Il reste moins d'un mois au gouvernement et aux partenaires sociaux et économiques pour trouver un terrain d'entente. Quatre semaines après le lancement du dialogue social, le gouvernement est attendu, demain, de pied ferme par les partenaires sociaux pour faire des propositions concrètes sur l'amélioration des revenus. Le compte à rebours est enclenché. La signature d'un accord tripartite avant le 1er mai est un enjeu de taille auquel aspirent toutes les parties. L'Exécutif peine à accorder ses violons avec les centrales syndicales les plus représentatives. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne, après des années marquées par un profond désaccord? Rien n'est moins sûr, bien que le dialogue social soit renoué sur des bases concrètes. Il faut dire que le gouvernement et les partenaires sociaux continuent de se regarder en chiens de faïence, surtout en ce qui concerne le dossier de l'amélioration des revenus; une épée de Damoclès qui pèse sur les négociations. Ce point, en tête des priorités syndicales, risque en effet de causer l'échec du dialogue social. Les réunions de la commission dédiée à ce dossier sont marquées par des discussions très animées, selon une source interne. Les syndicalistes plaident pour l'augmentation des salaires non seulement dans la fonction publique, mais aussi dans le secteur privé, alors que le patronat brandit la carte de la compétitivité et de la conjoncture économique. Difficile de rapprocher les points de vue des deux camps, chacun étalant ses arguments. Le secteur privé est appelé à aligner son SMIG sur celui de la fonction publique. Un vœu qui paraît pieux, du moins pour le moment. À la veille des élections pour la présidence de la CGEM, il est difficile d'arracher au patronat un tel engagement. D'ailleurs, les syndicalistes ne se font pas d'illusion sur ce point. Mais ce n'est pas pour autant qu'ils comptent lâcher du lest. Leur doléance ne porte pas uniquement sur le salaire minimum mais plutôt sur une augmentation générale qui pourrait passer par la baisse de l'impôt sur le revenu. À ce titre, la balle est dans le camp du gouvernement pour la révision et le réaménagement de la grille de l'IR. Les dés de l'Exécutif devront être jetés lors de la réunion de la Commission chargée de l'amélioration des revenus prévue demain (mardi). Le gouvernement va-t-il satisfaire cette doléance? Rappelons qu'en 2016, le gouvernement de Benkirane avait proposé, dans le cadre du dialogue social, une baisse de l'Impôt sur le revenu de 2% dont la concrétisation aurait coûté à l'Etat la somme de 3,2 MMDH, mais sans grand impact sur le revenu des salariés. Cette fois-ci, les syndicats espèrent une meilleure proposition de la part d'El Othmani, d'autant plus que le gouvernement n'entend pas, pour le moment, procéder à une augmentation directe et générale des salaires. L'Exécutif serait plutôt favorable à une augmentation ne dépassant pas 400 DH pour les salaires inférieurs à 5.500 DH. À cela s'ajoute l'augmentation des allocations familiales, un point qui fait l'unanimité. Mais il reste à définir le montant de ces allocations, qui passerait fort probablement de 200 à 300 DH, comme l'avait déjà proposé l'ancien gouvernement. La prime de naissance devrait être relevée de 500 DH à 1.000 DH. Le gouvernement pourrait aussi répondre favorablement à la doléance ayant trait à l'avancement des fonctionnaires bloqués aux échelles 8 et 9. Par ailleurs, on s'attend à ce que l'indemnité pour le travail dans les zones éloignées et difficiles d'accès soit enfin mise sur les rails. Cette indemnité devait être mise en œuvre il y a neuf ans, mais les discussions butaient, depuis 2009, sur la définition de ces zones. Aujourd'hui, on compte mettre fin au statut quo en faisant bénéficier les fonctionnaires des secteurs de la santé et de l'enseignement officiant dans des zones difficiles d'accès ne disposant pas de services de base et peu dotées en infrastructures d'une indemnité de 700 DH. Cette mesure pourrait être étendue aux agents des collectivités territoriales. Rien n'est encore tranché Cette semaine s'annonce décisive pour l'issue du dialogue social. Jusque-là, rien n'est encore tranché même si «les discussions progressent», pour reprendre les termes d'un dirigeant syndicaliste contacté par les Inspirations ECO. Les partenaires sociaux restent aux aguets. Ils s'attendent à ce que le gouvernement brandisse encore une fois la carte de la nécessité de la sauvegarde des équilibres macro-économiques. L'Exécutif a d'ailleurs déjà annoncé aux partenaires sociaux le montant qu'il compte allouer à la concrétisation des différents points du prochain accord. Le budget ne doit pas dépasser 6 MMDH. C'est le même montant qu'avait proposé le précédent gouvernement aux centrales syndicales. Cette fois-ci, les syndicalistes semblent moins rigides qu'auparavant et sont visiblement disposés à accepter les propositions du gouvernement bien qu'elles ne soient pas à la hauteur de leurs aspirations. Après plusieurs années qualifiées de blanches, les syndicats espèrent redorer leur blason auprès des bases et faire renaître chez les travailleurs la confiance perdue dans l'échiquier syndical. Certains d'entre eux estiment nécessaire de saisir l'occasion de ce round du dialogue social pour arracher quelques acquis, bien qu'ils soient limités, tandis que d'autres haussent le ton et ne semblent pas apprécier le déroulement du dialogue social. L'actuel round devra se poursuivre après la Fête du travail, même en cas de signature d'un accord tripartite. Plusieurs dossiers inscrits à l'ordre du jour nécessitent, en effet, de profondes discussions qui ne peuvent pas aboutir du jour au lendemain. Il s'agit notamment de la réforme du statut général de la fonction publique ou encore de la législation «de la discorde» comme le Code du travail, le projet de loi organique sur la grève, le texte sur l'organisation des syndicats...