Très controversée par les syndicats, la mesure de la mobilité des fonctionnaires sera bientôt concrétisée. Les premières demandes des administrations ont déjà été émises. Une commission nationale va se pencher sur l'offre et la demande de l'ensemble des départements ministériels et des collectivités locales. Le processus de mise en œuvre de la mobilité des fonctionnaires est lancé. Le gouvernement a créé ce que l'on appelle «la Bourse des fonctionnaires», composée de profils mis par certaines administrations la disposition d'autres départements. Concrètement, chaque administration est appelée à évaluer ses ressources humaines afin de pouvoir «placer» les compétences dont elle n'a plus besoin sur la «Bourse des fonctionnaires» et, le cas échéant, bénéficier de nouveaux profils provenant d'autres départements. Une commission nationale composée des ministères de la Fonction publique, des Finances, de l'Intérieur ainsi que des départements concernés va se pencher sur l'offre et la demande de l'ensemble des départements ministériels. Le mécanisme semble tant et si bien ficelé que les premiers «transferts» sont prévus dans les quelques mois à venir. La commission est en effet appelée à rendre son verdict avant le 1er mai. Attention aux dissenssions ! D'un point de vue technique, la mise en œuvre de la mobilité des fonctionnaires risque de créer des dissensions entre le gouvernement et ses partenaires sociaux. La nouvelle mesure suscite une grande appréhension, d'autant plus que la mutation à l'initiative de l'administration ne nécessite pas l'accord du fonctionnaire concerné. Nombreux sont ceux qui pensent qu'il s'agit désormais d'une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des fonctionnaires qui redoutent des mutations discrétionnaires. De son côté, le ministre de la Fonction publique et de la modernisation de l'administration, Mohamed Moubdii, rassure en soulignant qu'outre la commission nationale chargée d'étudier en profondeur l'offre et la demande des administrations, une commission paritaire se chargera d'examiner les dossiers. Cependant, la conciliation de l'intérêt de l'administration avec celui du fonctionnaire est une équation difficile à résoudre. Le responsable gouvernemental estime que la mobilité est une nécessité pour accompagner le chantier de la régionalisation avancée. La déconcentration administrative est, en effet, l'un des chantiers les plus importants pour relever les défis de la régionalisation. Il vise l'amélioration de la qualité des services publics au niveau local et la mise en place d'une administration de proximité. La réussite de la gestion déconcentrée des services administratifs est tributaire des moyens humains et matériels mis à la disposition des régions. Le nouveau texte de la mobilité vise ainsi à fluidifier les mutations entre administrations afin de mieux servir les régions et améliorer le rendement des administrations. Avant l'adoption par le Conseil de gouvernement, en juillet 2015, du décret sur la mobilité des fonctionnaires appartenant aux corps et cadres communs aux administrations, aucun mécanisme ne permettait la mobilité des fonctionnaires entre administrations. Aujourd'hui, cette mesure concerne quelque 260.000 fonctionnaires. Ils peuvent être ingénieurs, médecins, vétérinaires, techniciens, adjoints administratifs, adjoints techniques, enseignants chercheurs et cadres supérieurs... La mesure en question peut s'opérer entre administrations, entre collectivités locales et entre ces deux structures. L'idée est de permettre aux administrations de s'équilibrer en termes de ressources humaines. Certains départements sont mieux dotés que d'autres en fonctionnaires. Sur les 585.503 fonctionnaires civils dont dispose la Fonction publique marocaine au titre de l'année 2015, plus de 90% de ces effectifs sont concentrés au niveau de six départements ministériels: l'Education nationale (50,4%), l'Intérieur (19,7%), la Santé (8,3%), l'Enseignement supérieur (4,1%), la Justice (3,5%), l'Economie (3,2%) et en plus de l'administration pénitentiaire (1,8 %). L'effectif des fonctionnaires relevant du reste des départements ministériels réunis ne dépasse pas 9% de la totalité de l'effectif civil du personnel de l'Etat. Au niveau de la répartition régionale, de grandes disparités sont relevées. Les fonctionnaires civils de l'Etat sont concentrés au niveau de l'axe Casablanca-Rabat, représentant ainsi près de 30% de l'effectif global civil. La région de Rabat dispose de près de 20% des fonctionnaires, alors que celle de Casablanca compte près de 10% des ressources humaines de l'administration publique.