C'est une première dans l'histoire politique de Mélilia. La formation de Mariano Rajoy a nommé un fidèle serviteur du parti d'origine marocaine au poste de délégué du gouvernement local de Mélilia. Abdelmalek El Berkani, 51 ans, naturalisé espagnol dans les années 90, est le premier «musulman» à occuper un poste clé dans l'administration locale de cette enclave. Neurochirurgien de formation, El Berkani a rejoint les rangs du Parti populaire (PP) en 1995. Décrit comme un proche du président du gouvernement de Mélilia, le tonitruant Juan Joé Imbroda, il a occupé plusieurs fonctions dans l'appareil administratif de l'enclave. Le dernier a été le poste de deuxième vice-président du gouvernement. Toutefois, la décision est loin de faire l'unanimité. Des voix de l'extrême droite voient dans la nomination d'un musulman en tant que plus haute autorité du gouvernement et principal responsable des forces armées dans la ville, une erreur de la part du PP, une sorte de discrimination positive pour faire taire les langues qui dénoncent la discrimination des citoyens d'origine marocaine dans la gestion de la chose politique au sein de l'enclave. En 2009, le gouvernement local a entrepris quelques actions symboliques visant à montrer ses bonnes intentions en matière de rapprochement entre les différentes communautés de la ville. Cette année-là, la haute autorité de l'enclave avait intégré la fête du sacrifice dans le calendrier des fêtes religieuses, qui a été décrétée comme jour férié à partir de 2010. Il s'agit, dans ce cas, de la première fête religieuse non catholique célébrée dans l'enclave. Concernant la nomination d'El Berkani, ce dernier a du pain sur la planche. Parmi les dossiers chauds sur lesquels devrait plancher le nouvel homme fort de Melilia, celui de la gestion des frontières avec le Maroc. En plaçant El Berkani aux devants de la scène, le PP a mis un interlocuteur capable de comprendre le langage de Rabat. Sur le plan interne, El Berkani a la lourde mission de faire régner la paix sociale dans l'enclave. Il faut préciser que la communauté la plus marginalisée et souffrant le plus du chômage est bel et bien celle issue du Maroc (sur une population de 75.000 habitants, environ 40.000 sont d'origine musulmane). Contacté par nos soins, Mustapha Aberchan, leader du parti de gauche Coalition pour Mélilia (CPM) et rival politique du nouvel homme fort de Mélilia, estime que «cette désignation est judicieuse mais qu'il reste encore du chemin à faire dans le processus d'intégration de la communauté musulmane». Pour rappel, El Berkani n'est pas un cas exceptionnel. Le PP compte dans ses rangs plusieurs cadres originaires du Maroc, comme cela a été le cas de Fatima Mohamed Kaddur, ex-députée locale sous les couleurs du PP et native de Mélilia. Cette dernière a claqué la porte après des années de bons et loyaux services dans les rangs du parti conservateur, suite aux positions du PP dans l'affaire de l'écolière marocaine interdite d'accéder aux cours pour port du voile dans un lycée de Madrid.