Le calvaire des diplômés chômeurs Drôle de situation de crise dans laquelle se débattent, à double titre, la fine fleur de l'intelligentsia universitaire, en proie à la fois à un chômage chronique déprimant et à la répression des forces de l'ordre qui s'est banalisée. Le dilemme des pouvoirs publics est déchirant : faut-il contraindre ou faut-il convaincre ? Encore qu'en démocratie, le doute n'est plus permis : négocier est la seule voie recommandable. La "gangrène" du chômage est en train de toucher sévèrement toutes les catégories de diplômés d'universités, des écoles supérieur, ainsi que des instituts spécialisés, professionnels ou même des établissements de formation professionnelle. Chaque jour, les citoyens et promeneurs de l'avenue Mohammed V à Rabat assistent au triste spectacle, devenu routinier, des sit-in et processions de plusieurs groupes de promotions de lauréats au chômage, toutes catégories confondues. La dernière en date, le groupe de malvoyants diplômés au chômage, qui "squattent" les locaux de l'UMT depuis des années, ont fait une sortie médiatique, le mardi dernier, où ils ont réaffirmé la " fuite en avant " du gouvernement qui a renié ses promesses. Comme ils ont réitéré leur position " irréversible " de revendication d'embauche dans la fonction publique, et non dans le secteur privé. C'est le même type de revendication, d'ailleurs, qu'on retrouve chez les autres catégories de diplômés. "Suicide collectif" ou chantage ? Aux dernières nouvelles, il semblerait que la Primature soit décidée à examiner " sérieusement " la situation d'avenir de ces jeunes lauréats et aurait promis un plan d'intégration qui devrait être finalisé lors des prochaines Assises nationales de l'emploi prévues en avril prochain. S'agirait-il de la bonne voie pour une issue acceptable pour tous ? Il en faudrait beaucoup plus pour balayer un scepticisme tenace qui s'est enraciné dans l'esprit de " ces chômeurs de luxe ". Surtout, l'ont-ils publiquement crié, à maintes reprises : " le gouvernement nous a donnés plein de promesses de solution à notre situation. Mais ces promesses sont toujours restées lettre morte. Pis encore, le gouvernement pratique la politique du mensonge à l'égard de l'insertion socioéconomique des diplômés de l'enseignement supérieur et technique. Le ras-le-bol est d'autant plus grand que ces derniers avaient envisagé le recours aux ambassades pour demander " l'exil social " ou " humanitaire " en Europe. Et c'est la " cohésion sociale " du Royaume qui est en danger car, nonobstant les autres conflits sectoriels touchant la classe ouvrière et les professions libérales, ce sont les revenus des ménages qui en baveront car " il n'existe pas une seule famille au Maroc qui n'ait pas, au moins, un chômeur ou diplômé inactif parmi ses membres ", déplorent-t-ils à l'unanimité. Cet état de fait prend sa source dans une situation de " précarité " tendant à devenir de plus en plus dangereuse pour la paix sociale et le développement du pays par ses jeunes compétences, jusqu'ici recalées. " C'est une véritable poudrière qui gonfle d'année en année, une véritable bombe à retardement dont la déflagration risque de faire bien des dégâts ", pronostiquent les plus audacieux d'entre eux. Et ce n'est pas la crainte du " bâton " qui les fera reculer, les tentatives désespérées ne se comptent plus à ce jour. Leur devise est claire, même si elle frise une "insolente" témérité : "ça passe ou ça casse !". Pour revenir à la conférence de presse des mal-voyants, le "coup de semonce" de ces derniers ne souffre aucun doute quant à leur détermination de "tout mettre en œuvre pour amener le gouvernement à satisfaire leurs revendications". Sans quoi, ont-ils menacé, si rien n'est fait, ils promettent un "suicide collectif" !!! Peut-on parler de chantage au suicide pour faire" plier " la rigidité" gouvernementale ? Ou bien tout simplement, c'est le désespoir ancré en eux qui parle…La sagesse commande de ne plus attiser les coléreuses interventions des forces de l'ordre et leur ruée " musclée " contre ces pauvres diplômés, tabassés, piétinés ou blessés. Il n'y a d'autre salut que d'examiner dûment leurs doléances. Avant qu'il ne soit trop tard…Surtout que les échos de l'étranger se font plus acerbes à l'égard de la " répression " exercée à leur encontre, certains déplorent qu'ils soient traités comme des "ennemis de la patrie", ou encore comme des " révoltés contre le régime de leur pays ". Bien sûr que non, nous savons bien que les diplômés chômeurs sont victimes de conditions objectives et sont " désespérés " de se voir " humiliés " dans un pays dont ils nourrissaient l'espoir d'y vivre avec dignité.