C'est le plus haut niveau de déficit du compte courant de la balance des paiements depuis les années 80. Le recours à l'emprunt international pour financer l'économie paraît inévitable. Ce qui augmenterait l'endettement du Trésor, déjà proche de 60% du PIB. Les chiffres de clôture de l'exercice 2012 ont certainement de quoi inquiéter le gouvernement : le niveau de croissance annoncé précédemment, et qui était déjà faible, a encore perdu 0,3 point pour se situer à 2,4%, selon les comptes nationaux publiés par le HCP ; et le déficit du compte courant de la balance des paiements que l'on prévoyait au pire à 9%, culmine finalement à 10% du PIB. Selon l'Office des changes, en effet, le compte courant a enregistré un déficit de 82,5 milliards de DH à fin 2012, soit 10,1% du PIB. Il s'agit de la sixième année de déficit successif. Mais 10% du PIB, c'est le plus haut niveau de déficit depuis les années 80. Sans doute, le gouvernement sera-t-il amené, de nouveau, à emprunter à l'international afin de pouvoir assurer correctement l'approvisionnement du pays, et honorer dans les délais les échéances de la dette extérieure. Rappelons à ce propos que pour le moment, et grâce au dernier emprunt de 1,5 milliard de dollars (environ 12,5 milliards de DH), les avoirs extérieurs nets permettent de couvrir 3 mois et 27 jours d'importations de biens et services (statistiques arrêtées à fin février). A cela, on ne le dit pas souvent, il faut ajouter le paiement des charges de la dette extérieure publique : celles-ci s'élèvent à 21 milliards de DH pour 2013, dont 14,4 milliards en principal et 6,6 milliards en intérêts, selon la direction du Trésor et des finances extérieures. Mais emprunter, c'est évidemment grossir davantage la dette extérieure. Les tout derniers chiffres que le Trésor vient de publier situent la dette extérieure de l'administration à 116,87 milliards de DH, en hausse de 17,4% par rapport à 2011. Son poids dans le PIB est ainsi passé de 12,4% à 14%. En y ajoutant la dette intérieure, qui a augmenté de 13%, l'endettement du Trésor ressort à 59,3% du PIB, au lieu de 53,7% un an auparavant. 5,6 points de plus en une année ! Et en raisonnant en termes globaux, c'est-à-dire en terme de dette publique (donc y compris celle des entreprises et établissements publics), celle-ci s'établit désormais à plus de 70% du PIB. On est encore loin des niveaux d'endettement de nombreux pays occidentaux (plus de 100% du PIB pour certains), mais la comparaison s'arrête là. Environ 15 milliards de transfert de dividendes Dans tous les cas, la dérive des finances extérieures, c'est-à-dire le fait que les devises, pour parler simple, manquent de plus en plus, outre son impact sur l'endettement du pays, continue d'exercer une pression sur le niveau des liquidités bancaires et, partant, sur l'évolution des crédits. Selon le rapport de la Banque centrale, issu de la dernière réunion de son conseil (tenu le 26 mars 2013), le ralentissement du rythme de progression de crédits, déjà à l'œuvre en 2012, se poursuit : 3,2% en janvier 2013, au lieu de 5,2% au quatrième trimestre 2012 et 6,9% en moyenne durant l'exercice précédent. Et cette baisse de régime, précise Bank Al-Maghrib, concerne toutes les composantes du crédit (trésorerie, équipement, immobilier…). Les raisons d'une telle situation sont bien connues et s'appellent «déficit structurel» de la balance commerciale. Encore en 2012, le solde des opérations d'import/export s'est aggravé de 8,6% : -198,42 milliards de DH, au lieu de -182,8 milliards en 2011. Les exportations ont certes augmenté de 4,7%, à 183,23 milliards de DH, mais dans le même temps, les importations ont crû de 6,7% à 381,65. Il se trouve que les autres balances, qui atténuaient par le passé le déficit commercial et parfois le comblaient même, ont toutes enregistré des baisses. Celle des voyages avec -2,3%, à 47 milliards de DH ; celle des investissements et prêts privés avec -2,5%, à -555,4 millions de DH. Ici, il y a lieu de préciser que si les recettes des investissements et prêts privés ont augmenté en 2012 de 3,1%, à 31,4 milliards, les dépenses, elles, ont enregistré une croissance plus importante : +17,8%, à 9,94 milliards de DH. D'où le solde négatif de 555,4 millions de DH. Ces dépenses ont consisté principalement en cessions d'investissements étrangers (pour 7,46 milliards de DH) et en remboursements de prêts privés (pour 2,5 milliards). Accessoirement, il faudra ajouter la hausse des transferts de dividendes (environ 15 milliards de DH, au lieu de 12,6 milliards en 2011), mais à l'avenir, cette balance, structurellement déficitaire elle aussi, connaîtra des soldes négatifs de plus en plus élevés, en liaison avec l'importance du stock des investissements étrangers.