Les chiffres sont rares mais les estimations montrent clairement une croissance du secteur. Les entreprises, quelle que soit leur taille, s'y mettent de plus en plus. Le marché souffre néanmoins de quelques obstacles. Dans le marché pourtant très pointu des logiciels pour entreprises, ou progiciels, les chiffres sont rares pour évaluer avec précision son poids et ses évolutions. Grâce aux estimations du cabinet IDC, il est néanmoins possible d'en avoir un aperçu pertinent. Ainsi, d'après les études du cabinet, le chiffre d'affaires au Maroc du marché du software, en 2013, était de 105 millions de dollars, soit un peu plus d'un milliard de DH. En 2014, il est passé à 117 millions de dollars et, en 2015, il s'affichait à 128 millions de dollars. Les perspectives ne sont pas pour déplaire aux professionnels puisque le chiffre d'affaires devrait continuer de progresser dans les prochaines années pour atteindre notamment 149 millions de dollars en 2017. Parmi les trois catégories répertoriées par IDC, ce sont les logiciels applicatifs qui prédominent avec, par exemple, un volume d'affaires de 65 millions de dollars en 2015, soit 51% du total. Juste derrière, les «system infrastructure software» ont réalisé un chiffre d'affaires estimé à 43 millions de dollars l'année dernière, soit 33,6% du total réalisé par le software. En dernier lieu, on retrouve la catégorie «application development and deployment» qui a pesé, en 2015, 20 millions de dollars. Le coût n'effraie plus les entreprises «Au Maroc, l'économie numérique, et tout particulièrement les progiciels, fait preuve d'un dynamisme et d'une maturité toute particulière. Le marché marocain des progiciels et solutions métiers continue de croître avec des taux bien supérieurs à ceux d'autres secteurs. Les besoins de modernisation des entreprises et du secteur public marocains tirent bien évidemment cette croissance mais sans l'impulsion du gouvernement, et notamment du ministère de tutelle, cette maturité et cette croissance ne seraient pas possibles», résume ainsi Driss Iziki, directeur Middle East & Africa pour l'éditeur français Cegid. Il semble loin le temps où les entreprises, quelle que soit leur taille, rechignaient à se doter d'un progiciel par manque d'intérêt ou par conviction que les outils traditionnels suffisaient. Aujourd'hui, même les TPE et PME s'y mettent. «Les PME/PMI sont de plus en plus sensibles à l'urgence de s'équiper et d'accélérer le rythme de leur transformation digitale», explique Charaf Hamzaoui, directeur commercial et business développement chez Sage Maroc. Tous les secteurs sont également concernés. «Vu l'historique et l'accompagnement de nos clients, l'industrie et le retail sont à ce jour les secteurs les plus représentés chez Cegid. Néanmoins, nous accélérons notre pénétration sur les autres offres comme la finance, la fiscalité, la paie-RH, la gestion commerciale mais aussi le secteur public», poursuit Driss Iziki. «Outre l'équipement en ERP, il y a un engouement pour les solutions de gestion des déclarations légales, notamment après la généralisation de l'obligation des télé-déclarations. Mais globalement, l'équipement des entreprises porte sur les périmètres de base, à savoir la comptabilité, la gestion commerciale et les achats & stocks», ajoute le responsable de Sage Maroc. La question du coût n'effraie même plus les entrepreneurs. «Au-delà du coût, c'est davantage la mise à disposition de ressources humaines et le temps que cela nécessite qui, parfois, rebutent les entreprises», indique Bachir Rachdi, PDG de l'éditeur marocain Involys. «Cette question est de moins en moins évoquée. C'est pour cela que nous pouvons parler de maturité du secteur», confirme Driss Iziki. Dans un marché en pleine croissance, la concurrence peut parfois être rude mais elle reste saine et positive d'après les professionnels. «C'est un bon indicateur. La concurrence est réelle mais bénéfique pour notre groupe car cela amène les entreprises et le secteur public à comparer», conclut le responsable de Cegid. L'émergence d'acteurs locaux reste difficile «Il est indéniable qu'il y a une plus grande sensibilité des entreprises à l'équipement en progiciels. Néanmoins, le marché reste limité», relativise Bachir Rachdi. Pour ce dernier, le manque d'acteurs locaux, en dehors d'une poignée qui a notamment réussi à percer à l'export, demeure un obstacle majeur à l'émergence d'une industrie forte. «Le Maroc a intérêt à capter la dynamique de la transformation digitale en créant des acteurs producteurs de valeur», rappelle-t-il. Avec des systèmes d'information (SI) pour les différentes chaînes de gestion (budget, achat, dépenses, etc.), la gestion RH et la gestion du patrimoine immobilier, Involys compte parmi ses clients le secteur bancaire, des promoteurs immobiliers mais aussi plusieurs administrations publiques. «72% de notre chiffre d'affaires en 2015 a été réalisé à l'export», conclut Bachir Rachdi. Il faut dire que, sur le marché local, les projets peuvent parfois tarder à se mettre en place. Il n'est ainsi pas rare, essentiellement dans le public, de voir des administrations réclamer des développements spécifiques alors même que bon nombre de procédures sont désormais standardisées. «Nous sommes loin d'une position de saturation du marché au Maroc. Au contraire, nous avons du mal à franchir la ligne qui nous permettra de passer au plein potentiel. Nous ne valorisons pas suffisamment la production nationale», constate le PDG. Pour autant, et à l'image d'autres secteurs, le Maroc se positionne de plus en plus comme un hub africain pour les acteurs multinationaux. Il en va ainsi de Cegid qui, lors de la dernière édition de ses Digital days, le 11 mai, a annoncé la création d'une filiale. Présent depuis 2008 à travers une représentation commerciale, Cegid a annoncé, à l'occasion de la dernière édition de ses Digital Days, l'installation d'une filiale à Casablanca. Quelques jours auparavant, c'est l'allemand SAP qui annonçait faire de la ville blanche son hub pour la région africaine francophone. Ces initiatives renforcent sans conteste la position privilégiée du Royaume dans la région.