Les enjeux de l'élection présidentielle iranienne sont plus internationaux que nationaux, car la politique sociale reste maîtrisée par les instances religieuses. Malgré la levée des sanctions des Nations Unies sur le nucléaire, le pays reste embourbé dans une situation économique précaire, avec un chômage estimé à 30 %. Même si Donald Trump a déclaré dans la semaine maintenir la levée des sanctions qu'avait décidées Obama, la crise économique et diplomatique est actuelle. Décryptage des enjeux. C'est le deuxième scrutin le plus important de l'année 2017, puisque les élections présidentielles d'Iran se dérouleront ce vendredi 19 mai. Cet évènement annonce la fin ou le renouvellement du mandat d'Hassan Rouhani, l'actuel président de la République islamique. Plus de 55 millions d'Iraniens se déplaceront aux urnes pour élire l'un des 5 candidats en course pour la présidence, institution qui existe depuis la fin de la Révolution islamique de 1980. Le régime, réputé « autoritaire » possède des institutions démocratiques bien que la totalité de celles-ci soient doublées d'institutions religieuses. La figure du guide de la révolution, Ali Khamenei, notamment élu à vie par suffrage indirect reste l'élément clé du régime. D'ailleurs, ce sont ces institutions non-élues qui influencent le scrutin, puisque ce sont elles qui ont sélectionné les candidats. Deux hommes, deux visions Sur 1 636 candidatures à la présidence, le Conseil de la révolution a retenu 6 candidats et aucune des 137 candidatures féminines. Par la suite, deux des six candidats se sont retirés, en faveur des deux favoris. Pour schématiser, cette élection est donc un duel entre Hassan Rouhani et Ebrahim Raisi, qui représentent respectivement les courants réformistes et conservateurs. Les observateurs politiques iraniens interprètent la candidature de ce juge religieux proche du guide suprême comme un sondage de légitimité dans le but de le préparer pour succéder, avec l'approbation du peuple, à Ali Kahmenei, 77 ans. Cependant, Ebrahim Raisi, n'a aucune expérience et semble manquer de charisme pour occuper la présidence. Dans son projet, on retrouve une réticence certaine à l'ouverture du pays au monde et en particulier à l'Occident, qui menace selon lui l'intégrité de l'Iran. La sévérité de Donald Trump à l'encontre de l'Iran a d'ailleurs alimenté le discours isolationniste de Raisi, qui perd toutefois de sa crédibilité depuis que le président américain à confirmé la levée des sanctions. Rouhani, l'homme de la détente Issu du courant des modérés, Hassan Rouhani a signé l'accord nucléaire à Vienne en 2012, ce qui a permis une levée partielle des sanctions économiques qui ralentissaient le pays et lui a valu une grande popularité. Néanmoins, le candidat souffre d'un bilan économique mitigé. Même si la production du pétrole a retrouvé le niveau qu'elle avait avant les sanctions, et que l'inflation a largement diminué, le chômage reste élevé, surtout chez les jeunes, et le pouvoir d'achat n'augmente plus. Cependant, dans l'histoire de la République islamique d'Iran, tous les présidents investis ont été réélus à la fin de leur premier mandat. De plus, Hassan Rouhani possède l'image d'un fin diplomate depuis la signature des accords de Vienne, une qualité importante pour affronter le nouveau président américain à la diplomatie provocante. L'Arabie saoudite, le grain de sable Le voyage de Donald Trump en Arabie saoudite pour y rencontrer les chefs les plus influents de la région est une mauvaise nouvelle pour un Iran qui exprime depuis plusieurs années la volonté de se repositionner comme leader du Moyen-Orient. Pour rappel, l'Iran chiite est le principal allié de la Syrie et de l'Irak, qui sont des éléments clés dans l'équilibre politique de la région, déjà très fragile. De ce fait, si Raisi venait à être élu et changeait la direction diplomatique prise par Rouhani, cela pourrait avoir des conséquences sur les conflits de la région. L'élection de Raisi porterait un conservateur au pouvoir, alors que l'élément réformateur qu'était Rouhani durant ces 8 dernières années a permis de contrebalancer le conservatisme des institutions religieuses et notamment de l'ayatollah Khamenei. Sans le camp réformateur, le traité de Vienne permettant au pays de se désenclaver et retrouver une situation économique viable n'aurait jamais été signé, puisque le guide s'y opposant à l'époque. Une possible fermeture de l'Iran vers l'extérieur est susceptible de déclencher une recrudescence des tensions avec l'Occident et donc de nouvelles sanctions économiques.