Depuis dix ans, le monde culturel vit au rythme de plusieurs avancées. Evolution de la scène musicale, développement des infrastructures, profusion de festivals… et ce n'est pas fini ! Détails. L'association L'boulevard vient de recevoir, pour la deuxième année consécutive, un cadeau royal : un chèque de 2 millions de dirhams pour lui permettre de finaliser les studios d'enregistrement du Boutlek, le centre des musiques actuelles. Salutaire, cette aide est une reconnaissance du travail réalisé sur la scène urbaine et la musique alternative. La naissance de nouveaux groupes dans ce qu'on a pendant longtemps appelé la nouvelle scène marocaine a ponctué douze éditions du L'boulevard et douze ans de règne de Mohammed VI. Douze ans pendant lesquels les arts et la culture ont enfin accédé à la place qu'ils méritent, grâce aux festivals, devenus partie intégrante de la scène culturelle nationale. Mawazine rythmes du monde, Casablanca, Gnaoua d'Essaouira, Timitar d'Agadir… Ces événements sont tous à ajouter à la trentaine de festivals du ministère de la Culture. Malgré certaines polémiques sur l'argent qui y est dépensé, ces événements ravissent le public. «Le roi Mohammed VI a inscrit notre nation dans une dynamique d'ouverture et de dialogue, de modernité et de réalisations concrètes. Les festivals en font partie car ils sont devenus des rendez-vous annuels, des ouvrages collectifs dont les succès respectifs reposent sur la mobilisation de nombreux acteurs et de nombreuses compétences des secteurs public et privé», affirme Neila Tazi, la directrice de A3 communication et productrice du festival Gnaoua, musiques du monde. Cette même activiste culturelle souligne que depuis plus de dix ans, les festivals ont été fortement encouragés. «Ils ont révélé des villes et des talents, éveillé des consciences sur l'importance de notre patrimoine, ont encouragé et diffusé la création et ont rapproché diverses sensibilités et générations en créant des espaces de débat et de mixité sociale», développe-t-elle. Et de suggérer néanmoins qu'il y ait une réflexion profonde sur l'avenir des festivals. «La question se pose parce qu'il y en a de plus en plus, que les concepts ne diffèrent que très peu d'une ville à l'autre et que leur financement devient difficile. Tous ces facteurs finiront tôt ou tard par devenir un frein si une réflexion profonde n'est pas menée au niveau national et surtout local». Mais une chose reste sûre : nos festivals ont le mérite d'exister et ne constituent qu'une partie de l'effort mené dans la promotion de la culture et des arts. Parallèlement, les infrastructures culturelles se développent. Après la Médiathèque Bandar Ibn Sultan d'Asilah, la Bibliothèque nationale de Rabat, une douzaine de centres culturels à Casablanca, des maisons de la Culture sont actuellement en construction dans plusieurs villes, au même titre que le Grand théâtre de Casablanca qui ouvrira ses portes en juin 2015. D'un investissement de plus d'un milliard de dirhams, ce bâtiment très moderne signé Christian de Portzamparc et Rachid Andaloussi, devrait permettre à des artistes de diverses disciplines d'avoir plus de notoriété et d'aller à la rencontre directe de leur public. Sans oublier le Musée d'art moderne de Rabat ou encore l'Institut supérieur de danse et de musique. Ce qui fait dire au critique d'art Moulim Laâroussi que la culture connaît un renouveau certain. «Le pays a besoin d'infrastructures, de rendez-vous culturels et artistiques d'envergure, mais également de projets culturels constructifs et fondateurs de la sensibilité artistique et intellectuelle de la société de demain». Pour lui, la création souffre encore d'un manque effrayant. «La pensée unique, le goût unique, voire le despotisme culturel et artistique s'installent en filigrane et broient la diversité, l'originalité et l'authenticité de l'individu». Du côté des acquis sociaux des artistes, la Mutuelle nationale est une des avancées les plus importantes. Créée il y a trois ans, elle regroupe actuellement 2 000 adhérents et 2 000 bénéficiaires. Une convention a récemment été signée avec des cliniques privées où «le bénéficiaire paie 80 % de ses frais médicaux, dans les hôpitaux militaires leur part est uniquement de 10 % et dans les hôpitaux publics il ne paie rien du tout», précise Mohamed Kaouti, le directeur de la Mutuelle nationale des artistes (MNA). Si elle n'a l'air de rien, cette mesure permet au moins de se faire soigner dans la dignité, à l'abri du dénuement et de la solitude dont ont souffert bien de nos artistes.