La majorité des internautes sondés par Flm se disent défavorables au libre-échange avec des puissances économiques. Il faut dire que la théorie des avantages comparatifs ne fonctionne que dans un seul sens. Une large majorité de 94% des 914 internautes qui ont répondu au sondage online de Flm s'est déclarée comme étant défavorable au libre-échange avec des puissances économiques. A contrario, 6% des internautes y sont favorables. En effet, au niveau de la théorie économique, le libre-échange se justifie notamment par la théorie des avantages comparatifs de Ricardo au 18e siècle. Cette théorie stipule que les pays gagneraient à se spécialiser dans la production de biens où ils détiennent l'avantage relatif le plus important ou le désavantage relatif le moins lourd de conséquences. Pour le Maroc par exemple, selon la théorie des avantages comparatifs, il est plus judicieux d'importer de l'acier énergivore et d'exporter des conserves de poissons ou de l'engrais. Or, les faits ont donné tort à cette théorie car depuis la conclusion de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne (UE) en 2002, le taux de couverture commercial est passé de 66,3% à 54,7% en 2016. Aussi, dans l'absolu, sur les 12 mois de 2016, le déficit commercial a atteint 184,4 MMDH, en hausse de 30,2 MMDH (+19,6%). Ainsi, malgré ses moyens limités, le Maroc a injecté plus de 18 milliards de dollars américain dans l'économie mondiale via le commerce international. Pour le cas de l'UE, partenaire stratégique du Maroc, selon les derniers chiffres, via le commerce, l'UE gagne annuellement près de 6,5 milliards d'euros avec le Maroc quand l'aide accordée n'est que de 200 millions d'euros en moyenne, dépassant rarement les 300 millions d'euros. De plus, l'aide accordée est souvent conditionnée par la conduite de réformes sur des thématiques retenues par l'UE. Ce libre-échange pourrait aussi être davantage déséquilibré en cas de libéralisation des services. En particulier, cette libéralisation pourrait causer davantage de dégâts que l'accord sur les marchandises. Cette situation du Maroc peut s'expliquer par le fait que les exportations marocaines sont plutôt inélastiques aux droits de douane car elles sont indispensables aux clients (ex : phosphates) ou déjà soumises à un régime particulier (ex : admission temporaire dans le textile). Aussi, là où le Maroc détient un avantage comparatif certain dans l'agriculture, l'UE ou les Etats-Unis sont tatillons, évoquant tantôt des règles sanitaires tantôt des quotas voire des blocages manu militari des concurrents. Aussi, pour l'industrie, notre pays est plutôt difficilement concurrentiel sur certains produits avec une énergie chère, un marché domestique plutôt étroit ainsi qu'une R&D encore insuffisante. Farid Mezouar DG de FL Market Les Inspirations ECO : Quelle alternative au libre-échange ? Farid Mezouar : Tout d'abord, certains produits marocains peuvent être facilement redéployés vers d'autres zones économiques (ex : agroalimentaire en Russie). De plus, l'OMC offre un cadre d'échange de marchandises sans passer nécessairement par la case du libre-échange ou du partenariat avancé. Par ailleurs, la substitution de la production locale à l'import, peut aussi stimuler l'industrie locale comme nous le constatons par exemple dans le secteur du ciment. Faut-il donc promouvoir le protectionnisme ? Oui et non car le Maroc pratique déjà la sauvegarde commerciale sur certains produits. Aussi, la protection de certains secteurs peut passer outre les barrières tarifaires par l'adoption de normes spécifiques ou de conditions d'origine plus strictes. Aussi, des règles fiscales appropriées peuvent diriger les consommateurs vers les produits locaux. In fine, le protectionnisme peut se pratiquer dans les faits sans qu'il soit explicitement mentionné comme le font déjà certains pays dans le cadre de l'Accord d'Agadir par exemple.