Le documentaire My Land de Nabil Ayouch est projeté en ouverture de la 5e édition du Festival Biennal « Proche-Orient : ce que peut le cinéma » qui se déroulera dès aujourd'hui et jusqu'au 13 décembre 2011 aux 3 Luxembourg à Paris. Nous savons que l'occupation de la Palestine et les conditions de vie des Palestiniens sont inacceptables. Nous savons qu'il faut se battre pour cette paix, pour ces gens qui vivent depuis soixante ans sous l'occupation. Nous savons qu'ils sont confrontés à des problèmes de circulation, d'eau, de survie et qu'ils méritent un cadre de vie digne, car tout être humain a besoin de dignité pour vivre. Nous savons aussi que les Palestiniens vivent dans une prison à ciel ouvert, que 10 dollars représentent le bout du monde pour eux et que le terme d'Autorité palestinienne est un jeu de dupes. Quelle autorité désigne-t-il ? Nous savons et nous connaissons également l'issue. La 5e édition de ce festival se consacre à la valorisation de la richesse du cinéma du Proche-Orient, en proposant un panorama exhaustif de la cinématographie de la région en présentant 60 films (documentaires, fictions, courts et longs-métrages). Le choix de My Land en ouverture de cet événement n'est pas anodin : «il symbolise à lui seul toute la thématique de la manifestation», précisent les organisateurs. Entre ruptures et continuités Le travail de refondation de l'identité palestinienne, entrepris sur les plans politiques et culturels, peut rassembler une nouvelle génération de cinéastes issus de différents pays, permettant de différencier les points de vue à propos des dégâts du conflit sur les corps et sur les esprits. «J'ai voulu confronter ces Israéliens à la mémoire palestinienne afin de les éveiller à celle-ci». Nabil Ayouch, cinéaste. Après Aïsheen, du documentariste suisse Nicolas Wadimoff et Fix me, du cinéaste palestinien Raed Andoni, ce fut au tour de Nabil Ayouch de signer My Land, tourné au Liban, en Palestine et en Israël. Si les thèmes de ces films sur cette zone constituent un regard lucide et humain, le poids du passé se faisant d'autant plus sentir, Ayouch a en effet choisi d'aborder la mémoire à travers un angle humain. Celle des oubliés, des exilés, des apatrides. Celle des réfugiés palestiniens de 1948 qui ont dû fuir leur terre et qui vivent depuis dans des camps au Liban, en la confrontant à celle inexistante, de la jeunesse israélienne. «Nous sommes face à un passé et un présent. D'un côté, il y a la mémoire que seules détiennent ces vieilles personnes, cette mémoire que les jeunes palestiniens n'ont pas et qui leur est racontée par leurs grands-parents, gardiens de cette mémoire qui est fondamentale, et de l'autre côté, l'absence de mémoire de la jeunesse israélienne, qui construit l'avenir de son pays, qui vote. Une mémoire oubliée à cause de la peur, des gouvernements, cela aboutie à un black-out total. J'ai voulu confronter ces Israéliens à la mémoire palestinienne afin de les éveiller à celle-ci, mon objectif était de donner la parole à tout le monde», a précisé le cinéaste au Soir échos. Au-delà du langage de l'image C'est l'importance des mots qui rythme notamment ce récit, et l'histoire de Nabil Ayouch, fruit des amours d'un père musulman marocain et d'une mère juive d'origine tunisienne fait écho à l'histoire de ce conflit : «J'assume, enfin. Le temps de mon enfance était une période difficile où je vivais dans un double repli. La communauté juive et la communauté arabe sont deux communautés fortes qui me tiraient chacune vers elle. C'était trop lourd à porter pour mes épaules, je ne me sentais ni beur, ni franco-marocain. En grandissant, j'ai enfin pu assumer ces deux identités, mais assumer n'implique pas forcément de se dévoiler. Aujourd'hui, il s'agit d'une autre étape : mettre des mots. C'est, de surcroît, ce qui fait ce documentaire : ses personnages, les mots prononcés par les uns et les autres», poursuit-il. La projection de «My Land» est suivie en présence du cinéaste, d'un débat animé par Dominique Vidal, historien et journaliste spécialiste du Proche-Orient avec, comme intervenants, Leila Shahid, déléguée générale de la Palestine auprès de l'UE, de la Belgique et du Luxembourg, invitée d'honneur du festival. Dans le même temps, rappelons l'annonce officialisée depuis le 31 octobre dernier : le vote à l'UNESCO, qui a enfin rendu la Palestine comme Etat membre de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.