Tout le gotha financier du pays parle de ce scandale. Celui de l'affaire Boufettas, un homme d'affaires, qui a porté plainte contre X dans une sale affaire de corruption l'opposant à une banque de la place. Détails. Les arcanes de la justice ont beau être hermétiques, il y a toujours exfiltration d'informations sur les grosses affaires qui éclatent d'habitude en ce mois de Ramadan. Concernant ce nouveau scandale, voici les éléments de motivation juridique, les contours significatifs et quelques détails croustillants. Abdelkrim Boufettas, frère de l'ex-ministre de l'Habitat, Abderrahmane Boufettas, contracte un gros crédit de l'ordre de 170 millions de DH auprès de l'ex-BCM du temps d'Abdelaziz Alami pour le compte de sa société SCI Marrakech. Rien de plus normal pour un homme d'affaires très connu de la place. À l'époque, de tels partenariats entre gros clients Soussis ( comme Boufettas, Fahimi, Agouzal… ) et la BCM, étaient plus basés sur la bonne foi et la «parole» que sur des garanties matérielles. Seulement voilà, en raison de quelques difficultés financières, le groupe Boufettas rembourse difficilement ses dettes, ce qui oblige la banque à mettre la main sur l'un de ses terrains ( 540 hectares ) situé à Marrakech, à titre d'hypothèque. L'homme d‘affaires renégocie son prêt et s'engage à tout régler si la banque lui accordait, à son tour, une remise de 20 % sur ses créances. Les années passent et le management de la banque change avec l'arrivée en 2002 de Khalid Ouadghiri à la tête de la filiale de l'ONA. Celui-ci a son propre style et sa propre vision des choses. Les règles prudentielles et de contrôle, il veut les appliquer à la lettre. Il veut également recouvrir les arriérés, coûte que coûte. À la banque, on pointe du doigt des partenaires jugés « mauvais payeurs». Justement dans le lot, figurait Boufettas qui avait du mal à s'acquitter de ses dettes. La ristourne de 20% lui a été refusée par le nouveau management. Le largage pouvait alors commencer. Abscence de preuves Le doute s'installe malgré des décennies de collaboration mutuellement fructueuses entre Boufettas et la banque. Parallèlement, en mars 2004, la banque lui force la main en voulant vendre le terrain de Marrakech, objet de l'hypothèque initiale, à hauteur de 35 millions de DH à travers une astuce bien connue, valant saisie immobilière, « le commandement immobilier ». Boufettas résiste tant bien que mal, et réussit à sauver son bien immobilier, sans pour autant baisser les bras. C'est la seconde étape. Boufettas n'en revenait pas. Lui qui aurait filé des pots-de-vin de 20 millions de DH à l'un des directeurs, dit-on, pour avoir cette précieuse ristourne! Consterné, il décide d'attaquer. C'est le début de la deuxième étape, judiciaire. Bien entouré et judicieusement représenté, il porte plainte contre X le 1er août 2008. Pourquoi X ? La réponse, c'est une source judiciaire qui nous la livre : «parce qu'il n'a aucune preuve matérielle ou physique à présenter aux juges. Peut-être qu'il les a donnés à un simple intermédiaire». L'affaire est grave. Jamal Serhane, juge d'instruction à la Cour d'appel de Casablanca, est saisi et procède à la convocation du principal témoin-accusé. Il le reçoit une première fois ( lundi 15 septembre 2008 ), puis une seconde fois ( jeudi 18 septembre 2008 ) pour entendre ses aveux. Il n'a plus rien à perdre. Il lui a tout raconté. Quitte à s'auto-dénoncer pour un crime lourdement puni par la loi et l'exposer à toutes les supputations. Sera-t-il incriminé pour autant ? «Oui et non», répond une source judiciaire. L'article 256 du Code pénal stipule que l'auto-dénonciation peut protéger l'auteur de ce délit de toute poursuite.