Le Masi a pris 6% avant de replonger, boosté par la consolidation des participations de Sni dans ses filiales. La hausse est jugée excessive par les analystes, mais ces derniers restent confiants quant aux perspectives du marché en 2011. Les analystes et les investisseurs professionnels s'attendaient à ce que la Bourse de Casablanca démarre l'année sur une tendance haussière, mais ils ne prévoyaient pas que la progression allait atteindre une telle ampleur en un temps si court. De fait, la performance qu'affichait le Masi à l'issue des deux premières semaines de 2011 a étonné plus d'un. L'indice de toutes les valeurs cotées a progressé de 5% jusqu'au 14 janvier, pour des volumes de transaction atteignant 2 milliards de DH sur le marché central, soit près du double des échanges effectués durant la même période en 2010. Le baromètre a même atteint les 6% de performance le 12 janvier, avant de replonger sur fond de prises de bénéfices (performance ramenée à 3% le 18 janvier). Cet emballement est-il justifié ? La tendance globale de l'année sera-t-elle positive ? Ce sont là les questions que se posent actuellement les investisseurs. Pour les analystes, la hausse du marché durant les deux premières semaines de l'année est un peu excessive. Elle est due à plusieurs facteurs, dont le principal est la consolidation des participations de Sni, après sa fusion avec Ona, dans ses filiales jugées «matures», parmi celles cotées, avant d'entamer l'augmentation de leur flottant en Bourse et les éventuelles cessions de blocs à des partenaires stratégiques. En effet, une bonne partie de la hausse enregistrée par le marché en ce début d'année résulte de l'envolée du cours des principales filiales de Sni, dont le poids dans la capitalisation est important. Managem a pris 18,7% en neuf séances de cotation, sa filiale SMI 17,9%, Cosumar 12,8%, Attijariwafa bank 11,8% et Lesieur 1,5%. Ces hausses de cours ont été provoquées par les acquisitions massives effectuées par Sni sur ces valeurs ainsi que par les apports de titres effectués par Ona au nouvel ensemble consécutivement à l'opération de fusion. Sni est ainsi monté à l'issue de ce ramassage boursier à 75,84% dans le capital de Lesieur, à 63,51% dans le capital de Cosumar, à 63,4% dans le capital de Centrale Laitière, à 80,06% dans le capital de Managem, et à 48,34% dans le capital d'Attijariwafa bank. Les spéculateurs ont contribué à la hausse du cours des filiales de Sni Le deuxième facteur qui a amplifié la hausse occasionnée par la consolidation des participations de Sni est le suivisme des investisseurs. Ces derniers ont en effet profité du mouvement d'acquisition initié par le holding pour se positionner sur les mêmes titres (Attijariwafa bank, Managem, Cosumar…). «Nombreux parmi eux sont ceux qui ont acheté dans une logique de spéculation, dans le but de revendre après quelques séances et réaliser une plus-value conséquente. C'est d'ailleurs ce qui a conduit à la correction du marché après la première phase haussière. Mais il y a également ceux qui ont acheté dans un horizon à moyen terme, par anticipation aux opérations sur le capital qu'initiera Sni sur ses principales filiales au cours de cette année», affirme un trader. Notons que des offres publiques de vente ainsi que des cessions stratégiques à des partenaires nationaux et étrangers sont prévues en 2011 par Sni, ce qui a aiguisé l'appétit des investisseurs dès ce début d'année. Le holding devrait céder, d'après plusieurs analystes, des parts supérieures à 20% du capital de ses filiales matures, tout en gardant une participation importante lui garantissant au moins la minorité de blocage. Le troisième facteur qui a également contribué à la hausse du marché porte sur les arbitrages que font les institutionnels au début de chaque année, dans le cadre de la mise en œuvre de leurs stratégies annuelles de placement. En effet, ce ne sont pas uniquement les filiales de Sni qui ont vu leur cours augmenter, mais également d'autres valeurs dont les perspectives d'évolution sont jugées prometteuses. On peut citer à titre d'exemple CMT, dont le cours a pris 12,6% en deux semaines, les valeurs bancaires telles que la BCP (+9,05%) et la BMCI (+9,7%) ainsi que d'autres grosses capitalisations comme Maroc Telecom (+5,9%), Holcim (+5,4%) et Addoha (+4,8%). Regain de confiance des investisseurs locaux et retour des étrangers Ainsi, le marché s'est en partie emballé artificiellement, suite à l'engouement suscité par les apports de titres à Sni, mais il a également progressé en raison de la confiance des grands investisseurs dans les perspectives économiques et celles du marché boursier pour cette année. «L'aptitude de résilience confirmée de l'économie marocaine en 2010, combinée aux espoirs de reprise de l'économie mondiale en 2011, devrait renforcer le nouveau cycle haussier qu'on observe à la Bourse de Casablanca depuis fin 2009», estiment les analystes de BMCE Capital. «De nouveaux catalyseurs devraient également soutenir la dynamique escomptée en 2011 pour confirmer le retour de confiance des investisseurs, aussi bien locaux qu'étrangers», ajoutent-ils. En effet, l'instauration après une longue période d'hésitation du Plan d'épargne en actions (PEA) devrait insuffler, aux yeux des professionnels, un nouvel élan au marché boursier en réorientant vers lui une partie importante de l'épargne, de même que le retour en force des offres publiques de vente, aussi bien sous forme d'introductions en Bourse (on parle de Stroc Industrie, Afric Industrie, S2M et éventuellement JLEC, Méditel et SGTM) que d'augmentation de la taille des flottants en Bourse -principalement les opérations que devrait mener Sni – sont à même de doper le marché. «L'augmentation du flottant des grosses capitalisations filiales de Sni devrait susciter l'intérêt des investisseurs locaux et étrangers et dynamiser considérablement la volumétrie du marché», estime-t-on auprès de BMCE Capital. L'augmentation de la capacité d'investissement en actions des compagnies d'assurance, mesure en cours d'adoption dans le cadre du contrat programme sectoriel, devrait également contribuer à dynamiser le marché boursier. De même, la détente attendue en 2011 des tensions sur les liquidités, suite aux différentes opérations d'injections réalisées en 2010 (notamment l'augmentation de capital de BMCE Bank réservée à la BFCM, la cession de 40% du capital de Meditelecom à France Telecom et l'emprunt d'un milliard d'euros du Trésor), devrait stabiliser les taux obligataires à leur niveau actuel, renforçant l'orientation des investisseurs institutionnels vers le marché actions. Perspectives d'évolution prometteuses à la fois sur le plan fondamental et technique Compte tenu de tous ces éléments, les analystes prévoient que la hausse entamée en ce début d'année devrait se poursuivre. Cette hypothèse est en plus confortée par une bonne tenue des fondamentaux des sociétés cotées. En effet, les professionnels tablent sur une croissance de 10% de la capacité bénéficiaire de la cote pour l'exercice 2010, et de 9,2% au titre de 2011, pour des rendements de dividende de 3,3% et 3,5% respectivement. Même sur le plan technique (analyse graphique de l'évolution du marché), la tendance haussière de fond est confirmée. La première vague d'impulsion du Masi a démarré en décembre 2009. Elle a été suivie par une vague de correction entre mai et août 2010, laquelle a cédé la place à une troisième vague d'impulsion qui n'a pas encore été achevée. Actuellement, et malgré la toute récente correction du marché, ce dernier demeure bien orienté et devrait prochainement franchir la barre des 13 500 points (le Masi est actuellement à 13 240 points). Cela dit, même si les perspectives d'évolution du marché boursier tout au long de l'année 2011 sont prometteuses, aussi bien sur le plan fondamental que technique, un creux est à craindre après la publication des résultats 2010 des sociétés cotées. Les mauvaises surprises dans certains secteurs peuvent plonger le marché dans une phase de correction à l'instar de ce qui s'est passé en 2006 et 2007. Selon les analystes, seule l'annonce d'opérations d'introduction en Bourse pourrait éviter au marché de baisser après la publication des résultats.