Des augmentations indexées sur l'inflation et l'investissement immobilier. Les parents d'élèves, inquiets, ne comptent rien lâcher. Les engagements pris en octobre 2019 déjà oubliés. Après leur avoir fait miroiter des baisses certaines des frais de scolarité à la rentrée 2020, voilà que les parents d'élèves du réseau AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger) ont été surpris d'apprendre que ces frais allaient non seulement augmenter, mais la hausse sera proportionnelle au taux d'inflation au Maroc ainsi qu'au montant de l'investissement immobilier engagé par l'école. Dans un communiqué, l'Union des conseils de parents d'élèves (UCPE) explique qu'au terme d'une réunion d'information initiée par le Service de coopération et d'action culturelle (SCAC), il a été décidé que les frais de scolarité allaient être augmentés dès la rentrée 2020-2021, et que le calcul de ces augmentations allait différer d'une école à l'autre en fonction des besoins spécifiques de chacune d'elles. Une nouvelle que les parents d'élèves digèrent mal, et ce pour deux raisons. La première étant la promesse faite par Jean-Yves Le Drian, ministre français des affaires étrangères, qui avait annoncé en septembre 2019 qu'un budget de 25 millions d'euros avait été débloqué pour financer les écoles du réseau AEFE dans le monde (dont le Maroc), et ce après que le budget de ce dernier avait été réduit de 8% en 2017 pour s'établir à 354,5 millions d'euros (mesures d'austérité oblige). L'objectif visé par l'injection de ces 25 millions était de couvrir les besoins financiers des établissements sans que l'impact ne soit répercuté sur le calcul des frais de scolarité supportés par les parents. Il n'en est manifestement rien, puisque la récente décision annihilerait de facto cette baisse potentielle (si tant est qu'elle se concrétise). La deuxième raison est le mode de calcul des augmentations. Car même si les écoles du réseau AEFE ne décident pas d'augmenter leurs frais de manière arbitraire puisque les décisions sont prises par les ministères français de tutelle, le fait de baser le calcul des frais sur l'investissement foncier et immobilier, ainsi que sur les besoins des établissements eux-mêmes donne à ces derniers la latitude de déterminer librement à quoi correspondent leurs investissements actuels et futurs. «Du jamais vu. Nous ne comprenons pas pourquoi ces augmentations ont été décidées, alors qu'il était prévu le contraire. De plus, c'est chaque école qui déterminera elle-même de combien elle va augmenter. Mais ça n'existe nulle part. Ces écoles sont également les nôtres. Tous les parents qui sont présents ici contribuent depuis des années au financement de leurs frais», dénonce une mère indignée, présente au sit-in organisé par l'UCPE devant les lycées français Lyautey (à Casablanca) et Descartes (à Rabat). Un Plan passé aux oubliettes Le 3 octobre 2019 à Paris, un Plan de développement de l'enseignement français à l'étranger a été présenté en mettant en avant les objectifs suivants : accueillir un nombre plus important d'élèves ; accompagner la croissance des établissements existants et la création de nouvelles écoles ; mieux associer les familles à la vie des établissements ; mieux accompagner le réseau grâce à une mobilisation accrue des ambassades. Ce plan prévoyait également d'associer davantage les parents à tous les niveaux. Que ce soit dans la vie de l'institut ou la préparation du budget et du projet d'établissement. Or, l'augmentation des frais de scolarité différenciée d'une région à l'autre, basée sur le taux d'inflation national et le coût de l'investissement immobilier, est une décision «unilatérale» qui aurait été prise sans la moindre concertation préalable avec les parents. Contactés par La Vie éco, plusieurs écoles du réseau AEFE ont tout simplement refusé de commenter la situation ou de fournir la moindre explication, affirmant que c'est au pôle central du réseau, en l'occurrence le Lycée Lyautey, qu'incombe la tâche de s'exprimer sur le sujet. Les responsables de ce dernier étant en grève (mobilisation générale en France), notre demande est restée sans réponse. Rappelons que, du côté des parents, ces augmentations à venir remuent le couteau dans une plaie encore fraîche, avec une augmentation des frais de scolarité en 2017 allant jusqu'à 60%. Une augmentation du budget réservé à l'école de leurs enfants qui n'était ni prévue ni souhaitée, et de laquelle ils n'avaient d'autre choix que de s'acquitter. «Si nous laissons passer cette décision, qu'est-ce qui les empêcheraient [ndlr : les écoles du réseau AEFE] d'opérer des hausses chaque année de manière indéfinie. C'est simple. Il n'y a pas de raison de s'arrêter tant que nous, les parents, continuons de payer sans rien dire. La situation est déjà suffisamment intenable, et en plus nous n'avons aucune visibilité sur l'avenir», nous affirme un père inquiet, qui envisage de retirer ses enfants du système français si aucune décision n'est prise pour rétablir lesdits frais à des niveaux raisonnables.