C'est lors du dernier festival international du film de Marrakech (FIFM) que le public a découvert le dernier long métrage de Faouzi Bensaïdi. Contrairement aux autres jours du festival, nombreux sont ceux qui sont restés dans la salle pour découvrir «Mort à vendre». Devenu le porte-parole de la nouvelle vague du cinéma national, Faouzi Bensaïdi suscite depuis toujours la curiosité du public. Il arrive aussi à convaincre les producteurs de différentes nationalités à lui faire confiance. Après «Mille mois», sélectionné à deux reprises au prestigieux festival de Cannes, et «What a wonderful world», plébiscité par les critiques, «Mort à vendre» se présente comme une production maroco-franco-belge, soutenue financièrement par bon nombre d'organismes européens et asiatiques (festival d'Abu Dhabi, le festival de Berlin, la chaîne franco-allemande Arte...). En un mot, Faouzi Bensaïdi arrive à trouver de l'argent là où il est ! «Je ne vois pas les choses de cette façon. Dans la vie, il n'y a pas de secret. Le plus important à mon sens est de donner le meilleur de moi-même, me remettre toujours en question et surtout garder les pieds sur terre», affirme-t-il. On l'avait bien compris. Faouzi est loin d'être exhibitionniste ou narcissique. Sympathique, loin d'être infatué par sa notoriété et son succès comme tant de ses confrères, il parle calmement, déroulant des phrases méditées. «Il y a des gens qui vont aimer «Mort à vendre», comme il y en a d'autres qui ne vont pas l'apprécier. J'accorde peu d'importance à cela, dans la mesure où je me suis investi à fonds pour la réalisation de ce film. Je suis en paix avec moi-même». Le verbe précis, il donne raison aux critiques qui considèrent que «Mort à vendre» n'est autre que la continuité de sa vision cinématographique, dévoilée en 2003, date de production de «Mille mois». «Vous savez, je me suis rendu compte qu'il y avait justement un lien entre mes deux premiers longs métrages et «Mort à vendre» lorsque j'étais au montage», confie-t-il. Selon lui, il y a à la fois le côté urbain, contemporain, qui représente un peu le cinéma de genre, mais aussi une famille au centre qui se déchire face à un destin difficile. «Dans mon dernier film, il y a ces trois jeunes qui sont confrontés aux forces de la vie, à de grandes idées. La nature est présente, le ciel aussi, le rapport à Dieu...», précise-t-il. Vous avez parlé de codes cinématographiques ? Si les thématiques abordées sont presque similaires, les codes cinématographiques, eux, sont complètement différents. Dans «What a Wonderful World», Bensaïdi a joué complètement de ses codes, offrant une véritable leçon de cinéma et confrontant sa place dans le paysage cinématographique marocain en tant que cinéaste original, innovant, exceptionnel. Dans «Mort à vendre», il revient à un cinéma plus classique, tout en gardant son propre cachet, son propre style inimitable. Les lieux de tournage, les images, la direction des acteurs sont là pour nous rappeler qu'il s'agit bien d'un film de Faouzi Bensaïdi. Sans surprise, le cinéaste excelle dans ce film, où il tient aussi un rôle déterminant et partage avec nous sa vision du monde, son point de vue sur la jeunesse, l'amitié, l'amour, le fanatisme, la trahison, la déception, l'échec et la mort. C'est l'histoire de trois jeunes désespérés qui préparent un coup trop lourd pour leurs frêles épaules : le braquage d'une bijouterie. Trois vies différentes qui se mêlent, s'entremêlent... L'intrigue est complexe et bien fouillée. Elle tient le spectateur en haleine jusqu'au bout. «C'est une fiction qui trouve sa source dans la société marocaine. Vous savez, j'aime bien travailler sur l'être humain, sur la société. La richesse de l'âme humaine est incroyable, avec sa profondeur, ses abîmes, parfois avec sa légèreté, souvent avec une dimension tragique et universelle». Et puis, il faut bien que l'on (re) parle d'argent ! L'avance sur recettes de «Mort à vendre» est de moins de 30% par rapport à ses deux premiers films. Cette donnée a-t-elle eu des effets sur le film ? Faouzi répond vite : «Pas du tout. Je fais partie de ceux qui pensent que le fait d'opter pour une économie des moyens financiers pourrait conduire à de meilleurs choix esthétiques. Je ne me plaindrai jamais de ne pas avoir pu réaliser le film dont j'ai rêvé, sous prétexte que je n'ai pas reçu l'argent nécessaire pour sa réalisation. C'est une fausse raison». Pour le moment, Faouzi Bensaïdi préfère se concentrer sur la promotion de «Mort à vendre», sélectionné à Berlin et ne point parler de ses projets futurs. Toutefois, on le sait déjà : la méthode sera révolutionnaire, innovante comme pour le tournage de ses trois longs métrages. «Aborder de nouvelles thématiques, m'aventurer sur d'autres terrains me donne de l'équilibre.»