Abdellatif Hammouchi décoré de la Médaille du Prince Nayef pour la sécurité arabe de première classe    Décès d'Ahmed Boukhari, ancien agent du CAB1 et témoin clé de l'affaire Ben Barka    Sommet de l'élevage de Cournon 2025 : 31,8 % des stands déjà réservés, le Maroc à l'honneur    Une coïncidence astronomique rare : Le Ramadan commence avec le premier jour de mars cette année    Israël : David Govrin s'indigne d'une manifestation pro-palestinienne à Marrakech    Athlétisme (800 m): Le Marocain Abdelati El Guesse se qualifie aux Mondiaux de Chine    Le Maroc participe à la construction d'un aéronef révolutionnaire à hydrogène vert qui fera un tour du monde sans escale    Sécurité, diplomatie et développement durable : Les priorités du Niger    CdM 2030: le président d'Interpol confiant en la capacité d'organisation du Maroc    Nizar Baraka appelle à protéger le pouvoir d'achat des Marocains    Botola D1: Score de parité entre le DHJ et le MAS    Températures prévues pour le lundi 17 février 2025    Education artistique: Laissée-pour-compte de l'enseignement public    Union africaine. «C'est à l'Afrique que le Royaume cherche à donner le leadership»    «Si j'étais aux responsabilités, je mettrais le feu à l'ambassade d'Algérie à Paris» : Louis Sarkozy attaqué par les relais du régime algérien après ses propos radicaux    MSC-2025 : mise en avant de la compétitivité du Maroc en matière d'énergies renouvelables    Tétouan: 133 MDH mobilisés contre les risques d'inondations    Algérie. Une élection au goût d'une cérémonie de circoncision    Le Chinois Habi Industry remporte un contrat de 548 000 m3/j pour un projet de dessalement d'eau de mer    Malika Haddadi dans ses premières déclarations déclare la guerre à la légitimité au sein de l'Union Africaine : la gaffe qui a révélé ses véritables intentions    Incendie dévastateur au marché Souk Al-Rabi à Marrakech    Marrakech : une touriste belge retrouvée pendue dans une salle de prière    Deux suspects arrêtés après l'enlèvement d'une femme à Sidi Bennour    Inauguration à Rabat de la Cinémathèque marocaine    ManCity : Inquiétudes pour le genou de Haaland avant le retour contre le Real    Bayer Leverkusen : Amine Adli marque son retour sur le terrain    Irrigation agricole avec des eaux usées, un risque sanitaire avéré    La Chine confirme sa volonté de renforcer ses relations avec les Etats-Unis malgré les tensions    Autriche : l'attaque au couteau de samedi motivée par "le terrorisme islamique"    Carburants : le gasoil en baisse de 12 centimes ce dimanche    Le vote à l'Union africaine : Qui a soutenu le Maroc et qui s'est opposé à lui ? Entre positions attendues et surprises dans la compétition    À Dakhla, la station de transformation électrique du parc éolien de la ville achevée    Ferroviaire : l'appel d'offres pour le centre industriel et technologique de Zenata lancé    Les complots algériens contre le Maroc : des tentatives ratées qui ne nuiront pas à l'amour du peuple pour son Roi    Allemagne : Décès d'une fillette et sa mère, victimes de l'attentat à la voiture-bélier de Munich    Réélection à Rabat de Mme Nezha Bidouane à la tête de la Fédération royale marocaine du sport pour tous    Botola D1/J23: RSB-RCAZ, le Match de ce dimanche !    Botola DII : Le RBM, leader '' provisoire '' en attendant KACM-RAC cet après midi    La guerre en Ukraine au centre d'un entretien téléphonique Rubio-Lavrov    Des détenus afghans rapatriés du Maroc    MAGAZINE : Marc Marciano, l'homme qui chuchote à l'oreille de la musique andalouse    Livre : A l'ère de IA, Kitab connect    Le temps qu'il fera ce dimanche 16 février 2025    Prix des jeunes poètes : Lancement des candidatures pour la 4e édition    Essaouira: 65% des travaux réalisés pour la future Cité des Arts et de la Culture    Rachida Dati attendue au Maroc du 16 au 18 février, voici le programme    Exposition : la valeur des visages, estimée par Adjei Tawiah    Casablanca : Cinéma Lutetia, l'une de ces salles qui renaissent de leurs cendres    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mahfouz ou la voix du Caire
Publié dans La Vie éco le 08 - 09 - 2006


Mahfouz a su donner à ces personnages,
hommes et femmes, une épaisseur humaine
qui est parfois un étrange mélange des tourments
quasi mystiques de ceux de Dostoïevski et de
la souffrance sociale de ceux de Zola.
C'est ce que certains critiques arabes, adeptes
fanatisés de la brumeuse «hadatha» (modernité),
n'ont jamais perçu.
«L'islam que nous défendons, le seul véritable islam à notre avis, est celui qui n'impose pas d'entraves à la liberté de polémiquer, d'écrire, de chanter, de composer. Il est sous-tendu par une justice sociale authentique.» Dans cette déclaration à la presse faite en 1988, au lendemain de sa consécration par le Prix Nobel, Naguib Mahfouz résume parfaitement la conception de la religion et de la liberté de création partagée par nombre d'intellectuels du monde arabe. Il faillit en payer le prix six ans plus tard lorsqu'un jeune fanatique, qui n'a jamais lu une seule ligne de son Å"uvre, le poignarda en pleine rue.
Décédé fin août dernier, à l'âge de 95 ans, le seul lauréat arabe d'un Prix Nobel, toutes disciplines confondues, aura marqué le monde des lettres et des arts du Golfe à l'Atlantique comme disent les Arabes en fixant la topographie de leur sempiternel fantasme unioniste. Dans cette vaste contrée donc, que l'on prend encore et toujours plaisir à délimiter par un bout de mer et un immense océan, Naguib Mahfouz a laissé de multiples souvenirs romanesques chez au moins deux générations. A certains, il aura donné le goût de la lecture, et chez d'autres, suscité celui de l'écriture. Avec plus de cinquante romans et trente scénarios de films, l'auteur de la fameuse trilogie cairote – Impasse de deux Palais, Le Palais du désir et Le Jardin du passé (dont la traduction en français est disponible dans la collection Folio) – est certainement la figure de proue de la littérature dans le monde arabe.
Mais, curieusement, cet auteur prolifique, dont les Å"uvres étaient au programme des lycées dans nombre de ces pays, a très souvent été pourfendu par une certaine élite littéraire dite d'avant-garde moderniste (al hadatia). C'était la tendance un peu partout dans les années 70, et il était de bon ton de se révolter contre un certain classicisme littéraire. Sauf qu'en matière d'histoire de la fiction littéraire de langue arabe, Naguib Mahfouz est l'un des rares, sinon le seul de sa génération, à avoir fait faire l'économie de l'apprentissage du genre romanesque du XIXe siècle. Aidé par ses lectures compulsives des romanciers russes, Tolstoà ̄ et Dostoà ̄evski, et français tels Flaubert et surtout Zola, et d'autres, plus éclectiques : Dickens, Melville, Goethe, Ibsen, Joyce, Faulkner, Mahfouz a su «inventer» le roman arabe du XXe siècle. Romancier urbain par excellence, il a su donner vie à une mégapole comme Le Caire en la résumant en quartiers qui sont à la fois la métaphore d'un pays et la topographie exacte de la réalité du monde arabe. C'est sans doute cette focalisation sur la proximité qui lui a valu les honneurs du Nobel, les Académiciens suédois ayant lucidement relevé une quête de l'universel.
Mais l'univers romanesque de Mahfouz, que de nombreux critiques arabes ont reconnu tardivement et, pour tout dire, contraints et forcés par la reconnaissance mondiale, n'est pas seulement cet aspect «folklorique» du brouhaha des rues surpeuplées, des femmes volubiles et des enfants espiègles. Mahfouz a su donner à ces personnages, hommes et femmes, une épaisseur humaine qui est parfois un étrange mélange des tourments quasi mystiques de ceux de Dostoà ̄evski et de la souffrance sociale de ceux de Zola. C'est ce que certains critiques arabes, adeptes fanatisés de la brumeuse hadatha (modernité), n'ont jamais perçu, obnubilés qu'ils étaient par tout ce qui est abscons et sous l'influence des gourous d'une certaine poésie avant-gardiste qui tenaient le haut du pavé sur la scène littéraire arabe des années 70. Ce sont du reste ces mêmes critiques, même au Maroc, qui ont versé des larmes de joie et fêté le triomphe international de la littérature arabe. Naguib Mahfouz n'a jamais eu autant de thuriféraires au sein de la critique littéraire dans le monde arabe que depuis sa consécration par le Nobel. Il en aura davantage maintenant qu'il a disparu. Il restera alors aux historiens de la littérature et aux thésards de ces pays de revenir aux écrits des uns et des autres, d'exhumer des textes et de mesurer l'évolution des choses ou leur dégradation, mais surtout l'ampleur de l'hypocrisie de l'espèce humaine. C'est quand même mieux que de peigner la girafe ou de faire des séminaires et des émissions à la radio et à la télé sur la meilleure façon de faire ses ablutions en période de sécheresse. Concluons avec une citation traduite de l'arabe, relevée dans l'une des succulentes chroniques du regretté poète syrien Mohamed Al Maghout, décédé – décidément ! – lui aussi il y a quelques semaines : «L'homme arabe est à cheval entre le courant mondialiste et le courant fondamentaliste. Alors comment concilier entre les deux ? Doit-il prier sur Internet ?»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.