Petite poupée, comme tu es belle ! Ta peau douce est nette comme un drap blanc et lisse : ceux dont on se sert pour faire les pubs des produits lessives. Tes cheveux, oh ! Tes cheveux, brillants, épais et noirs, tout comme une nuit d'été éclairée par toutes les étoiles du ciel. Tes yeux si chauds et ouverts, si hypnotisant et diaboliques, grâce à tes soins esthétiques parfaits. Ta taille si grande, si mince et si sexy en même temps, une rondeur légitime accompagnée par des effets secondaires mortels dissimulés sous des vêtements chers et chics, de marques italienne et française et surtout pas CHINOISE ! Enfin ton parfum exquis EN VOGUE que je sentais avant même d'entrer au café où je t'ai vue. Je suis restée à mon petit coin entrain de te contempler et de chercher la moindre carence dans ton aspect si fatal que la grenade à main. Je te lorgnais oui je te lorgnais mais pas par ce que je suis homosexuelle, c'est par ce que je n'arrivais pas à croire qu'une fille peut être si parfaite physiquement, et je t'enviais aussi tout en faisant la différence entre ma peau morose et incohérente et la tienne, mes cheveux ternes "en fait ce qu'a survécu de mes cheveux" et les tiens, mes yeux froides et trouillardes et les tiennes, ma silhouette de maman délinquante et la tienne... A cet instant j'avais souhaité pouvoir faire ta connaissance juste pour certifier les préjugés que j'ai inventé à ton sujet, j'estimais que tu étais une gosse de riche qui ne se préoccupe que de ses RDV chez JAQUES DESSANGE et ses sessions shopping chez Massimo Dutti au MAARIF, or cet estime me venait de mon horrible sentiment de compassion envers moi-même, eh oui j'étais entrain de te dénigrer dans ma tête juste pour ne pas arriver à la conclusion suivante : toi tu es belle et moi je suis laide, odieuse et grosse. Et le pire se manifeste lors de la présence d'une tierce personne, spécialement du sexe masculin : un copain, un ami, une connaissance, cette personne ne me prête plus aucune attention. Il est là planté à coté de toi, faisant semblant d'écouter mon discours alors qu'il a la tête et les yeux ailleurs, fixés sur une fille de ton genre petite poupée, et cela m'inflige de l'indignation et de la colère. Ceci dit, ce n'est pas la peine que je me casse la tête pour défendre des causes sérieuses et de me concentrer d'avantage sur la culture et la science pour paraître charismatique, si je ne suis pas belle mince et chic je ne peux jamais attirer leur attention et leur admiration. Mais je n'y peux rien, je n'ai ni les moyens pour le moment de faire une dermato thérapie, ni la manie de me maquiller chaque matin pour paraître moins affreuse, ni la volonté pour m'astreindre à un régime sec et me priver de tous les délices que ma mère prépare... donc je reste ainsi entrain de me plaindre et d'alimenter ma haine contre toi, petite poupée...