Le gouvernement se penche actuellement sur une possibilité d'intégrer dans la loi de Finances 2012, une nouvelle disposition qui taxe les signes extérieurs de richesse. Faut-il le prendre au sérieux ? Mauvaise nouvelle pour les plus riches de nos citoyens. Le gouvernement se penche actuellement sur une possibilité d'intégrer dans la loi de Finances 2012, une nouvelle disposition qui taxe les signes extérieurs de richesse. Les revenus de cette nouvelle taxe devraient alimenter un fonds de solidarité sociale qui servira, entre autres, à alléger les dépenses astronomiques de la Caisse de compensation. Cette nouvelle vient apaiser, en partie, les revendications sociales appelant à plus d'équité sociale mais donne, également, des frayeurs à nos riches marocains. Mais plusieurs questions restent posées. Le principale interrogation à trait au timing de cette annonce. Pourquoi Abbas El Fassi, en fin de mandat, a tenu à annoncer une aussi grande, et importante, nouvelle ? Selon plusieurs personnes sondées, il s'agit, en fait, pour le gouvernement sortant, d'un acte purement électoral. Mohamed Najib Boulif, membre du conseil national du PJD et éminence grise du parti islamiste sur les questions économiques n'y va pas par quatre chemins. «Le gouvernement actuel n'a plus ni la légitimité ni le droit de faire de telles annonces. Il aurait été préférable de le faire en début de mandat au lieu de l'intégrer dans la loi de Finances 2012 et, partant, la refiler au prochain gouvernement», déclare Boulif. Et d'ajouter qu'un problème se pose au niveau de la philosophie même de cette taxe. «En 2004 déjà ,nous avions plaidé pour un impôt sur la fortune et non sur les signes extérieurs de richesse car une grande différence persiste: une personne possédant des milliards en compte bancaire mais ne représentant aucune richesse ostentatoire ne serait pas assujettie à cette nouvelle taxe», explique-t-il. Il suffira donc de rouler en Fiat Uno et non en Maserati pour se mettre à l'abri. Cela, Boulif semble être optimiste par rapport à l'instauration de cette taxe vu que le contexte actuel le permet et estime que les riches, qui profitent des subventions de la caisse de compensation, doivent partager le gâteau pour participer au développement du pays. Toutefois, et au-delà de ces interrogations sur l'instauration de la taxe ou non, Khalid Hariri, député USFP préfère revenir sur des questions qui mériteraient mieux d'être soulevées. «Vous savez, ce genre de méthodes n'est pas nouveau. On lance des ballons d'essai pour voir la réaction de la population et puis on rebrousse chemin. Cette mesure a fait l'objet de plusieurs annonces par le passé et ce n'est pas en la reposant sur la table aujourd'hui, en catimini qui plus est, qu'on va résoudre des problèmes structurels dont le Maroc souffre», commente Hariri. Selon le membre de la commission finances au Parlement, il faut être raisonnable et s'attarder sur des points qui ont fait l'objet de plusieurs débats par le passé. «De façon générale, il faut revoir notre système fiscal qui est socialement inéquitable, enlever les exonérations non justifiées comme pour le logement social ou la grande agriculture, avoir plus d'équité au niveau du revenu du travail par rapport au revenu du capital ainsi que réviser la grille de l'Impôt sur le revenu en créant des tranches supérieures pour les très hauts revenus», résume-t-il. Autant de mesures plus efficaces selon Hariri qui d'ailleurs, ne conteste pas l'utilité de la taxe sur les signes extérieurs de richesse. Pour lui, cette annonce faite par le gouvernement suit un effet de mode lancé aux Etats-Unis et en France alors que le gouvernement peut avoir des revenus supplémentaires tirés d'autres sources. «Des mesures concrètes pour réformer le système fiscal marocain vont endiguer l'économie de rente et la spéculation en faveur d'une économie basée sur la production et l'industrie.», déclare Hariri. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle disposition devrait faire l'objet d'un texte de loi qui définit les critères de richesse, les catégories concernées, ainsi que leurs biens. Tout reste donc à faire. En France, il existe un impôt de solidarité sur la fortune qui est payé par les personnes physiques et les couples détenant un patrimoine net imposable supérieur à 1,3 million d'euros. Cet impôt progressif est assis sur la partie supérieure du patrimoine, à un taux allant de 0,55 à 1,8%. En 2010, plus de 562 000 foyers français ont réglé l'ISF, pour des recettes s'établissant à 3,29 milliards d'euros. Par ailleurs, l'ISF est critiqué pour des raisons morales, fiscales et économiques. Au Maroc, une telle taxe créera également un clivage idéologique au sein du monde politique. Toutefois, elle permettra une justice sociale et limitera notamment la prolifération de l'économie de rente.