Le degré d'adaptabilité du système éducatif aux changements que connaissent les secteurs qui emploient a, depuis une décennie, constitué la question principale à laquelle le gouvernement tente de répondre. La Vision 2030 est, pour l'heure, le fer de lance de sa stratégie. Le discours du Roi Mohammed VI du 10 octobre 2014, à l'occasion de l'ouverture de la session parlementaire d'automne, a marqué la rupture avec les schèmes habituels que suit le secteur de l'enseignement au Maroc, et a été l'expression manifeste de la naissance d'une approche nouvelle, fraîche, moderne, axée sur l'efficacité et la promotion de la compétence. L'enclenchement des processus de réforme a, depuis, été remis au centre des priorités du gouvernement, à fortiori lorsque l'émergence des nouveaux métiers mondiaux a creusé davantage le fossé entre les formations pourvues et les besoins actuelles du marché de l'emploi. Cet écart est d'autant plus flagrant que le déficit d'employabilité des profils fournis s'est maintenu, et ce malgré la multiplication des installations industrielles sous l'infusion du Plan d'accélération industrielle (PAI). C'est pour remédier à ce problème que la Vision 2030 pour l'enseignement a été pensée et développée par le Conseil supérieur de l'Education, de la formation et de la recherche scientifique. Celui-ci, après étude approfondie de la question, a livré des conclusions concluantes : d'un côté, il dresse un constat alarmant au niveau structurel, de l'autre, il couvre le futur d'optimisme et présente sa Vision comme étant un des facteurs les plus à même de réformer le vieux mastodonte éducatif. Selon le Conseil, les principaux dysfonctionnements dont souffre le secteur de l'éducation résident dans le rendement limité de l'école marocaine, attribuable notamment à la faible maîtrise des langues, des connaissances, des compétences et des valeurs, l'efficacité restreinte des performances des acteurs pédagogiques, les lacunes des formations initiale et continue, la persistance des déperditions qui affectent aussi bien les systèmes scolaire et universitaire, que la formation professionnelle, l'accès limité à l'apprentissage par le biais des technologies éducatives, le faible rendement de la recherche scientifique et les hésitations dans le traitement des problématiques transversales, notamment la question de l'apprentissage des langues et des langues d'enseignement. Les conséquences directes de telles lacunes sont, toujours selon les conclusions dressées par le Conseil, les difficultés d'insertion économique, sociale et culturelle des lauréats, ainsi que la faible interaction de l'école avec son environnement local, national et international, aggravée par sa faible capacité d'accompagner ou d'intégrer rapidement et pertinemment les évolutions de cet environnement. Aussi, il a été relevé une incapacité palpable de l'école marocaine à accompagner efficacement le pays dans son développement global et dans son adaptation aux mutations sectorielles majeures qui font naître des métiers nouveaux, très peu ou pas du tout couverts par les programmes pédagogiques jusque-là adoptés par l'école publique. A partir de là, un certain nombre de problématiques a pu être dégagé : Qu'est ce qui a fait que les réformes engagées depuis l'ère de l'arabisation n'ont-elles pas respecté leurs engagements vis-à-vis des résultats escomptés ? Le problème résidait-il au niveau de la conception de ces réformes, ou de leur application ? L'Etat disposait-il de moyens suffisants pour concrétiser ses ambitions ? Le modèle pédagogique lui-même était-il adéquat ? Le suivi était-il suffisamment équipé de dispositifs fiables et acérés, à même de permettre aux autorités compétentes de mesurer le degré d'applicabilité des dispositions décidées ? Ou est-ce le résultat conjugué de l'ensemble de ces dysfonctionnements, empilés l'un sur l'autre depuis des décennies sans qu'aucune action ne suffise à les résorber ? Une chose est sûre : la solution réside dans l'adaptation des programmes aux exigences actuelles du marché de l'emploi, et la généralisation du processus de scolarisation de manière équitable au plus grand nombre. Pour la première, le rôle des systèmes éducatifs public et privé dans l'optimisation des contenus et l'intégration de nouveaux programmes de formation devant permettre aux futurs lauréats de forger des qualités autres que celles techniques et théoriques, permettant ainsi au marché de l'emploi de trouver son compte en profils fiables et prolifiques. S'agissant de la généralisation des efforts, le Conseil a établi la nécessité avérée de l'augmentation continue des capacités d'accueil de la formation professionnelle par la création de nouveaux établissements et par une mise à niveau de ceux qui en ont besoin afin de mieux garantir une utilisation performante des infrastructures et une rationalisation des ressources. Aussi, la même importance est à accorder au renforcement des passerelles entre la formation professionnelle et le tissu économique, entre la formation professionnelle et l'université ainsi que le renouvellement des formations, leur diversification et leur adaptation continue à l'évolution des métiers et à leur rénovation ; à l'incitation des entreprises, des associations et des groupes professionnels à dispenser des formations au sein de leurs établissements ; l'exploitation optimale et le soutien aux différents moyens de formation dont dispose le tissu associatif ; au renforcement et l'amélioration de la formation professionnelle au niveau régional et son extension en milieu rural et dans les zones enclavées par la création d'unités mobiles ; à la réorganisation et la restructuration, à moyen terme, de la formation par apprentissage en vue de l'étendre, essentiellement au milieu rural, et d'élaborer des programmes qui répondent à ses besoins, en privilégiant les métiers manuels ; à la mise en place d'un parcours professionnel, à partir du collégial, qui débouche sur des filières du secondaire qualifiant menant à l'obtention d'un baccalauréat professionnel (stratégie assurée par l'OFPPT) et, enfin, au développement de la formation professionnelle qualifiante pour les lauréats de l'enseignement supérieur à la recherche d'un emploi, en diversifiant l'offre, dans le cadre d'une collaboration avec les universités et les établissements de l'enseignement supérieur.