Aujourd'hui, j'ai une envie folle de me confesser. Je sais que c'est contraire à notre sainte religion, mais je suis sûr que lorsque vous m'aurez lu, et je l'espère, jusqu'au bout, vous allez me pardonner cet écart sans doute diabolique, mais somme toute très humain. Après tout, comme dirait ce voyou de Thierry Ardisson, se confesser n'est pas... s'affaisser. Bon, bref! Je ne sais pas, chers lecteurs et chères lectrices, si parmi vous il y a un curé ou un évêque, ou même, qui sait, le vieux pape en personne, mais, qui que vous soyez, je vous en supplie, ne me condamnez pas avant de m'avoir écouté. Bien sûr, quand je dis «écouté», je m'entends bien, c'est juste une façon de parler. Trêve de bavardage, sinon on va être encore là demain, alors que demain, c'est mon jour de repos. Donc, j'arrête, priez pour moi, je me jette à l'eau. Chers amis et chères amies, hier, j'ai commis un péché. Car comment appeler ça autrement, sinon un péché, quand on se permet, comme je me le suis minablement permis, de mettre sur le dos des uns un jour ce que les autres ont dans le ventre depuis toujours! Comment appeler ça autrement sinon un péché, quand on ose, comme j'ai piteusement osé, accuser des gens qui ne sont pas forcément des anges, de devenir soudainement tolérants vis-à-vis des grands barons, alors que depuis que l'argent n'a plus d'odeur et qu'il n'y a plus de fumée sans feu, tout le monde le sait, les grands barons ont toujours fait les bons comptes! Enfin, comment appeler ça autrement sinon un péché, quand on a l'outrecuidance, comme j'ai eu pitoyablement l'indécence de pointer du doigt de pauvres pécheurs comme moi de vouloir ramener légitimement à cette terre si féconde, les fruits interdits nés de ses entrailles, au lieu de les laisser filer ailleurs au nez et à la barbe de ceux qui sont chargés – mon œil! - de les surveiller. Oui, j'ai péché et, pis, je savais ce que je faisais. Pour tout vous dire - d'ailleurs, c'est le but de la confession, sinon ça deviendrait vraiment du n'importe quoi – ce n'est pas la première fois. Depuis que j'ai décidé d'embrasser ce métier de billettiste qui n'est peut-être pas le plus vieux, mais sûrement un des plus vicieux, j'ai toujours péché. Je suis en quelque sorte un pécheur à la ligne. D'ailleurs, je suis payé au mot. Alors à force d'en débiter un maximum pour créditer mon compte et faire plaisir à mon banquier, je suis devenu, par la force des choses, un pécheur connu et reconnu. Et, si j'en crois les nombreux messages de félicitations et d'admiration que je reçois chaque jour et les innombrables marques d'affection et de subjugation qu'on m'exprime à tout bout de champ, apparemment, on me croit au mot. Je suis devenu crédible. C'est incroyable! Pourtant, que Dieu me pardonne, je vous ai toujours raconté des histoires. En vérité – quelle transition géniale! – je suis un peu, à ma manière, comme les gens du cinéma. Rien qu'en vous racontant des histoires, ils finissent toujours par arriver à leurs fins: vous embobiner. C'est vrai, je n'ai pas leur talent (pour ceux et celles qui en ont - ni leur argent, lequel d'ailleurs n'est pas toujours le leur, mais, moi, au moins, je ne parle que de ce que je sais. Or, justement, c'est là, mon problème : le peu que je sais, tout le monde le sait, mais, la différence c'est que moi, je le crie sur tous les toits, alors que tout le monde, lui, le garde pour soi. En espérant que le Bon Dieu, grâce à vous, me pardonne tous mes péchés, je voudrais lui demander deux petites faveurs : qu'il me prête longue vie et qu'il me permette de continuer de faire mon cinéma. Dites amen. Bon week-end quand même.