Il est pénible de regarder une vue qui baisse à vue d'œil. Une vue qui décline c'est comme un jour qui perd son soleil. Cela peut engendrer des nuits blanches sans pour autant y voir clair. On ne sait plus alors ce que veut dire belle comme la nuit ou comme le jour. Du reste, lorsqu'on souhaite à quelqu'un une bonne nuit et de beaux rêves c'est que sa journée a été un cauchemar. Certes, on peut voir le jour sous une bonne étoile, puis plus tard aller s'étendre sur l'herbe à la belle étoile. Que dire alors quand c'est au contact du sol qu'on dort la nuit –et même le jour- à la belle étoile. C'est enjoliver les choses pour dire qu'on n'a que le ciel pour toit. Et encore, dans ce cas-là il faut partager parce que le ciel appartient à tous, mais devient étoilé quand on est venu au monde sous une bonne étoile. Alors qu'à la belle étoile le ciel est noir, et qu'on ne le perçoit qu'à la lumière d'une bougie, l'étoile du pauvre dont la lueur n'est qu'un feu de paille. Sur une cataracte, on voit parfois un arc-en-ciel. Décomposition de la lumière qui fait naître de faux espoirs. C'est par vagues que les damnés de la mer Méditerranée risquent leur vie pour atteindre l'île italienne de Lampedusa. On pourrait penser qu'il s'agit d'un pèlerinage pour rendre hommage à Giuseppe de Lampedusa, auteur du « Guépard » que Luchino Visconti avait transposé magnifiquement au cinéma. Non, hélas. Les désespérés ne se lancent dans ce périple que dans l'espoir de se nourrir des restes qu'aurait laissés le prince Salinas dans ses domaines siciliens. On dit souvent que le problème de la pauvreté est insoluble, qu'il y a eu toujours des pauvres et qu'il y en aura toujours. Sans le dire, on croit que la pauvreté est une nécessité parce qu'elle est une référence. Sans elle, comment saurait-on que la richesse existe ? On dit aussi que l'argent n'a pas d'odeur. C'est surtout pour l'argent lessivé. Cependant, son propriétaire sent mauvais quand il est lui-même lessivé. Sous tous les cieux, on affirme ainsi que venir à bout de la pauvreté est un projet aussi mythique que d'avoir pour projet de raser gratis. Cela dénote une mauvaise foi certaine, car si l'on rasait gratis il n'y aurait plus de barbus. Les femmes à barbe ne seraient pas concernées, l'égalité ayant ses limites. On peut toutefois s'interroger pour savoir s'il vaut mieux avoir de la ressource que des ressources. Il faut appeler les choses par leur nom et un chat un chat. Ni les choses ni le chat ne répondront à l'appel. Ils ne se manifestent que sous couvert de l'anonymat. Comment reconnaître une chose quand son regard s'abrite derrière des lunettes noires ? Anonymat ou cécité, allez savoir. On vous répondra : “j'ai payé pour savoir”. Savoir quoi ? Qu'un chat est un chat et qu'il peut s'aplatir au point de passer par le chas d'une aiguille. C'est faux. Un chat fait le dos rond ou hérisse ses poils. Selon quoi ? Selon des sources qui requièrent l'anonymat. C'est donc aléatoire et risqué d'appeler les choses par leur nom et un chat un chat. Surtout si celui-ci est instruit par la vie et se rend compte qu'on a écrit un chas au lieu d'un chat. La vengeance d'un chat est terrible quand il se prend pour un tigre. On ne sait pas ce qui se passerait si un chat se trouvait face à un tigre. S'ils ont la même robe tigrée le chat sera protégé. Entre félins on se soutient, et l'on aura intérêt à appeler un chat un tigre, mais certainement pas un tigre un chat. Les choses tourneraient au vinaigre. Ce serait dommage car, tout de même, il y a des choses belles et douces. Il faut donc ruser et ne pas appeler les choses par leur nom, sauf à vouloir les flatter et les caresser dans le sens du poil. Comme on fait pour un chat. C'est à se demander si les choses ne sont pas un chat. Il y a celui qui lève les yeux vers le ciel pour chercher son étoile. Ce n'est qu'une météorite. Chacun cherche une ou plusieurs étoiles. Les généraux, les hôteliers, les restaurateurs… Seuls les poètes ne les cherchent pas. Ils y vivent. Il y a aussi l'étoile star. Il n'y a plus de stars. Les dernières se sont éteintes, il y a longtemps. C'était Ava Gardner et Oum Kalthoum. Béni est celle ou celui qui garde des étoiles dans les yeux.