«Ensemble pour approfondir le processus des réformes». C'est sur ce mot d'ordre pompeux et pompé (je l'ai déjà vu ou lu quelque part) qu'a eu lieu dans un lieu à huis clos, la soi-disant rencontre de la soi-disant majorité gouvernementale. J'avais entendu parler de cette rencontre, bien avant qu'elle ne soit annoncée. En fait, si je suis toujours si bien informé, c'est parce que j'ai des informateurs bien placés. D'ailleurs, je suis parfois très frustré, car je ne peux pas vous dire tout ce que je sais pour éviter qu'ils ne soient démasqués. Alors, je préfère vous en dire le moins possible, mais protéger mes sources. Je pense que plus une source est protégée et moins elle risque de se tarir et de se taire. (Notez bien cette phrase. Elle est historique et devrait être inscrite en lettres d'or sur le fronton de toutes les écoles de journalisme d'ici et ailleurs). Revenons à la rencontre. D'abord, penchons-nous sur ce que j'ai appelé «le mot d'ordre» et que notre presse a nommé pudiquement «signe». C'est vrai que c'est un signe. C'est même, à mon avis, un signal. De détresse. Tenez ! Je vais vous apprendre un truc de communication. Comme je suis en train de laisser tomber mes anciennes amours, je peux me permettre de vous divulguer quelques petits secrets. Commençons par le commencement : «Ensemble». Vous savez, à chaque fois que vous voyez ou que vous entendez le mot «Ensemble», soyez sûrs qu'on cherche à vous embobiner. Je vous donne un exemple : «Ensemble pour une vie meilleure». Je ne me souviens plus de quel produit, marque ou institution, il s'agissait, mais c'est le slogan-type dont il faut se méfier. En général, quand on vous dit ça, voilà à peu près ce qu'on veut vous dire : «Tu es dans la mouise et tu n'es pas le seul. Ça tombe bien : plus il y en a, plus c'est bien nous. Vous allez, ENSEMBLE, ramener toutes vos économies, ou emprunter ou voler, vous faites ce que vous voulez, ce n'est pas notre problème, et venir nous voir, ENSEMBLE, nous donner tout ça, et après, c'est comme ça que tous ENSEMBLE, vous allez contribuer à rendre... notre vie meilleure». Pigé ? Je continue. «Pour approfondir». Là, je vais être honnête, ils ne nous ont pas menti car là où ils nous ont mis, c'est très profond. D'ailleurs, ils n'ont même pas eu besoin de creuser. Les trous, il y en avait à la pelle (ça, c'est un 2e degré, mais qui est assez primaire). Maintenant, ce qui est marrant, c'est qu'ils veulent qu'on leur donne un coup de main pour «approfondir»... Au fait, approfondir quoi ? «Le processus des réformes» ! Génial ! Ah moi, j'adhère, sans hésitation. Il y a tellement de gens à réformer dans cette fameuse majorité que même si on se met tous, ENSEMBLE, ce n'est pas sûr qu'on y arrive. Après ce cours sympathique de sémantique improvisé et que je ne vais pas même pas vous facturer tellement, je le reconnais, c'était nul, je voudrais vous dire quand même mon avis sur la suite. Eh bien, mes chers amis, la majorité s'est bien réunie comme prévu, mais elle n'était pas si majoritaire que ça. D'abord, il n'y avait ni l'UC ni, surtout, le PAM. Bien sûr, vous allez me rétorquer : «Opposition, votre honneur !». D'accord ! En vérité, je ne suis pas tout à fait d'accord, mais, on va supposer... Autre chose : pourquoi, selon vous, toutes les autres composantes d'ailleurs plus ou moins composées pour ne pas dire pire, n'ont pas arrêté, d'après ce qu'on m'a rapporté, de taper sur la tête du pauvre soi-disant patron de cette soi-disant majorité ? Attention ! Ne répondez pas tous ENSEMBLE !