Première société du secteur du tourisme à frapper à la porte de la Place casablancaise, Risma a enregistré un grand succès lors de son opération d'introduction à la bourse. Principal instrument de financement d'Accor Maroc, le succès de ce fonds d'investissement est dû essentiellement à la notoriété de ce leader du secteur touristique marocain qui gère, aujourd'hui, 22 hôtels et qui prévoit d'en réaliser 14 autres d'ici 2009. Que ce soit le franc succès que l'introduction en Bourse de Risma a rencontré ou la stratégie de son groupe au Maroc, Marc Thépot, le directeur général de Risma, n'a éludé aucune question. Entretien. La Gazette du Maroc : Qu'est-ce qui explique le succès de l'introduction en bourse de Risma ? Marc Thépot : A mon sens, le succès de cette introduction en Bourse tient à plusieurs facteurs. Premièrement, le secteur du tourisme, à travers la Vision 2010 et ses résultats tangibles, montre clairement qu'il est, désormais, un secteur créateur de valeur à long terme. En plus c'est un secteur résistant et solide qui reçoit, en outre, le soutien affiché de SM Mohamed VI. Deuxièmement, Risma, de son côté, joue depuis 4 ans la transparence totale sur ses comptes, ses projets et ses ambitions. Les Marocains ont pu ainsi voir que des réalisations concrètes étaient faites et que les résultats étaient au rendez-vous. En outre, les impératifs de communication financière liés aux ORA ont créé un rendez-vous trimestriel avec les analystes financiers de la place qui sont des prescripteurs incontournables du titre Risma. Troisièmement, le timing était optimal et Risma entre en premier dans une année où les liquidités sont importantes. Quatrièmement, la campagne de communication et l'accompagnement professionnel de la banque conseil CFG ont fait le reste, sans compter le dynamisme des réseaux BMCE Bank et SGMB. Cinquièmement, les équipes d'Accor Maroc que je conduis depuis quatre ans ont fait la preuve de leur professionnalisme et de leur attachement au Maroc, sans oublier l'engagement déterminé des partenaires historiques de Risma qui crédibilisent notre démarche. L.G.M. : S'il doit y avoir une seule raison qui a motivé ceux qui ont acheté les actions de Risma, quelle serait-elle ? M.T. : Je crois que ce qui crée de la valeur pour Risma, c'est la force des marques hôtelières d'Accor (Sofitel, Ibis, Novotel, Mercure…etc.) et la qualité des processus de distribution ainsi que le professionnalisme des modes de gestion. À un moment où les clients réservent en direct via Internet en profitant des "vols secs" entre l'Europe et le Maroc, les marques Accor constituent une garantie non négligeable. En achetant Risma, les investisseurs ont la sécurité donnée par un opérateur hôtelier de renommée internationale alliée au soutien apporté par les partenaires marocains du tour de table de Risma qui consolident l'ancrage marocain d'Accor au Maroc. L.G.M. : Beaucoup d'investisseurs qui ont acheté vos actions ont déploré que Risma n'a voulu lever par la bourse que 250 millions de DH. Pourquoi Risma n'en a pas fait plus ? M.T. : Nous avions un double objectif : financer nos projets de développement par augmentation de capital et maintenir nos objectifs de rentabilité à court terme, en particulier pour être à même de verser très vite des dividendes. Il faut - si l'on veut préserver le résultat net - piloter son développement et laisser les investissements monter en puissance pour autoriser de nouveaux investissements tout en ayant des profits pour les actionnaires. Mais cette introduction en bourse nous ouvre la voie pour de futures souscriptions. Il faut seulement faire les choses avec un timing optimal. L.G.M. : Risma est la première entreprise dans le secteur du tourisme et de l'hôtellerie à avoir fait son entrée en bourse. Peut-on dire qu'Accor a bien joué le lièvre pour les autres fonds d'investissement qui sont en gestation dans le secteur ? M.T. : On en a parlé aux Assises Internationales du Tourisme de Tanger, le montage Risma est un montage optimal pour assurer un bon financement du plan de développement touristique du Maroc, en particulier dans le cadre du plan Azur. L.G.M. : Risma s'est engagée depuis 2003 dans une opération de refonte de haut de bilan date à laquelle elle avait émis un emprunt obligataire remboursable en action (ORA) d'un montant de 201,5 millions de DH. Où en est cette opération d'ORA ? Risma avait ouvert une période de remboursement anticipée pour les 1.400.000 ORA émises en 2003. À peu près 400.000 ORA ont été remboursées en actions ; ce qui a donné lieu à la création de 300. 000 actions Risma. Pour les autres, les détenteurs ont la possibilité de demander le remboursement durant la prochaine période qui sera ouverte entre juin et juillet 2006, sinon jusqu'à maturité, c'est-à-dire octobre 2006. L.G.M. : Cette opération d'introduction ne va-t-elle pas, plus tard, se traduire par une dilution de parts d'Accor dans Risma ? M.T. : Accor a clairement indiqué depuis le départ son intention de maintenir sa part autour de 38 %. Après l'IPO, la part d'Accor dans Risma va "tomber " à 32 % et notre intention est donc d'acquérir des titres complémentaires pour atteindre ce seuil objectif. Cette disposition est, également, de nature à rassurer les actionnaires, puisque le maintien de l'opérateur hôtelier à un haut niveau dans le capital est, en soi, une garantie de pérennité et de rentabilité. Accor est donc durablement ancré au Maroc aux côtés de ses partenaires de la première heure ! L.G.M. : Quelle leçon Accor tire de ce premier succès de Risma en bourse ? M.T. : Accor, en France, a suivi de très près cette opération. Son succès ne peut que conforter notre groupe dans sa politique d'investissement au Maroc et dans tous les pays où ce montage est possible. C'est un signe de vitalité et de maturité du secteur du tourisme au Maroc. Le mérite en revient - sans conteste - au gouvernement et à son ministre du Tourisme qui mène ce secteur avec détermination et ténacité qui savent, surtout, fédérer les acteurs et séduire les investisseurs internationaux ! L.G.M. : La stratégie Accor à l'international consiste à vendre les murs des hôtels. Au Maroc, c'est tout le contraire. Accor investit dans les murs et le programme de développement 2006 à 2009 prévoit quatorze ouvertures d'hôtels pour une enveloppe de 1,7 milliards de DH. Comment expliquer cette particularité pour le Maroc ? M.T. : Dans les pays "matures" où les hôtels sont positionnés depuis longtemps avec des fonds de commerce installés et des niveaux de rentabilité sûrs, il est courant de céder les murs des hôtels pour les louer ensuite à un institutionnel pour ensuite réinvestir ces fonds dans la politique de développement. C'est une pratique courante. Au Maroc nous sommes en début de cycle et nous sommes dans la phase d'investissement et de montée en rentabilité de nos unités. Cette pratique vaut pour tous les pays émergents où Accor souhaite opérer. C'est cette combinaison opérée entre des unités "matures" refinancées et les projets de développement qui guide, depuis toujours, le parcours d'Accor. C'est cette politique qui explique qu'Accor dispose d'un réseau de 4500 hôtels dans le monde dont plus d'un tiers en propriété.