Après une virulente campagne de protestation sur les réseaux sociaux, les opérateurs de télécommunication sortent de leur silence au sujet du blocage de la VoIP. Inwi et Méditel déclarent comprendre la colère des usagers, mais n'avoir d'autre choix que de respecter la réglementation «imposée» par l'ANRT. Maroc Telecom campe sur ses positions. Il semble qu'Internet et les réseaux sociaux aient un poids désormais significatif quant à la défense des droits des consommateurs. Et lorsque le dossier concerne le secteur de prédilection de la webosphère marocaine (ou Weboma), l'impact de son activisme virtuel est démultiplié. La mobilisation de la Weboma concernant la question du blocage de la voix sur IP (VoIP) illustre parfaitement cet état de fait. Cela concerne, rappelons-le, cette décision émise par l'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT), largement décriée, non seulement par les internautes, mais également par le milieu des affaires et la communauté des Marocains du monde. Vague compassion Après une virulente campagne de «dislike» des pages Facebook des trois opérateurs marocains, et l'appel de certains blogueurs écoutés au non paiement des factures téléphoniques, les opérateurs télécoms décident de livrer leur version quant à cette affaire d'interdicition. Les trois opérateurs se sont en effet retranchés derrière le communiqué de l'ANRT confirmant la décision d'interdiction de la VoIP sur leurs réseaux. Communiqué du gendarme des télécoms, qui n'a été publié que le 7 janvier 2016, soit plusieurs jours après la suspension effective de la VoIP via les bandes 3G/4G des opérateurs. D'ailleurs, contrairement aux habitudes de l'ANRT, généralement très réactive sur son site web, la décision de la discorde n'avait toujours pas été mise en ligne au moment où nous mettions sous presse. «Nous avons reçu la décision de la part de l'ANRT, et nous nous y sommes pliés. Nous n'avons pas pris part à la préparation de cette décision, et nous sommes conscients qu'elle nous porte préjudice», affirme pourtant Nadia Rahim, directrice de la communication d'Inwi. Mais à la question de savoir si l'opérateur «challenger» du secteur a demandé au régulateur de reconsidérer sa décision au vu du préjudice, la réponse est: «Ce n'est pas à nous de demander l'annulation de cette décision réglementaire. De même, nous n'avons pas à être pour ou contre. Nous devons respecter la réglementation et trouver des solutions dans le cadre de cette réglementation», persiste Inwi. «Nous œuvrons actuellement pour trouver une solution répondant aux besoins des Marocains, qui respecte les décisions réglementaires», persiste le management de l'opérateur. Même son de cloche chez Méditel qui a suivi le même timing. «Il y a l'ANRT d'un côté, les clients de l'autre, et nous au milieu. Les opérateurs n'y sont pour rien, ils doivent respecter le cadre réglementaire de l'ANRT», déclarait Jérôme Ferrari, directeur Marketing de Méditel lors du L@b de l'e-novation de l'opérateur, tenu mardi dernier (www.leseco.ma). Méditel et Inwi tentent ainsi de se mettre du côté des usagers, sans pour autant remettre en cause, explicitement, la décision de l'ANRT. Pour sa part, Maroc Telecom campe sur ses positions, sa dernière sortie (présentation des résultats annuels) s'étant articulée autour de l'illégitimité des applications visées et du manque à gagner qu'elles causent au secteur. S'agissant de la volonté de «trouver des solutions dans le cadre de la réglementation». Dès lors que l'on considère ce postulat, la seule issue technique est que les opérateurs proposent leurs propres services de messagerie et de VoIP, puisque ceux-ci disposent des licences d'exploitation des réseaux de télécommunications (raison officielle du blocage). Plusieurs pays à travers le monde disposent de services nationaux, sans bloquer les applications internationales. Maroc Web Awards : en se retirant, Inwi «sauve l'événement» Après que la Weboma ait décidé de boycotter les Maroc Web Awards (MWA) en guise de contestation au blocage de la VoIP, Inwi, partenaire principal de l'événement a réagi. «Le MWA, événement fait par et pour la communauté web marocaine, se retrouve dans une situation délicate dans le contexte actuel suite à la suspension de certaines applications de Voix sur IP», reconnaît Inwi dans un communiqué diffusé mercredi dans la soirée. «En tant qu'opérateur global des télécommunications, Inwi a toujours œuvré en faveur de la démocratisation de l'accès aux technologies de l'information et de la communication. Nous sommes extrêmement sensibles à la colère exprimée par les internautes et autres usagers de services télécoms, notamment sur les réseaux sociaux. Au vu de la situation actuelle, et afin de ne pas porter préjudice au MWA ainsi qu'à la communauté web, nous annonçons notre retrait de cette édition afin que l'événement puisse avoir lieu et récompenser ainsi les talents du web marocain pour l'année 2016. Nous souhaitons bonne chance à l'ensemble des nominés», poursuit l'opérateur qui sera ainsi absent de l'édition 2016 du MWA.