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Anniversaire de l'indépendance : Le sens d'un rendez-vous avec l'histoire
Publié dans La Gazette du Maroc le 20 - 11 - 2006

Le 16 novembre 1955 n'est pas une date évidente dans le processus de libération du Royaume. Elle exprime le Pacte d'inter-allégeance qui fut le rhizome de l'identité étatique marocaine telle que déclinée dans le discours fondateur de Moulay Driss Ier. Voici donc un Souverain qui a osé sacrifier non pas le Trône mais sa propre existence pour défendre mordicus ses attributs de Garant de la continuité de l'Etat. Le 16 novembre 1955 n'est pas le début de ce combat ô combien glorieux pour la dignité de tout un peuple, mais bien son happy end. Chronique d'une noblesse qui s'apparente à la sainteté.
Aucun répit n'a été consenti par le peuple de l'Empire chérifien, du premier jour où le premier Résident français mit les pieds sur notre territoire, au jour où le dernier officier des affaires indigènes (OAI) remit les clefs des «Bureaux arabes» à son remplaçant marocain. Nous ne pouvons ici relater les dates phares du combat pour la liberté et l'unité. Contentons nous de dresser le crescendo de lutte finale qui a marqué l'année 1955.
Le coup de grâce…
Le 14 juillet, jour de la fête nationale française, une bombe explosa au quartier Mers-sultan à Casablanca. Le coup a été dur pour l'ego des mercantiles coloniaux et leurs soutiens sécuritaires et militaires. Une semaine plus tard (21-30 juillet 1955), des manifestations et des incidents frontaux eurent lieu à Marrakech et à Moulay Driss Zerhoun. Le 20 août 1955, date anniversaire du «kidnapping» du Sultan Mohamed Ben Youssef, ne pouvait pas passer inaperçue : Oued Zem, Khouribga, Khémisset, El Jadida…se rebellèrent vigoureusement contre les forces protectorales. Trois jours plus tard, une rencontre décisive eut lieu à Aix-les-Bains. Il y a été décidé de déposer Ben Arafa, de former un conseil de tutelle et d'accélérer la formation d'un gouvernement marocain représentatif de toutes les appartenances politiques. Malgré quelques barouds d'honneur, le principe de la fin du Protectorat y était présent dans l'esprit de chaque négociateur. Un mois plus tard (1er octobre 1955), Ben Arafa fut neutralisé et envoyé à Tanger. Encore moins d'un mois plus tard (26 octobre 1955), El Glaoui, principal appui «nobiliaire» marocain, sauta sans parachute en reconnaissant la légitimité pleine et entière au Sultan. Deux semaines après (10 novembre 1955), le Glorieux Sultan s'entretint à Saint-germain en Laye avec le Résident général sur les moyens d'engager des négociations franches et directes entre la France et le Maroc. Les «Trois glorieuses» débutèrent avec le retour triomphal d'exil du Sultan Sidi Mohamed Ben Youssef et se terminèrent pas le discours historique du 18 novembre et la célébration de l'indépendance.
Une personnalité universelle
La première idée qui vient à l'esprit à la consultation de cette cascade de dates décisives, c'est bien le fait majeur que la personnalité du Souverain Combattant fut au centre du sacerdoce indépendantiste. La grandeur, la légitimité, la noblesse, la hauteur de vue, le sens tactique et le génie relationnel du Sultan ont pu venir à bout des artifices mercantilistes de la puissance résidentielle. Combien l'histoire, si riche en cyniques et malencontreuses combinaisons, a-t-elle connu de profils ressemblant à celui qui deviendra Mohamed V ? Le tiers-monde, le continent noir et a fortiori le Maghreb doivent au Maroc l'ouverture de la voie de la décolonisation tout à la fois systématique et systémique.
L'Etat n'est pas sorti indemne d'un processus hégémonique qui a débuté dès le crépuscule du XIXème siècle : La reconquête des territoires, des postes de commandement et des centres stratégiques dut coûter un prix sanglant avant que le pays n'eût parvenu à épouser la voie d'une certaine stabilité. Mohamed V parvint à réconcilier les Marocains avec leur passé «protectoral» et même avec l'ancienne puissance dominatrice. Quel courage que celui de cet Homme qui a une telle hauteur de vue, ayant tout tenté pour que l'histoire ne soit point insultée à quelque degré de la relation autant avec l'ancienne puissance occupante qu'avec voisins et partenaires ! Et quel geste éloquent accompli en direction de la modernité que celui d'avoir «contemporanéiser» la Monarchie populaire marocaine ! Un Prince héritier a été solennellement désigné avec la bénédiction de tout ce que compte le pays de forces politiques, intellectuelles, cultuelles et morales.
De Mohammed V à Mohammed VI
Mohammed V rendit l'âme en léguant à son Successeur l'immense chantier de la construction de l'Etat moderne. Il s'en sortit avec maestria en mettant en musique une décentralisation évolutive et une déconcentration effective. Digne Successeur de son immédiate descendance, le Souverain actuel placera la dignité du peuple marocain au-dessus de toutes les priorités. Edification de l'Etat de droit, grands projets structurants, foisonnement infrastructurel, réconciliation de la nation avec ses douloureux moments, humanisation de la cellule familiale, Invention et mise en route, à tous les étages de l'édifice territorial, de l'INDH, gestion adroite du labyrinthique combat du parachèvement universel de l'intégrité territoriale…et tant d'autres avancées frontales marqueront à jamais le règne de Mohamed VI. Libérer ses concitoyens de la peur et de l'angoisse face à soi et à l'autre est une tâche qui s'apparente à la reconstruction du Marocain. Mentalement avant tout. L'accompagnement social par l'économique constitue une méthode et un esprit. Les démunis, les faibles, les diminués, les exclus, les gens de peu, enfants, femmes, adultes et anciens en bénéficient progressivement et significativement.
L'indépendance du Royaume a été acquise grâce à l'abnégation, la noblesse et au génie modérateur de feu Mohamed V. Hassan II bâtit l'Etat moderne et – on l'oublie souvent – un capital national crédible. Mohamed VI est en train de remorquer le Royaume à la locomotive démocratique et modernitaire.
Voilà pourquoi les jeunes générations doivent savoir que la dignité de notre pays n'a rien d'évident et que la célébration de la fête de l'indépendance doit valoir pour nous comme pour l'univers le 14 juillet français ou l'Independence day américain. Car le combat continue, qui plus est sur la voie…royale. Merci Sidi Mohamed !


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