Dans son traditionnel discours de fin d'année prononcé le 31 décembre dernier, le chef de l'Etat, Paul Biya, s'est montré sans complaisance envers son gouvernement. «Nos efforts, aussi louables soient-ils, ne suffiront pas, à leur rythme actuel, pour que le Cameroun devienne un pays émergent en 2035». Ainsi s'exprimait le chef de l'Etat camerounais, Paul Biya (photo), dans son traditionnel discours de fin d'année, prononcé le 31 décembre, pour brosser le bilan de l'année écoulée et communiquer les perspectives de la nouvelle année. «Cet avertissement amical nous a été adressé par les institutions financières internationales. Il est de notre intérêt d'en tenir compte», a-t-il ajouté. Il fait ainsi siennes les observations du Fonds monétaire international (FMI) qui, dans une communication en novembre 2013 à Yaoundé, avait émis les mêmes réserves. Pour le président camerounais au pouvoir depuis 1982, âgé cette année de 81 ans, les raisons de ce pessimisme sont nombreuses, à commencer par un taux de croissance insuffisant: «En 2013, dit-il, notre taux de croissance est de 4,8%, donc en deçà de nos prévisions qui étaient de 6,1%». Mais il y a surtout l'incohérence et l'insuffisance de l'action gouvernementale, qu'il a dénoncées comme il ne l'avait jamais fait par le passé. «D'où vient-il que l'action de l'Etat, dans certains secteurs de notre économie, paraisse parfois manquer de cohérence et de lisibilité? Pourquoi, dans bien des cas, les délais de prise de décision constituent-ils encore des goulots d'étranglement dans la mise en œuvre des projets? Comment expliquer qu'aucune région de notre territoire ne puisse afficher un taux d'exécution du budget d'investissement public supérieur à 50%? (...) Serions-nous incapables de faire ce que d'autres pays comparables au nôtre ont fait ou sont en train de faire?»Se précipitant de répondre à cette dernière interrogation, il indique: «Nous avons des hommes, des femmes et des jeunes talentueux, ingénieux, bien formés et entreprenants, capables de relever ces défis. Nous avons des ressources abondantes et variées, nous avons des institutions modernes et démocratiques. Notre pays connaît la paix et la stabilité». Dès lors, ce qu'il manque selon lui est le sens de la primauté de l'intérêt général. «Nous sommes un peuple d'individualistes, plus préoccupés de réussite personnelle que d'intérêt général. Notre administration reste perméable à l'intérêt particulier. Ce dernier est le plus souvent incompatible avec l'intérêt de la communauté nationale. Dans un Etat moderne, cette dérive ne doit être tolérée». Pour éclairer ce sombre tableau, Paul Biya croit savoir que «le besoin pour les prochaines années, c'est d'un véritable plan d'urgence. Avec le DSCE (Document de stratégie pour la croissance et l'emploi, NDLR), nous avons le tableau de bord». Enumérant les priorités à court terme, il cite le redressement de la courbe de croissance par la création des emplois et le maintien d'un niveau élevé de performance sur plusieurs années d'affilée.Inutile de souligner que ce discours aux contours inédits a provoqué une avalanche de réactions à travers le pays. Pour les uns, il s'agit d'un aveu d'échec de celui qui est arrivé au pouvoir le 6 novembre 1982. Pour les autres, il s'agit d'un discours de réarmement moral. Selon Jean Tsomelou, militant du Social Democratic Front (SDF), le principal parti de l'opposition, la suite logique de ce discours devrait être la formation d'un nouveau gouvernement avec au maximum 25 membres, au lieu de la soixantaine de ministres et assimilés que compte le pays aujourd'hui. Quant à Lucien Wantou Siantou, député du parti au pouvoir, «c'est un appel à redoubler d'efforts pour la construction d'un Cameroun émergent». Du côté de la Camerounaise des PME (C-PME), la dernière-née des organisations patronales, on pense que cette prise de conscience doit conduire à la création d'un ministère de l'Emergence qui piloterait l'ensemble des grands projets. Thierry Ekouti, Dir.pub-Le Quotidien de l'Economie (Cameroun) Crédibilité Le Cameroun continue de bénéficier de la confiance des investisseurs. C'est ainsi que la Société commerciale de banque au Cameroun (SCB Cameroun, filiale du groupe Attijariwafa Bank) vient de boucler avec succès l'emprunt obligataire de l'Etat du Cameroun dont elle était l'arrangeur. Si au départ, le montant recherché était de 50 milliards de FCFA (100 millions de dollars), la moisson a finalement été de 80 milliards de FCFA (160 millions de dollars), soit un dépassement de 30 milliards de FCFA représentant un excédent de 60% en quelques jours. Ce succès est dû à deux facteurs principaux. D'abord, le Cameroun est un pays qui est resté stable depuis de longues années, alors que ses voisins ont connu de violents soubresauts, comme la République centrafricaine. Dans une récente interview accordée au Quotidien de l'économie paraissant à Douala, le haut-commissaire du Canada au Cameroun, Benoît-Pierre Laramée, indiquait que la paix et la stabilité politique comptent parmi les tout premiers critères qui attirent et rassurent les investisseurs dans un pays. Le deuxième facteur est la capacité de l'arrangeur à sensibiliser et à mobiliser la communauté des investisseurs. Disposant d'une salle des marchés depuis deux ans , la SCB Cameroun fait aujourd'hui partie des rares établissements de la place à même de conduire une telle opération avec succès. Tant et si bien que dans la note d'informations de cet emprunt obligataire, cette surallocation était d'ores et déjà prévue...