Le Maroc et les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), c'est le sujet, original mais non sans importance, qui servira de menu principal à l'ordre du jour de la présence du chef du gouvernement à la seconde Chambre du Parlement. Ce mercredi et pendant deux heures d'horloge, Abdelilah Benkirane va devoir expliquer aux conseillers les réalisations du Maroc dans l'atteinte des Objectifs du millénaire pour le développement. Santé, éducation ou lutte contre la pauvreté : à quelques années de l'échéance fixée en 2015, Benkirane pourra aisément se baser sur les chiffres du Haut commissariat du plan (HCP) pour confirmer ce que les institutions internationales ont déjà établi et rassurer les parlementaires : le Maroc sera au rendez-vous de 2015 sur plus des deux tiers des 8 objectifs fixés par la communauté internationale pour réduire la pauvreté au niveau mondial. Un bien maigre sujet de consolation il est vrai, pour cette deuxième sortie au niveau de la seconde Chambre. On se rappelle qu'en juin dernier, juste après son passage à la première Chambre, le chef du gouvernement a dû recourir à une opération médiatique sur les chaînes publiques pour évoquer certains sujets qui lui tiennent à cœur, suite à la polémique née sous la coupole après les réserves de certains parlementaires de l'opposition sur des questions au caractère plus de forme que de fond. Cette fois, les deux parties semblent s'accorder sur «un sujet de compromis» qui aura certainement comme premier mérite, celui de pouvoir enfin respecter les dispositions de la nouvelle Constitution. Surtout qu'aussi consensuel que soit le sujet, le débat ne manquera pas de se réorienter sur des aspects où les appréciations entre le gouvernement et l'opposition divergent à plusieurs niveaux. À cela s'ajoute, évidemment, le contexte économique très défavorable pour le gouvernement et sur lequel l'opposition ne manquera pas d'accentuer la pression politique. En somme, tous les ingrédients d'un véritable débat de fond pour lequel la Chambre des conseillers semble se prêter, cette fois-ci au jeu. Conjoncture économique défavorable L'oral parlementaire de ce mercredi s'annonce tout aussi crucial pour le chef de gouvernement que le premier. Après six mois à la tête de l'Exécutif, il aura bien du mal à surfer sur la grâce tolérée en faveur du débutant pour se dédouaner de l'absence de véritables résultats à l'actif du gouvernement. Or, c'est bien là que le bât blesse : l'économie marocaine bat de plus en plus de l'aile et les perspectives pour les prochaines années ne sont guère reluisantes. En tout cas pas à court terme, selon les prévisions des analystes, à moins que le gouvernement n'adopte des mesures de fond qui permettraient au Maroc de profiter de l'opportunité de la crise européenne dont les effets se font accrus ces derniers temps. Le dernier passage du ministre de l'Economie et des finances et celui du ministre délégué au budget devant la Commission des finances de la Chambre des représentants n'arrange pas forcément le chef de gouvernement. «Les deux ministres ont reconnu l'échec du gouvernement qui met en avant maintenant la crise», a confié aux Echos un député du PAM, le parti justement qui anime les débats à la seconde Chambre. Le parti du tracteur, majoritaire à la Chambre des conseillers attend d'ailleurs le gouvernement de pied ferme et envisage même «une éventuelle mise en cause de la responsabilité gouvernementale» au cas où il parviendrait à s'assurer du soutien de ses «partis amis dans l'opposition». En clair, il s'agirait d'une motion de censure visant à «alerter l'opinion publique nationale sur les dysfonctionnements qui caractérisent l'action gouvernementale et les risques réels d'échec». Le ministre des Finances, Nizar Baraka a tenté, tant bien que mal, de calmer l'angoisse des députés liée à la crise qui se propage à travers la batterie de mesures envisagées par le gouvernement pour renouer avec la résilience qui a été jusque-là un des atouts de l'économie du pays, même au plus fort de la crise. «Nous allons tout faire pour rester souverains dans notre décision économique», s'est engagé Baraka. Il est vrai que depuis sa prise de fonction, le gouvernement n'a cessé d'annoncer des réformes sur tous les aspects sans jusque-là franchir le Rubicon, ce qui ne plaide évidemment pas en sa faveur Compromis politiques Le chef du gouvernement qui à l'épreuve du pouvoir a compris que la situation ne permet guère la concrétisation dans l'immédiat des promesses électorales du PJD, va-t-il, également, reconnaître la gravité de la situation dans le même sillage que ses ministres ? À l'heure où la préparation de la loi de finances 2013 en est à ses débuts et les attentes amplifiées, la faiblesse politique ne sera qu'apparente. Ce qui est sûr, c'est que Benkirane sait qu'il n'aura pas de cadeau au sein de la Chambre des conseillers, où son parti, le PJD, est insuffisamment représenté et sa coalition minoritaire. Ironie du sort, cette Chambre, dont les pouvoirs ont été relativement réduits par la Constitution de 2011 et qui ne tient en partie que grâce au chef de gouvernement qui dispose du pouvoir de la dissoudre, est celle qui s'avère la plus dérangeante pour le gouvernement. Ainsi en témoigne la première sortie du chef du gouvernement qui a été un véritable «show politique». Les élus de la 2e Chambre ont donc tourné la page de l'opposition «sans merci» et se sont mis d'accord avec le gouvernement sur un ordre du jour qui aura l'avantage de toucher directement aux attentes des citoyens. Le bureau de la Chambre des conseillers a tenu, d'ailleurs, une réunion en ce sens, pour fixer la répartition des temps des interventions, derniers réglages pour ce 3e grand oral du président du gouvernement devant les députés qui paraît, cette fois, équilibré. L'instance présidée par Mohamed Cheikh Biadiallah récupère ainsi par l'ordre du jour les principales questions qui sont restées en suspens et derrière elles, la question de la vision que le gouvernement compte activer pour la «réforme». Pour leur part et lors de leur réunion préparatoire, les présidents des groupes parlementaires ont convenu cette fois à ce que ce rendez-vous mensuel soit tenu un mercredi, afin de ne pas entraver les travaux du Parlement qui s'apprête à boucler sa session de printemps. Cela ne changera rien pour Benkirane, qui aura plus besoin de voir les choses changées sur le terrain. C'est, d'ailleurs, ce qu'il a promis aux Marocains... Dixit... Le spectre du P.A.S est toujours vivace dans les esprits avec sa très lourde facture sociale. La politique du gouvernement a manqué jusqu'à présent d'imagination, notamment dans le domaine financier, ce qui a entraîné la chute des réserves en devises. Said Blili, député du RNI. Nous tenons surtout à féliciter le gouvernement pour son courage politique d'avoir dit la vérité. Il ne faut pas oublier que l'année 2011 a été catastrophique, que ce soit pour la hausse de la facture énergétique, la détérioration du change que la hausse des prix. Il faudra faire vite pour la concrétisation des chantiers déjà convenus, comme l'évaluation des accords de libre-échange qui ont été signés et la promulgation de la nouvelle loi bancaire. Abdelkrim Nemaoui, député du PJD Encore une fois, nous découvrons que la situation n'est pas entièrement maîtrisée par le gouvernement. L'Exécutif ne peut pas prétendre à la franchise totale avec les Marocains, car c'est lors du vote du budget que la sincérité doit être de mise. Nous n'avons aucune idée sur le nombre d'appels d'offres qui ont été lancés, ni sur les marchés infructueux de l'Etat et le gouvernement préfère toujours s'appuyer sur la force de ses déclarations plus que sur autre chose. Younès Sekkouri, député du PAM