Plus un marché est liquide, plus il est aisé, rapide et peu coûteux d'y réaliser des transactions. Cette caractéristique figure parmi les qualités essentielles que doivent garantir les marchés boursiers. Pour la Bourse de Casablanca, cette liquidité reste très faible. Dans le contexte boursier, la liquidité désigne la négociabilité et la disponibilité des investissements. Plus l'investisseur peut vendre son placement rapidement et donc faire de l'argent, plus ce placement est liquide. La liquidité revêt une grande importance sur le marché financier. En effet, elle est devenue, au cours de ces dernières années, un élément prépondérant des stratégies des investisseurs et gestionnaires de fonds. Cependant, cette liquidité reste très faible sur la Bourse de Casablanca. La cinquième édition des «workshops de la Bourse», organisée la semaine dernière à Casablanca, a eu le mérite de reposer le débat sur le sujet. Karim Hajji directeur général de la Bourse de Casablanca a précisé, dans son allocution d'ouverture, que la liquidité des marchés impacte même la croissance du PIB/habitant de ces pays. Selon lui, ce taux est de 7% pour les pays dont les marchés sont peu ou pas liquides alors qu'il peut passer à plus de 10% pour ceux qui ont des marchés liquides. Cette liquidité est malheureusement faible sur la place casablancaise. Elle est en réalité de 8% alors qu'elle se situe au-delà de 180% en Turquie, de 38% en Malaisie et de 26% en Egypte. Selon Fabrice Riva, enseignant chercheur à l'Université Paris-Dauphine, l'absence de liquidité sur un marché induit des coûts de transaction implicites et provoque l'apparition d'une prime de liquidité (liquidity as a stock characteristic). « Entre deux entreprises strictement équivalentes celle qui présente un niveau de liquidité plus faible se traitera à des coûts de transactions qui sont plus élevés. En d'autres termes, Il faudra que cette entreprise dégage un taux de rentabilité plus élevé pour attirer des capitaux», a- -t- il expliqué. La raison d'être de ce phénomène est très simple. Les investisseurs raisonnent en taux de rentabilité nets des coûts de transaction puisque ces coûts viendront amoindrir leurs performances. Certains auteurs ont même quantifié à 8% cette rentabilité supplémentaire sur les marchés américains. L'illiquidité présente un autre risque. Ces coûts de transaction sont également présent pour l'ensemble du marché ( commonality ). En effet, on observe des phases d'accroissement ou de décroissance de la liquidité de l'ensemble des titres. Donc à partir du moment où la liquidité est un facteur commun de risque (liquidity as a risk factor), il va falloir que ce risque soit rémunéré, au même titre que le risque de marché, à travers une prime de risque. Pour les marchés émergents, cette prime peut atteindre 6% de taux de rentabilité supplémentaire qui devra être dégagé en raison de ce risque d'illiquidité. L'enseignant-chercheur fait état d'un autre problème posé par l'illiquidité. Cette dernière est également à l'origine d'une perte d'efficience du marché. Mohamed Derrabia, vice-président aux affaires académiques à l'Université Internationale de Rabat, a de son côté évoqué les problèmes de gouvernance des entreprises et leurs impacts sur la liquidité du marché. Selon lui, bonne gouvernance permet également de mieux gérer les chocs financiers. « Après la crise financière, il y avait baisse de liquidité. On a remarqué que les entreprises qui ont une bonne pratique de gouvernance ont résisté à cette crise de liquidité », a -t- il conclu. Pour sa part, Amal Chraïbi, présidente d l'ASFIM, a précisé que durant les 5 dernières années, la liquidité du marché boursier marocain a connu globalement une amélioration. Les encours des OPCVM sont ,de leur coté, passés de 86,5 milliards en 2005 à environ 225 milliards en 2010. Cependant, la répartition de l'encours des OPCVM par catégorie à fin 2010 montre une prépondérance des obligataires (52,1%) sur les OPCVM action (11,6%). Selon elle, la liquidité du marché boursier est au cœur des préoccupations des gestionnaires d'OPCVM puisqu'elle influe sur la capacité de l'organisme à faire face à son engagement de liquidité totale vis-à-vis de ses souscripteurs. Elle impacte également la valorisation de ses placements ainsi que l'attractivité de ses performances et sa stratégie de gestion. Chraïbi a précisé la faiblesse de la liquidité de la bourse marocaine est due à la faiblesse du nombre d'intervenants directs et indirects (environ 20 institutionnels et 24000 souscripteurs particuliers). Elle souligne aussi l'absence de diversité des anticipations, en effet, « les investisseurs ont presque la même opinion sur telle ou telle autre valeur ». Enfin, le flottant des sociétés cotées reste faible et la diversification de l'offre limitée (secteur, taille des entreprises, etc). Pour Fabrice Riva, les outils à exploiter pour améliorer la liquidité sont les ventes à découvert et la création de trakers (ETF's). Selon lui, ces produits fort appréciés du public et très fortement négociés, vont permettre d'améliorer la liquidité des titres qui rentrent dans le panier concerné.