L'absence de pluie dont pâtit le Maroc n'est pas sans impact sur certaines entreprises cotées à la Bourse des valeurs de Casablanca, intrinsèquement liées au secteur agricole. On relève notamment des entreprises comme Cosumar, Centrale Danone ou encore Lesieur Cristal. La campagne agricole est marquée, cette année, par un inquiétant retard des pluies. Face à l'amertume inhérente à la situation, le gouvernement a, rappelons-le, alloué une enveloppe de plus de 5 MMDH au Plan de lutte contre les effets du déficit pluviométrique, décliné en 3 axes d'intervention. «La mise en œuvre du plan nécessitera la mobilisation d'une enveloppe de 4,5 MMDH, en plus d'un potentiel d'indemnisation de 1,25 MMDH» dans le cadre du produit multirisque climatique pour les cultures céréalières et printanières, a indiqué le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion tenue à Rabat sous la présidence du chef de gouvernement (voir Les Inspirations ECO du 29/01/16). Toutefois, l'impact de ces mauvaises tendances pluviométriques se fera sentir début 2017, puisque le Maroc continue de bénéficier de la campagne agricole 2014-2015, et arrive ainsi à minimiser les retombées négatives du manque de pluie de cette année. Dans ce sillage, certaines entreprises cotées à la Bourse des Valeurs de Casablanca risquent de pâtir de cette situation, notamment les entreprises du secteur agroalimentaire. Analyse.... Cosumar Le spécialiste sucrier a réalisé un chiffre d'affaires consolidé qui s'est affermi de 8,9% au premier semestre de l'année passée à 3,317 MMDH. Capitalisant sur la bonne campagne sucrière 2015 et l'optimisation des charges d'exploitation, notamment la baisse conjoncturelle du prix du fuel, le résultat d'exploitation consolidé s'est pour sa part hissé de 38,9% à 635,1 MDH. Suivant la même tendance, le résultat net part du groupe s'est fixé à 404 MDH, en accroissement de 38,9% par rapport au premier semestre de l'année 2014. Tirant profit des investissements réalisés au titre des dernières années, l'unique opérateur sucrier au Maroc poursuit son développement et affiche des performances financières honorables. À cela s'ajoute la croissance de l'activité export qui a commencé à connaître une progression remarquable dans les revenus du groupe. Notons également la bonne campagne sucrière dont a bénéficié Cosumar. En effet, la société a tiré profit d'une campagne sucrière 2014/2015 favorable (+32% par rapport à 2013/2014 à 478.000 tonnes) qui s'est traduite par une évolution du taux de couverture des besoins du marché local par la production nationale pour s'établir à 40%, contre 29% en 2013. Cette situation durera-t-elle avec la sécheresse que connaît le royaume ? D'après les analystes que nous avons contactés, la situation pourrait devenir difficile pour la filiale de Wilmar. En effet, d'après ces derniers, Cosumar a deux moyens de se ressourcer, et ce à travers la transformation de betterave en canne à sucre ou en sucre brut et le raffinage, ou à travers l'importation. Pour ce qui est de la production locale de betteraves, celle-ci couvre 35% des besoins nationaux, et le reste est importé. Mais le prix des importations est référentiel, dans le sens où une partie est subventionnée par l'Etat. De même, les prix des matières premières sont actuellement bas, il n'y a donc pas d'impact sur l'activité du groupe pour le moment. Cependant, il faut noter que l'impact pourrait se faire sentir d'ici la fin d'année, dans le cas où les cours des matières premières repartent à la hausse, et suite au manque de pluie que connaît la saison agricole qui aura sans doute un impact sur le taux d'autosatisfaction qui est de 35%, surtout que Cosumar avait investi de manière substantielle sur des graines mono-germes à haute productivité. En effet, avec la baisse de la production locale, le spécialiste sucrier aura moins de betteraves exploitables à son actif, et les importations risquent donc d'augmenter. Ne négligeons pas non plus l'engagement de l'Etat envers la décompensation du sucre, car si cette mesure aboutit, celle-ci risque d'avoir un impact social important. Déjà, d'un côté, Cosumar subventionne les cultivateurs de betterave, ce qui constitue une stratégie d'encouragement vu que l'activité est contraignante pour les agriculteurs. De l'autre côté, il se pourrait qu'il y ait un impact sur le consommateur final: si la décompensation du sucre aboutit, l'impact sur le prix se fera sans aucun doute ressentir. Toutefois, les analystes que nous avons contactés restent confiants quant à la valeur, et recommandent de la conserver sur un horizon long terme. Rappelons que Cosumar affiche sur la BVC une performance de 12,61% depuis le début de l'année, à l'heure où nous mettions sous presse. Centrale Danone De son côté, Centrale Danone maintient son agenda et poursuit ses investissements pour renforcer son portefeuille de marques et ses structures opérationnelles, de même qu'elle continue les investissements dans l'organisation des circuits d'approvisionnement en lait, ainsi que ceux visant l'amélioration continue de l'outil industriel et logistique. Toutefois, il faut noter que l'ensemble de ces coûts, accouplés à la sécheresse constatée pour la campagne agricole de cette année, pourraient avoir un impact sur l'activité de l'entreprise, nous indiquent les analystes. En effet, la collecte de lait peut devenir de plus en plus difficile avec le manque de pluie et la hausse des coûts supportés par les éleveurs avec la progression des prix des produits alimentaires des vaches à lait. On peut aussi s'attendre à une baisse de production suite à la hausse des coûts. Malgré le fait que Centrale Danone ait une production laitière qui lui appartient (cheptel), celle-ci est servie par des agriculteurs indépendants, qui sont d'ailleurs soumis à la hausse des coûts. Dans la norme, une hausse des coûts induit une hausse des prix; cependant, celle-ci peut s'avérer très difficile, vu que les consommateurs ont un prix psychologique qu'il est compliqué de changer. Tous ces paramètres risquent de se répercuter sur les marges de l'entreprise. Au niveau de la BVC, la valeur est cotée en multi-fixing et est peu liquide. Les analystes restent toutefois optimistes quant à l'avenir du titre, Centrale Danone étant en période de restructuration de son activité. Pour rappel, Centrale Danone a affiché, lors du premier semestre 2015, un chiffre d'affaires consolidé s'établissant à 3,2 MMDH, en baisse de 2,7% par rapport au premier semestre 2014. L'excédent brut d'exploitation courant consolidé du premier semestre 2015 a été de l'ordre de 314 MDH, en baisse de 12,6% par rapport à la même période de l'année passée. Le Conseil d'administration a approuvé la prise en compte de certains éléments exceptionnels, dont des taxes et autres impôts, impactant négativement l'excédent brut d'exploitation courant consolidé pour plus de 10 MDH. Ces mêmes charges exceptionnelles expliquent la forte baisse du résultat net part du groupe qui s'établit à 9 MDH, en baisse de 86,2%. Lesieur cristal Lesieur Cristal n'échappe pas aux difficultés que connaissent les autres sociétés du fait de la sécheresse. L'entreprise pourrait ressentir un impact, aussi léger que soit-il. D'après certains analystes de la place, l'huile brute de soja qu'utilise Lesieur Cristal est en grande partie importée, et la trituration du tournesol et de colza, qui est un processus qui permet la transformation en huile, représente un faible pourcentage de la production. Mais cette pratique permet de fabriquer des sous-produits avec les déchets du soja, principalement utilisés pour le savon. Lesieur Cristal bénéficie juqu'ici des faibles cours des matières premières à l'international. Ainsi, l'impact direct que pourrait ressentir Lesieur Cristal viendra de l'huile d'olive, car une bonne partie est produite localement, et vu la météorologie, cette activité pourrait connaître des complications. Pour rappel, Lesieur Cristal a connu une progression de plus de 22% des revenus de l'huile d'olive, soutenus par une bonne campagne oléicole 2014-2015, dont elle continue à tirer des bénéfices d'après les analystes. Notons qu'au titre du premier semestre 2015, Lesieur a affiché des performances honorables. Pour rappel, le chiffre d'affaires consolidé s'est hissé de 5,5% à 2 MMDH, profitant de la bonne tenue de l'activité à l'export de l'huile d'olive, ayant compensé la baisse des prix de vente de l'huile de table. S'agissant de l'excédent brut d'exploitation, il s'est bonifié de 11,5% à 174 MDH, permettant de dégager une marge brute de 8,7%, contre 8,2% une année auparavant. Sur la même tendance, le résultat d'exploitation a augmenté de 13,8% à 148 MDH, générant une marge opérationnelle de 7,4%, en hausse de 0,6 point par rapport à une année auparavant. Enfin, le RNPG s'est établi à 102 MDH, contre 100 MDH au 30/06/2014. Dans ces conditions, la marge nette ressort à 5,1%, contre 5,3% une année auparavant. Sur un autre volet, la filiale du Groupe Avril a poursuivi ses chantiers au titre de la première moitié de l'année 2015 par le renforcement de la marque Lesieur au moyen de sa nouvelle formule Lesieur 3G, et des produits Taous gel douche et El Kef liquide. Par ailleurs, d'après les analystes, la valeur Lesieur Cristal demeure parmi les meilleures valeurs du marché grâce notamment à ses bons fondamentaux, et recommandent ainsi de la conserver dans les portefeuilles.