Un Juge ne statue pas en fonction de critères englobant la haine, la fureur ou la vengeance. Un Juge prend des décisions dans un canevas très étroit qui s'appelle «La Loi». Laquelle prévoit des dispositions en fonction des crimes ou délits commis. Insinuer qu'un «fonctionnaire est sans dignité» ne rentre pas dans le schéma classique de contestation d'un verdict. Le tollé soulevé par l'arrestation d'un journaliste semble disproportionné par rapport à la réalité des faits, qu'il convient de replacer dans leur contexte. Les juges sont faits pour juger, au sein de tribunaux justement prévus pour ce faire. On peut ne pas apprécier un verdict, contester une peine, commenter une décision de justice, comme cela se fait partout dans le monde, et nul ne s'en prive. Les journaux et organes de presse délèguent souvent la couverture des affaires judiciaires à des journalistes, qui sont aussi des juristes ; qui ont fait des études de droit et connaissent bien les arcanes des Palais de justice. Et de fait, on lit souvent dans la presse que, dans tel ou tel dossier, les magistrats ont eu la «main lourde». Ce qui signifie qu'ils n'y ont pas été de main morte, concernant les sentences rendues. Ce qui demeure parfaitement légal et recevable, et fait partie du fonctionnement normal d'un système démocratique. On a souvent vu ça en Europe, lors des procès concernant les activistes du FNLC en France, ou d'Erri Batasuna en Espagne. Les activistes donc, s'activent, la police les traque puis les arrête, la justice les juge, chacun son domaine. Et si l'on n'est pas satisfait d'un verdict rendu, le système judiciaire a prévu plusieurs voies de recours, l'appel, la cassation, éventuellement ensuite une demande de grâce royale : le système est bien huilé et fonctionne bien, depuis des lustres. Le journaliste poursuivi a dit, lui : «Ni oubli, ni pardon, avec ces fonctionnaires sans dignité». Qu'est-ce que cela signifie, sinon jeter l'opprobre sur des fonctionnaires qui font leur métier? Un juge ne statue pas en fonction de critères englobant la haine, la fureur ou la vengeance. Un juge prend des décisions dans un canevas très étroit qui s'appelle «La loi». Laquelle prévoit des dispositions en fonction des crimes ou délits commis. Insinuer qu'un «fonctionnaire est sans dignité» ne rentre pas dans le schéma classique de contestation d'un verdict. C'est bel et bien une attaque directe contre la magistrature, et cela fait désordre. On ne conteste pas là une décision judiciaire, on traite ceux qui l'ont rendue «d'indignes», ce qui s'apparente effectivement à «un outrage à magistrat». Ce qui est légalement punissable partout de par le monde. Car, contester une décision de justice est normal, insulter ou dénigrer ceux qui l'ont rendue l'est beaucoup moins, car, dans ce cas, on peut facilement imaginer que, tous ceux qui ne sont pas satisfaits d'un verdict, vont désormais «passer leurs nerfs» sur les juges qui l'ont rendu, ce qui n'est ni ... «juste», ni démocratique. Le journaliste dispose de moyens étendus pour faire entendre sa voix, sur tous les supports. Il peut estimer le verdict sévère, en contester les attendus, faire une autre lecture juridique du dossier, critiquer la sévérité du Parquet, considérer que la justice a été mal rendue, ou les textes de loi mal appliqués. Il est dans son rôle de contre-pouvoir, prévu par la Constitution. Mais déclarer, ni oubli, ni pardon, signifie qu'il y aura une suite. Ne pas oublier, pourquoi faire ? Pour se venger ? Ne pas pardonner, pourquoi faire ? Nul ne le lui demande. L'oubli ou pas, c'est son affaire personnelle. Le pardon n'est pas de son ressort, il n'est pas au dessus des juges pour leur pardonner ou non. Par ailleurs, il fait savoir que les magistrats sont des hauts fonctionnaires, qui ont la dure tâche de maintenir l'ordre social au sein d'une société. Ils sévissent contre les «hors la Loi», pour la défense de la société. Ils rendent leurs verdicts en séances publiques, et non le soir dans une forêt, loin des regards. Le journaliste, lui, est libre de critiquer ce qu'il veut. Jusqu'à une certaine limite. Laquelle est franchie, lorsqu'on ne conteste plus uniquement le verdict, mais qu'on s'en prend aux magistrats qui l'ont rendu. Car dans toute affaire de justice, il y a ceux qui sont satisfaits des décisions prises... et en face ceux qui le sont moins. Par exemple, dans toute affaire criminelle, certains, proches des victimes, applaudiront une condamnation sévère, quand d'autres, familles des prévenus, estimeront les sentences trop lourdes. De là à qualifier les juges de «personnes sans dignité», est une limite, dont toutes les législations sanctionnent le dépassement. Espérons que les esprits s'apaiseront, et qu'on laisse le système judiciaire remplir son rôle, sans verser dans des polémiques stériles, inutiles, et infondées.