Lors du référendum du 1er juillet sur la Constitution, le taux de participation était de 72,56 %. Mais à en croire les cadres politiques que nous avons contactés, une telle prouesse serait difficilement réalisable pour le scrutin du 25 novembre. Le taux de participation aux législatives anticipées est l'enjeu majeur de ces élections. Une répétition du scénario de 2007, avec le très modeste taux de 37%, renforcerait davantage les thèses des formations qui se sont prononcées ouvertement en faveur du boycott du scrutin du 25 novembre. Quelque mois après l'adoption de la nouvelle Constitution, la concrétisation d'une telle perspective constituerait un retour à la case d'avant le référendum du 1er juillet. «Malgré l'absence de données fiables sur les intentions des Marocains, comme cela est de rigueur sous d'autres cieux, je pense que la participation à ces législatives serait faible», avance l'universitaire Abdelali Hameddine. Les raisons ? «Les mesures politiques et juridiques à même d'inciter la majorité silencieuse à prendre part à ces élections n'ont pas été prises par l'Etat. Les premières auraient pu contribuer à redonner confiance aux citoyens. La libération de tous les détenus politiques aurait été un bon point de départ. Les secondes concernent, par exemple, l'inscription automatique de tous les électeurs dans les listes électorales», explique-t-il. «Le jugement de certains symboles de la dépravation de la scène politique aurait également été un fort signal, à l'adresse des Marocains, d'une réelle volonté de rompre avec les pratiques du passé». Craintes et pessimisme L'universitaire, membre du secrétariat général du PJD, ne concentre pas tous ses griefs sur l'Etat,. «Les partis ont également un rôle déterminant dans la nature du taux de participation. Accréditer les mêmes figures en introduisant seulement une petite dose de renouveau dans leurs discours n'est pas à même d'encourager les Marocains à se rendre massivement aux urnes», assure-t-il. Le pessimisme de ce membre du PJD est partagé par Karim Taj, membre du bureau politique du PPS. «A dix jours du scrutin, des indicateurs nous permettent de dire que le taux de participation à ces législatives anticipées ne serait pas le même que celui enregistré lors du référendum sur la Constitution. Nous assistons dans de nombreuses circonscriptions au début de la circulation de l'argent sale et à l'utilisation de moyens de l'Etat par certains candidats peu respectueux des règles de la démocratie. Cette montée en puissance des pratiques du passé apporterait davantage de vents aux moulins de ceux qui font campagne pour le boycott de ces législatives», déplore-t-il. Une question d'engagement «Un contexte aggravé par le passivité de l'Etat qui se contente de jouer les spectateurs. Et pourtant, nous avons un cadre juridique avancé et à même de mettre un terme à ce genre de comportement. Il suffirait de sanctionner un ou deux mauvais exemples pour que l'ensemble des candidats respectent les règles du jeu», assure notre interlocuteur. «Une mission, souligne-t-il, qui ne représente pas une grande difficulté pour l'Etat connaissant les moyens efficaces dont il dispose». Le pessimisme du PJDéiste et du membre du PPS n'est nullement partagé par Mohamed Labied, le secrétaire général de l'UC. Dans des déclarations au Soir échos, il assure que «la logique veut que le taux de participation à ces législatives soit en hausse. Les électeurs qui ont voté massivement le cadre régissant ce scrutin sont appelés à faire de même pour l'application de la nouvelle Constitution. Et c'est pareil pour ceux qui ont boycotté le référendum du 1er juillet». Il est claire que l'engagement de l'Etat dans ces législatives ne serait pas de même nature que lors de la campagne pour le référendum du 1er juillet. Les sources que nous avons consultées écartent la répétition d'un tel scénario. «Certes les enjeux diffèrent, mais l'Etat a intérêt à ce qu'il y ait un fort taux de participation au scrutin du 25 novembre », estime l'universitaire Abdelali Hamieddine. 3 QUESTIONS À … Abdemotalib Amiyar, Président de l'ONG Mouvement vigilance citoyenne. « Responsabiliser davantage les partis » En tant qu'observateur du champ politique, quel pronostic avez-vous sur le taux de participation à ces législatives anticipées ? Il est clair que la cadence politique est en deçà des attentes des Marocains. Ni les débats ni la campagne électorale, encore balbutiante, ne sont pas à la hauteur de la dynamique suscitée par la nouvelle Constitution. J'ai constaté dans plusieurs communes dans la région du Gharb une faible mobilisation des partis, ce qui pourrait avoir une incidence négative sur la nature du taux de participation. Selon vous, à qui incombe la responsabilité ? Les formations politiques sont appelées à occuper l'espace public et rehausser le niveau du débat. De son côté, l'Etat est invité à adopter une neutralité positive, ne favorisant aucune partie et à activer son arsenal juridique contre tout dépassement des règles de la démocratie. Certains forces politiques ont demandé qu'une instance indépendante veille sur ces élections. Etes-vous partisan de cet avis ? Dans les pays démocratiques, c'est le ministère de l'Intérieur qui veille sur ce genre de scrutin. Le problème qui se pose au Maroc n'est pas dans la nature de l'appareil qui chapeaute ce processus mais il réside dans la gestion de l'opération électorale. La participation du gouvernement, partis politiques aux côtés du ministère de l'Intérieur aurait été un fort signal à l'adresse des électeurs.