Avec son industrie automobile bien implantée et sa stratégie bas carbone, le Maroc pourrait tirer son épingle du jeu sur le marché en plein essor des véhicules électriques destinés à l'Europe. Au Maroc, une opportunité économique majeure se profile à l'horizon avec la transition énergétique en cours dans les grandes économies mondiales. Selon une récente analyse d'experts de la Banque mondiale, le pays fait partie des nations à revenu intermédiaire «avec la capacité de construire des véhicules» qui sont susceptibles de «voir une hausse des ventes de véhicules électriques vers l'Union européenne». Ce constat émane d'un examen approfondi des politiques climatiques déployées par la Chine, l'UE et les Etats-Unis, comme l'explique Euijin Jung, consultante à la Banque mondiale : «Les normes plus strictes en matière de CO2 et d'économie de carburant alimenteront la demande pour d'autres biens de technologies vertes tels que les véhicules électriques, les panneaux solaires, les éoliennes et leurs composants, notamment les batteries». Dans cette dynamique, le Maroc se trouve à la croisée des chemins dans la course mondiale aux technologies vertes et à la mobilité électrique. Avec une industrie automobile bien établie et des ambitions fortes en matière de développement durable, le Royaume dispose de solides atouts pour s'imposer comme un acteur majeur de la filière des véhicules électriques à destination des marchés européens. Un marché en pleine expansion La transition énergétique impulsée par les grandes puissances économiques fait entrer le secteur des véhicules électriques et des technologies bas carbone dans une nouvelle ère. Comme le souligne les experts de la banque mondiale, «le marché mondial de la technologie verte devrait être multiplié par cinq d'ici 2032». Une projection qui illustre l'ampleur de la demande à venir pour ces produits. Dans ce contexte porteur, le Maroc peut légitimement ambitionner de jouer un rôle clé. «Les pays à revenu intermédiaire avec des capacités de construction automobile verront probablement leurs ventes de véhicules électriques vers l'UE augmenter, c'est le cas du Maroc», affirme Enrique Aldaz-Carroll. Le Royaume peut s'appuyer sur un atout de poids : son secteur automobile déjà bien implanté. Avec des usines flambant neuves de Renault et de Stellantis, il est devenu la première plateforme exportatrice de véhicules du continent africain et un acteur industriel incontournable au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Fort de cette expertise, de coûts compétitifs et d'une situation géographique idéale à quelques encablures de l'Europe, le Maroc semble parfaitement armé pour se positionner sur le créneau prometteur de la mobilité électrique dédiée au marché européen. Une dynamique gouvernementale favorable Au-delà des fondamentaux industriels, la volonté politique constitue un autre moteur de l'ambition électrique du Maroc. Ces dernières années, le Royaume a multiplié les initiatives en faveur d'une économie bas carbone et d'un mix énergétique renouvelable. Avec le plan national de relance économique lancé en 2022, le gouvernement vise notamment à développer la filière des batteries et des véhicules électriques. Un signal fort qui, combiné aux investissements massifs prévus dans les infrastructures de recharge, dessine un cadre propice à l'essor d'un secteur automobile décarboné et tourné vers l'export. Si de nombreux défis techniques et réglementaires restent à relever, la triple dynamique industrielle, commerciale et politique au Maroc pourrait bien faire de ce pays le fer de lance de l'explosion prochaine du marché des véhicules électriques sur le continent africain, aux portes de l'Europe. Avec cette expertise industrielle, des coûts de main-d'œuvre compétitifs et une proximité géographique avec l'Europe, le Maroc semble idéalement positionné pour embrasser la mobilité électrique. «Les politiques climatiques annoncées par l'UE comme le système d'échange de quotas d'émission, la directive sur les énergies renouvelables et les futurs objectifs de décarbonation vont doper la demande européenne pour les véhicules électriques marocains», analysent les consultants de la Banque mondiale. Un cadre réglementaire clé Cependant, pour pleinement bénéficier de ces opportunités, le Maroc devra s'attaquer à des défis de taille. Selon les experts, il devra notamment mettre en place un cadre réglementaire robuste et des infrastructures de qualité pour assurer la traçabilité des émissions et la conformité avec les futures normes environnementales de ses partenaires commerciaux. «Le Maroc doit promouvoir la transition verte de son économie en établissant des mécanismes de tarification du carbone basés sur des normes internationales. Il faut aussi renforcer les infrastructures de mesure, reporting et vérification des émissions pour faciliter la conformité», préconisent les experts. En relevant ces défis, en attirant les investissements étrangers dans la filière électrique et en resserrant ses liens avec les chaînes de valeur vertes mondiales, le Royaume pourrait être l'un des grands gagnants économiques de la transition énergétique en cours. Une opportunité de taille pour ce pays tourné vers l'export, à condition de jouer finement sur tous les tableaux. Bilal Cherraj / Les Inspirations ECO