La partie de ping-pong reprend sur le marché des changes entre la Chine et les Etats-Unis. Désireux d'amadouer le très stratégique partenaire chinois, Barack Obama avait opté ces derniers mois pour une prudente réserve. Faute de résultats, le Président américain a décidé de remettre la pression sur Pékin à propos du yuan, jugé très sous-évalué. Voici le déroulement des faits.Jeudi 11 mars, Obama a appelé la Chine à évoluer vers «un taux de change plus conforme au marché». Ce qui serait selon lui une contribution importante à l'effort de rééquilibrage mondial. La riposte ne s'est pas fait attendre. Le lendemain, la Banque centrale chinoise a sèchement prié Washington de s'abstenir de «politiser» cette question. «Nous pensons que le taux de change n'aidera ni à diminuer ni à accroître nos excédents et déficits commerciaux», a soutenu le vice-gouverneur de la Banque centrale, Su Ning. Concurrence «déloyale» Pékin a arrêté net, à l'été 2008, la lente réévaluation du renminbi (autre nom du yuan), commencée en 2005. Depuis, la devise n'a pas fluctué de plus de 1%, autour de 6,83 yuans pour 1 dollar. Les partenaires commerciaux de la Chine s'insurgent alors, Etats-Unis en tête. Avec un yuan sous-évalué, soulignent-ils, les biens «made in China» profitent d'un net avantage en termes de compétitivité. Le pays a d'ailleurs ravi à l'Allemagne, en 2009, le titre de premier exportateur mondial. «Avec sa politique de change, la Chine est en train de gagner une guerre économique sur les Etats-Unis sans même livrer bataille», affirme Antoine Brunet, économiste et président d'AB Marchés. Barack Obama, qui vient d'annoncer l'objectif d'un doublement des exportations américaines dans les cinq prochaines années, va-t-il user des grands moyens ? Un rapport officiel du Trésor américain, prévu pour le 15 avril, pourrait accuser Pékin de «manipulation» de sa monnaie. C'est ce pour quoi milite une coalition bipartisane d'élus du Congrès. Cette assertion -une vraie déclaration de guerre monétaire- pourrait entraîner des mesures de rétorsion commerciale envers la Chine. Ne pas s'emballer La manœuvre est complexe. La croissance chinoise est, certes, tributaire de ses exportations vers les Etats-Unis. Mais en retour, le déficit américain est financé en grande partie par la Chine, son deuxième plus gros acheteur d'emprunts d'Etat après le Japon. Pour répondre au chantage par le chantage, Pékin n'aurait qu'à décider de bouder les prochaines adjudications du Trésor américain. De fait, le Premier ministre Wen Jiabao continue de prôner la «stabilité» de la monnaie compte tenu des incertitudes pesant sur la reprise économique mondiale. Or ce ne sont pas les autorités monétaires qui fixent le cap en matière de taux de change mais bien Pékin. Cap de non-retour ? Plusieurs sénateurs américains vont déposer un projet de loi sur les taux de change qui vise implicitement la Chine. Dans la guerre entre les Etats-Unis et la Chine sur ces taux, ces derniers ont décidé de frapper fort. Ce projet de loi a été déposé mardi dernier. Il pénalise la manipulation du cours des devises. Un texte qui vise implicitement la Chine, accusée par Washington de sous-évaluer sa monnaie pour stimuler ses exportations.