Après deux tentatives sans succès pour accéder à la présidence du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, 56 ans, a accédé au pouvoir en obtenant un résultat sans précédent pour la droite espagnole. La percée électorale réalisée lors des élections municipales s'est encore une fois confirmée dimanche. Le Parti populaire a infligé, sans surprise, une défaite historique aux socialistes au pouvoir. Avec 186 sièges emportés, le PP gouvernera avec une majorité absolue, un score jamais obtenu même par les plus charismatiques des leaders du parti, comme Aznar. Cela signifie que le PP aura la voie libre pour diriger sans alliances ni pacte politique. L'appel désespéré de Rubalcaba durant la campagne électorale de ne pas «mettre entre les mains du PP le pouvoir total» n'a pas eu d'écho. Les Espagnols ont lourdement sanctionné les socialistes et son candidat Alfredo Rubalcaba. Admettant sa défaite, le malheureux aspirant à la présidence a promis une opposition forte, afin de contrecarrer le poids du PP qui règne, à présent en maître, sur l'ensemble du pays, au niveau régional puisqu'il contrôle 11 autonomies sur 17 et dorénavant national. Et comme l'a titré le quotidien conservateur ABC, «L'Espagne confie son futur à Mariano Rajoy». Néanmoins, la nouvelle ère des populaires suscite beaucoup de craintes. Dans son premier discours prononcé à l'issue de la publication des résultats, Rajoy a promis de s'attaquer d'urgence aux maux qui rongent l'Espagne, à savoir le chômage et la croissance. Malgré ses propos apaisants, affirmant que «personne ne devrait sentir aucune inquiétude», et que ses seuls ennemis étaient le chômage, le déficit et la dette excessive, les Espagnols savent que la saison des coupes budgétaires ne fait que commencer. D'ailleurs le sixième président du gouvernement espagnol était peu bavard sur ses vraies intentions et souvent était taxé de ne pas livrer le fond de sa pensée sur comment par exemple il comptait porter le déficit à 4,4%en 2012. «Sans une montée notable des recettes fiscales, il est indispensable de recourir à des coupes dans les dépenses publiques», estime la gazette économique Expansion. Le grand parti du nouveau locataire du Palais de la Moncloa est de redresser l'Espagne et de renouer avec la croissance, coûte que coûte. «La priorité est de donner un message de confiance aux marchés», a-t-il promis. C'est dans ce sens qu'il a annoncé son intention d'organiser une réunion avec les présidents des autonomies pour se concerter sur un plan de sauvetage. Le déficit des régions autonomes espagnoles est un casse-tête chinois pour les comptes publics. Rajoy a promis des aides pour les PME, à travers la modification du régime du TVA et de l'impôt sur les sociétés. Il n'en reste pas moins que les marchés semblent être insensibles au changement de couleur politique en Espagne. La Bourse de Madrid a ouvert lundi matin avec une chute de 2%. D'ailleurs, durant la semaine dernière, la place madrilène n'a pas arrêté de faire du yoyo. Les taux d'emprunt à long terme ont atteint des records durant la semaine de la campagne électorale, entrant des fois dans la zone de risque d'un plan de sauvetage. Cela fait dire au quotidien économique El Economista, que «l'Espagne est nue devant les marchés». Conscient que les places financières ne lui donneront aucune trêve pour savourer sa victoire, Rajoy devrait nommer lundi son vice-président économique pour arrêter l'hémorragie et envoyer un signal en direction des marchés. Les analystes économiques parient que ce portefeuille sera confié à un technocrate, comme le seront aussi la plupart des postes clés liés à l'économie. Sur le registre de la politique extérieure, le volet des liens avec le Maroc a été peu évoqué durant la campagne électorale, crise économique oblige. Les rares déclarations de Mariano Rajoy sur la politique extérieure de l'Espagne se veulent évasives, accordant toutefois une place de choix aux pays latimo-américains. Cependant, Rajoy a fait référence au Maghreb, déclarant au passage que la région revêtait une importance primordiale pour lui. Concernant les relations avec le Maroc, Rajoy n'était pas trop disert sur sa conception des relations maroco-espagnoles, laissant planer le doute, le sport favori du nouveau président espagnol. Interrogé par le quotidien El Pais, à quelques jours des élections sur la tradition où le nouveau chef du gouvernement espagnol effectue son premier voyage à Rabat, Rajoy a évité de le confirmer en disant que cela n'a pas toujours été le cas. Rajoy a tout de même exprimé son souhait d'entretenir de bonnes relations avec le royaume: «Nous sommes des voisins et continuerons de l'être. Au large de cette législature, il y a eu un certain problème et un malentendu mais je crois qu'on peut avoir de bonnes relations. Le Maroc est un pays qui a fait des avancées en matière des droits humains et il tente de réaliser des progrès économiques et cela est très réconfortant».