Le déficit commercial a toujours fluctué au gré de la conjoncture économique. Les internautes sondés par Flm sont plutôt partagés quant à sa soutenabilité. 59% des 560 internautes qui ont répondu au sondage online de Flm ont jugé que le déficit commercial du Maroc est soutenable, quand 41% sont plus pessimistes, jugeant cette situation comme étant non soutenable. Ainsi, ceux qui jugent le déficit commercial comme étant soutenable, se basent certainement sur deux à trois principaux points. Le premier est le lien entre le déficit commercial et la dynamique d'investissement. En effet, l'importation de biens d'équipements a explosé de 27,5% en 2016 à 119,3 MMDH. Ce niveau représente 29,3% du total des importations, ce qui relativise l'impact négatif de la hausse de 9,3% des achats à l'étranger. Le deuxième point est celui de la bonne performance marocaine au niveau des flux des devises car les transferts MRE ont augmenté en 2016 de 3,4% à 62,2 MMDH. Aussi, les recettes du tourisme ont atteint 63,3 MMDH, en croissance de 3,5%. Enfin, même en baisse de 17,5%, les IDE ont atteint un montant de 32,9 MMDH. Ainsi, en net, les flux MRE/tourisme/IDE ont comblé 73% de ce déficit commercial. Le troisième point est probablement lié à la croyance dans la pertinence des stratégies de stimulation de l'export avec le benchmark de l'automobile, dont l'export a augmenté en 2016 de 5,6 MMDH à 54,4 MMDH. Ce niveau est tout simplement le premier poste d'export au Maroc avec 24,4% du total des ventes à l'étranger. Toutefois, le pessimisme de ceux qui trouvent le déficit commercial comme non soutenable, est plutôt justifié. En effet, même en 2015 qui a été la meilleure performance depuis 10 ans, le taux de couverture n'avait atteint que le seuil de 58,5%. Aussi, dans l'absolu, sur les 12 mois de 2016, le déficit commercial a atteint 184,4 MMDH, en hausse de 30,2 MMDH (+19,6%). Pourtant, en 2016, le Maroc a bénéficié de la réduction de la facture énergétique de 11,7 MMDH. Ce niveau de déficit représente tout de même 72% des réserves de change. De plus, avec le passage en taux de change flexible, une telle situation va se traduire inéluctablement par une dépréciation du dirham. Par ailleurs, la «préférence étrangère» limite la portée de certaines stratégies de stimulation de l'export. À titre d'exemple, dans l'automobile, deux tiers de la hausse de l'export a été absorbée par la progression de l'import. De même, en matière alimentaire, le Maroc est encore loin de l'autosuffisance comme le montre la hausse des importations de produits alimentaires de 8,9 MMDH en 2016. C'est notamment le cas du sucre avec 4,6 MMDH d'importations, en hausse de 37,7%. Idem, pour le blé avec 12,8 MMDH d'achats à l'étranger, en hausse de 49,4%, dans une année de sécheresse, imprévisible par définition. Farid Mezouar DG de FL Market Les Inspirations ECO : Pourquoi le déficit commercial persiste au Maroc ? Farid Mezouar : Probablement, il faut changer de «logiciel» en matière de commerce extérieur car jusqu'à maintenant, on a surtout cherché à réduire les déficits en mettant le focus sur la stimulation de l'export. Or, avec un marché domestique de taille modeste et un coût élevé de l'énergie, nous sommes peu compétitifs sur certains produits. De même, en l'absence d'un taux d'intégration élevé, la hausse de certaines exportations profite peu à la réduction du déficit. Quelles sont les pistes à explorer ? Je pense naturellement au patriotisme économique spontané ou imposé par une législation appropriée. En effet, avec une base d'import plus large, chaque pourcentage gagné profite d'un effet multiplicateur. À titre d'exemple, les consommateurs peuvent très bien privilégier les voitures fabriquées localement. De même, les promoteurs immobiliers peuvent aussi acheter les matériaux de construction en local. Enfin, la commande publique conséquente peut instaurer une préférence implicite envers les entreprises nationales.