, en Libye, des migrants illégaux.