Les députés se prononcent aujourd'hui sur le sort constitutionnel du gouvernement de Benkirane. Après avoir obtenu la confiance du roi, le gouvernement cherche aujourd'hui à avoir l'adhésion de la majorité absolue de l'instance présidée par Karim Ghellab. Malgré leurs discours virulents, les partis de l'opposition ne semblent pas être en mesure d'aller jusqu'au bout et préfèrent ajourner leurs votes négatifs. Majorité confortable Que ce soit pour le PAM ou pour l'USFP, la voie du blocage n'est pas prônée. «Le président du gouvernement a énormément de chance car il dispose d'une majorité confortable et dispose de pouvoirs élargis. Nous préférons ne pas donner de jugements hâtifs mais il faut que les intentions du gouvernement soient concrétisées», souligne Ahmed Zaidi, le président du groupe socialiste. La séance du vote d'aujourd'hui sera surtout marquée par la réponse préparée par le gouvernement de Benkirane pour répondre aux questions et critiques posées par les partis de l'opposition. La Charte de la majorité a été unanimement décriée par plusieurs députés, qui ont estimé que ce document reste hybride et que sa valeur constitutionnelle n'est pas très claire. La place de cette Charte et sa liaison avec la future loi organique du gouvernement figurent parmi les questions à élucider pour les députés de l'opposition. Le chef de l'Exécutif devra aussi revenir sur l'organigramme final du gouvernement. «Nous avons eu droit à un gouvernement ancien avec un nouveau président. Nous voulons des réponses claires sur les régressions qui ont été constatées et qui reproduisent les erreurs précédentes», constate Abdellatif Wahbi, le président du groupe du PAM. Au sein de la majorité, le chef du gouvernement devra aussi être plus précis dans sa réponse avant le vote concernant les lacunes relatives à la carence des chiffres et l'absence d'objectifs, tout comme les moyens qui seront mis en œuvre pour l'activation des nouveaux chantiers. L'issue du vote de confiance sera pour sa part décisive pour le climat des travaux parlementaires après l'investiture. À l'exception du RNI qui a déclaré qu'il ne soutiendra en aucune manière la nouvelle équipe, la majorité absolue requise des membres votants reste largement à la portée des 4 partis. La séance d'aujourd'hui, qui sera à nouveau présidée conjointement par Ghellab et Biadillah dégagera aussi les scénarii de la coordination entre les 3 partis de l'opposition qui n'ont donné aucun signe de rapprochement depuis les élections. Les nouveaux chiffres du gouvernement - Hausse de 66% du PIB non agricole pour la période 2012-2016. - La rationalisation des ressources hydriques agricoles pour irriguer annuellement 60.000 hectares. - Renforcer l'investissement agricole pour atteindre 20.000 hectares annuellement de terres exploitées. - Parachever les plans d'aménagement des ressources halieutiques pour couvrir 95% des zones de pêche. - Terminer le plan d'urgence du secteur artisanal qui ciblera cette année 60.000 artisans et l'élaboration des schémas directeurs de la formation professionnelle qui leur sont destinés. - La construction de 4 stations conçues par le plan Azur et la création de 47.000 emplois directs dans le tourisme. - Permettre à 7 millions de ruraux de bénéficier du programme de développement du domaine forestier et la diminution du taux de l'analphabétisme à 20% à l'horizon 2016. - Permettre à 673.000 nouveaux bacheliers d'accéder aux universités durant la rentrée 2015-2016, soit une hausse de 60% par rapport à 2011-2012. La mise en place d'une instance nationale d'évaluation est aussi programmée en 2013. La création d'un observatoire pour l'adéquation Formation-Emploi a été aussi convenue. - Réduire le déficit en logements de moitié et la conception d'un nouveau produit pour la classe moyenne dans les grandes villes pour un montant de 800.000 dirhams. - Implanter environ 50.000 hectares de nouvelles forêts, soit le reboisement de 250.000 hectares à l'horizon 2016. - Etablir un plan d'action pour intervenir dans 18 bassins prioritaires avec une cadence annuelle de 25.000 hectares. DIXIT... Abdellatif Wahbi, Président du groupe du PAM. «Le gouvernement a perdu énormément de temps à accoucher d'une ingénierie gouvernementale qui causera des pertes financières et des problèmes de compétences. Avec 4 partis et la présence des technocrates, le gouvernement a été très classique. Les recommandations de l'IER ont été, pour l'heure, totalement absentes de la déclaration du gouvernement. Notre parti, qui a toujours été une source de «provocation positive» de la scène politique ne pratiquera pas la même opposition populiste que le parti vainqueur aux élections a toujours incarnée, car finalement comment peut-on s'allier avec un parti qui était le leader de l'ancien gouvernement ?» Ahmed Zaidi, Président du groupe socialiste au Parlement. «Nos critiques ne sont pas adressées contre des personnes. Nous voulons que les promesses électorales soient présentes au sein de la politique du gouvernement. Les attentes envers ce gouvernement sont énormes, et malgré cela nous avons constaté qu'il n'a pas été celui de la rupture souhaitée. Sur le volet des objectifs chiffrés, la réalisation d'un taux de croissance de 5,5 % en 2012 est «un mirage» économique, tout comme l'absence d'un programme détaillé pour la promotion de l'Emploi. Le gouvernement a également échoué à atténuer le poids de la vision sectorielle dans sa composition et sa stratégie telle qu'elle a été annoncée». Rachid Rokbane, Président du groupe du Progrès Démocratique «La formation de ce gouvernement a été la première marche dans le processus enclenché par la nouvelle Constitution. Je dis à tous ceux qui se sont retranchés dans des alliances qui veulent verrouiller le champ politique que les «camarades progressistes» ont toujours été libres de prendre leurs décisions, et que nous avons préféré cela à l'exercice d'une opposition creuse et sans aucun sens. Le groupe est d'abord pour le soutien du gouvernement, mais pour l'exercice d'un contrôle sur la politique de l'Exécutif dont le programme est sorti des programmes électoraux des 4 partis de la coalition». Malgré toutes nos remarques, nous souhaitons la réussite à ce gouvernement. Pourtant le programme était plutôt de caractère spontané et sans prévisions chiffrées. Le gouvernement promis était aussi de taille plus réduite que l'organigramme final qui a été adopté. Le gouvernement n'a pas procédé à un diagnostic avant d'entamer ses actions. L'absence des programmes électoraux de la politique envisagée est un élément saillant de la déclaration dont nous partageons uniquement les intentions. Plusieurs autres questions urgentes ont été esquivées comme les modalités de la déconcentration ou la réforme de la caisse de compensation. Chaoui Bellasal, Président du groupe de l'UC.