Les profils spécialisés dans le Java/J2E, le Dot Net, les progiciels de gestion (ERP) et les télécoms sont les plus prisés. Les besoins des centres offshore concernent surtout la formation de techniciens en informatique. Les entreprises financent de plus en plus la formation de leurs jeunes diplômés Bac+2. Lorsque des multinationales de l'envergure d'EDS, Dell, CapGemini, Axa, Tata Consulting Services, Sofrecom Services Maroc, Mediha Informatique (BNP Paribas), GFI Informatique, Logica CMG, Atos Origin et Unilog… choisissent le Maroc comme destination offshore, celui-ci doit être en mesure de mettre à leur disposition des compétences qualifiées à des salaires compétitifs. Or, l'attractivité du pays commence à avoir des répercussions sur le marché de l'emploi, d'autant plus que les acteurs majeurs des TIC prévoient des plans de recrutement de 500 personnes par entreprise d'ici 2010 ! La tension va donc crescendo, résultant du déficit en formation, puisque le Maroc ne forme que 1,43 ingénieur pour 10 000 habitants, contre 6 pour 10 000 habitants dans les pays de l'Est et 2, 5 pour 10 000 habitants en Tunisie. Aujourd'hui, les sociétés de services informatiques et d'ingénierie (SSII) s'arrachent les profils pointus, principalement ceux qui maîtrisent le Java/J2E, le Dot Net et les progiciels de gestion (ERP). Les cabinets de recrutement vont à la chasse aux consultants techniques ou fonctionnels maîtrisant des progiciels tels que SAP, Oracle Applications, Gold…, ou encore les logiciels de CRM ou décisionnels. Outre l'offshore, la libéralisation du secteur des télécoms en matière de fixe et d'internet, à l'initiative de l'autorité de régulation, l'ANRT, a entraîné une forte demande sur les profils télécoms. Pour preuve, le débauchage massif qui a eu lieu lors du lancement de Wana, de Méditel vers Wana (ex-Maroc Connect) mais aussi vers les distributeurs de Wana. Le domaine de la sécurité des systèmes d'information n'est pas en reste. Les SSII, sous l'effet des besoins de leurs clients, recherchent des auditeurs des SI, experts en sécurité, notamment pour les tests d'intrusion, architectes SI et urbanistes des SI. Le privé veut davantage de soutien public pour l'adaptation de sa formation continue Sur un autre registre, il est difficile actuellement de trouver facilement sur le marché des chefs de projets logiciels ayant une expérience concluante supérieure à cinq ans. «Cette difficulté s'explique par le fait que la gestion de projet exige la maîtrise de plusieurs aspects : gestion de la relation client, gestion du cycle de vie de production d'un logiciel, maîtrise de la qualité, des coûts et respect des délais», explique Abdessamad Bouzoubaâ, DGA de Sofrecom Service Maroc. L'effervescence du marché de l'emploi a entraîné en conséquence une révision à la hausse des salaires des profils qualifiés ayant de l'expérience. A titre indicatif, le salaire pour un ingénieur débutant dépasse désormais le seuil des 9 000 DH et 15 000 DH pour un chef de projet chevronné. Cette hausse des niveaux des salaires intervient dans un contexte où le gouvernement a offert un plafonnement de l'impôt sur le revenu (IR) à 20%, ce qui représente une plus-value importante pour les groupes offshore dont plus de 80 % des collaborateurs sont des ingénieurs issus de grandes écoles marocaines, avec des niveaux de salaire qui les placent d'emblée dans les tranches supérieures de l'IR. Cette mesure profite surtout aux entreprises qui vont s'installer à CasaNearshore et Rabat Technopolis. Néanmoins, pour Ahlam Zeghari, consultante RH chez Eumatech, «la problématique rencontrée aujourd'hui au niveau du recrutement dans les grands centres offshore réside plus dans la formation de techniciens en informatique que d'ingénieurs». Le marché marocain souffre, en outre, du manque de certification de ses ressources (référentiel ITIL, certification Microsoft, Cisco, ISO 27000…). Du côté des pouvoirs publics, l'accompagnement de la dynamique du marché passe par la formation d'un nombre important d'ingénieurs et de techniciens spécialisés pour réduire les tensions qui se font déjà ressentir sur le bassin de l'emploi. Concrètement, l'objectif 2010 du plan «Emergence» est de passer de 4 284 ingénieurs et assimilés/an, dont 1 870 en TI, actuellement, à plus de 10 000 ingénieurs à l'horizon 2010. Mais la mise à niveau du système éducatif exige l'implication du secteur privé. «En poursuivant, avec une implication active du secteur privé, ses projets de formation, le Maroc continuera à être compétitif et sera ainsi en mesure de répondre à la croissance du marché des services informatiques», pronostique, confiant, le DG de Bull Maroc, Mehdi Kettani. Bien que cet objectif soit réalisable, les éditeurs et les SSII militent pour l'obtention de mesures d'accompagnement en vue de la formation continue de leurs ingénieurs. D'ailleurs, pour faire face à leurs besoins, les entreprises financent des cycles de formation et de mise à niveau de leurs ressources, à savoir les jeunes diplômés Bac+2. C'est dans ce sens que Sofrecom Services Maroc , spécialisée dans l'ingénierie logicielle «nearshore» (projets de développement), de TMA (Tierce Maintenance Applicative), de TRA (Tierce Recette Applicative), a décidé cette année de financer des certifications en gestion de projet (voir site PMI : www.pmi.org) pour le compte d'un certain nombre de ses ingénieurs à fort potentiel. Une solution pragmatique pour faire face au manque de ressources qualifiées dans ce domaine. Quid des SSII marocaines? La chasse aux ressources qualifiées est un défi majeur pour la viabilité du tissu économique dans les TIC. Et pour cause, les groupes offshore bénéficient de l'avantage fiscal, pour l'instant applicable seulement au profit de ceux qui s'installent dans les centres offshore comme celui de Casablanca et de Rabat. En d'autres termes, les entreprises étrangères s'approvisionnent pour l'instant dans le bassin d'emploi des SSII locales en attendant l'arrivée de nouveaux lauréats sur le marché promis par le plan «Emergence». Conséquence : à court terme, les SSII et les PME/TPE marocaines des TIC, dont la plus grande ne dépasse pas 150 ressources, ne savent plus à quel saint se vouer pour pouvoir fidéliser leurs ingénieurs et techniciens face à la déferlante du recrutement par les groupes étrangers offshore.