Après sa détention pendant 5 jours à la prison casablancaise « Oukacha », le journaliste Omar Radi a enfin été relaxé, mardi 31 décembre, mais provisoirement. Poursuivi en état de liberté provisoire pour « outrage à magistrat », l'audience du journaliste sera tenue ce jeudi 2 janvier. Un sit-in de solidarité est prévu le même jour devant le tribunal de première instance de Casablanca. Les détails. C'est une affaire qui a fait couler beaucoup d'encre et remis sur la table la question de la liberté d'expression au Maroc. Omar Radi, un journaliste indépendant connu pour sa plume « dérangeante », a été entendu par la Brigade Nationale de la police judiciaire (BNPJ) en avril 2019 suite à un tweet qu'il avait partagé sur son compte privé et dans lequel il avait critiqué la décision de justice pour ce qui est des peines prononcées à l'encontre des détenus du Hirak du Rif. « Lahcen Talfi, juge de la cour d'appel, bourreau de nos frères, souvenons-nous bien de lui. Dans beaucoup de régimes, les petits bras comme lui sont revenus supplier après en prétendant avoir exécuté des ordres. Ni oubli ni pardon avec ces fonctionnaires sans dignité », avait écrit le journaliste sur son compte Twitter. Lahcen Talfi est le juge en charge de l'appel dans le dossier des détenus du Hirak du Rif. Lors de sa première audition devant la BNPJ, Omar Radi a fait l'objet d'un interrogatoire corsé sans pour autant être arrêté. Ce n'est que neuf mois après, soit le 25 décembre, que le journaliste a reçu une autre convocation de la BNPJ pour une seconde audition le 26 décembre. J'ai reçu une convocation, orale puis écrite, de la part de la Brigade nationale de la police judiciaire(BNPJ). Je m'y présenterai demain. J'ignore les raisons de cette nouvelle convocation. Il y a 9 mois, j'avais été convoqué au même service de police pour une histoire de tweet. pic.twitter.com/Fe6l31VNiC — Omar Radi (@OmarRADI) December 25, 2019 Après s'être rendu sur place, les événements se sont vite précipités. Entendu dans la matinée du 26 décembre, Omar Radi a été déféré dans l'après-midi même devant le procureur du Roi près le tribunal d'Ain Sbaâ, puis incarcéré à la prison locale « Oukacha » pour « outrage à magistrat ». Depuis, les cris de colère ont jailli de part et d'autre en solidarité avec le journaliste. Deux jours après son arrestation, soit le 28 décembre, un sit-in rassemblant une centaine de militants des droits de l'Homme, de la liberté d'expression et des journalistes a été organisé devant le Parlement à Rabat, appelant à la libération immédiate du trentenaire, tandis que le hashtag #FreeOmarRadi a envahi les réseaux sociaux. Sit in Rabat in solidarity with @OmarRADI, an independent journalist and activist, who was arrested over a tweet he shared 9 months ago criticising the judiciary's fairness. No one should ever be arrested for freely expressing their opinions pic.twitter.com/DDhxrQeSPP — Ahmed El Jechtimi (@AhmedEljechtimi) December 28, 2019 Relaxé en état de liberté provisoire le dernier jour de l'année, Omar Radi est poursuivi pour une seule et unique charge à savoir « outrage à magistrat sur la base de l'article 263 du Code pénal. L'élément matériel de l'infraction c'est un tweet », a indiqué à Hespress Fr, l'avocat du journaliste, Me Omar Bendjelloun. Good news to start 2020! Moroccan journalist & activist @OmarRADI, has been released few hours ago. Welcome back Omar among your friends and family. I hope the remaining political detainees will be released soon. #FreeOmarRadi #FreeKoulchi pic.twitter.com/ST924tlQeP — Youssef IGrouane (@YoussefIGrouane) December 31, 2019 L'avocat du journaliste a dans ce sens souligné à notre rédaction que lors de l'audience qui se tiendra le jeudi 2 janvier au tribunal de première instance de Casablanca, la défense va « plaider les vices de forme et les nullités, dans une première étape. Il se peut que ça soit reporté ». « Mais ce qu'on va défendre, c'est l'innocence de Omar », a-t-il souligné. Pour, Aziz Ghali, militant et président de l'association marocaine des droits de l'Homme (AMDH), l'année 2019 a été un désastre en matière des droits de l'Homme, des libertés individuelles et de la liberté d'expression. « Pour nous, malheureusement, on s'attendait avec cette fin d'année que des signes positifs soient donnés en matière des droits de l'Homme puisque l'Etat considère encore que les droits de l'Homme sont un pilier qui relève de son travail. Mais encore une fois, malheureusement, l'Etat nous fait revenir à la case départ », nous-a-t-il déclaré. Dans une déclaration à Hespress Fr, Aziz Ghali a indiqué que l'AMDH compte dans un premier temps participer à l'audience du journaliste le jeudi 2 janvier « histoire de superviser le déroulement de l'audience ». La deuxième étape que compte entreprendre l'AMDH est de saisir le rapporteur spécial de l'ONU sur la liberté d'expression, poursuit Ghali. « Nous nous préparons pour saisir le rapporteur spécial onusien de la liberté d'expression. On va lui demander de venir en visite au Maroc, parce que ce qui se passe aujourd'hui dans le pays, en matière de liberté d'expression, est désastreux et le rapporteur doit faire un rapport dessus ». Un sit-in de solidarité avec le journaliste Oamr Radi est également prévu le jeudi 2 janvier devant le tribunal de première instance de Casablanca, selon un tweet du compte créé spécialement pour soutenir le journaliste « #FreeOmarRadi ».