Après une longue attente teintée d'un certain suspens, après de multiples reports, la visite du président français, Emmanuel Macron au Maroc est actée dans l'agenda diplomatique entre les deux pays. Cette visite d'Etat au Maroc, la première depuis l'arrivée de Macron à l'Elysée, était contenue dans l'échange épistolaire entre les deux chefs d'Etat. Macron s'est dit ravi de pouvoir effectuer cette visite et le Roi Mohammed VI s'est dit heureux de le recevoir dès que les agendas diplomatiques entre les deux pays l'auront décidé. Cette visite, importante dans sa symbolique, était l'objet d'un véritable enjeux diplomatique entre les deux pays. En parler et l'envisager était devenu le véritable baromètre de la médiocrité présente ou de la qualité future des relations entre les deux pays. Sa programmation était discutée dans un contexte de crise entre Rabat et Paris. Le Maroc avait demandé explicitement à la France de clarifier sa vision du Sahara marocain et la diplomatie française tergiversait volontairement entre une volonté d'enfoncer des portes ouvertes en rappelant le soutien permanent à l'option de l'autonomie et une tendance à maintenir un halo gris clair pour ne pas désespérer le régime algérien pour qui la reconnaissance du Sahara marocain était une ligne rouge, voir une déclaration de rupture. Cette visite de Macron au Maroc comme celle, officielle de Mohammed VI à Paris, était tombée victime de cette paralysie du dialogue politique entre les deux leaderships. À quoi cela sert de déployer le faste des visites d'Etat si c'est pour uniquement exporter un sentiment de vide et de statue quo stérile ?. Tant que les deux pays ont fait le constat de leurs profondes divergences stratégiques, le plafond des ambitions qu'ils peuvent atteindre est de gérer ce statue quo en attendant des jours meilleurs. Et ces jours meilleurs n'ont pas tardé à pointer leurs lueurs à l'horizon glacial des relations entre les deux pays. Le véritable tournant a débuté avec la visite du tout nouveau ministre des affaires étrangères, Stéphane Séjourné. En reconnaissant à Rabat que la question du Sahara était existentielle pour le Maroc, le chef de la diplomatie française traçait déjà le cadre de la possible évolution de la position française sur le sujet. Il était illogique de concéder l'ampleur vitale de l'affaire du Sahara et d'imaginer endosser des positions antagonistes. Puis cette tendance a été accentuée lorsque les autorités politiques françaises ont validé les investissements économiques officiels français dans la ville mythique de Dakhla. Puis est venu le ministre de l'économie Bruno Le Maire pour affirmer que son pays était prêt à financer une ligne directe transportant l'énergie des provinces sahariennes marocaines vers Casablanca, le cœur économique du Royaume. Le décor d'une inévitable évolution française sur la question du Sahara était bien planté. Ne manquait qu'une expression d'Emmanuel Macron, la plus haute autorité de la République qui est intervenue à travers une lettre politiquement ciselée pour bien signifier le tournant français. Le choix du 25ème anniversaire de la fête du trône donnait à la démarche française une symbolique pour les Marocains et une solennité pour les Français, inédite. La morale de toute cette histoire franco-marocaine est qu'après avoir longtemps hésité, pataugé avec une certaine gêne dans le flou et l'indécision, Emmanuel Macron a choisi un destin pro-marocaine. Cette décision présidentielle a été accueillie avec rage et amertume par le régime algérien. Ce dernier, même s'il passe son temps à crier sur les toits onusiens qu'il n'est pas partie prenante de cette crise du Sahara pour éviter justement de participer aux tables rondes préconisées par l'ONU, a réagi comme s'il s'agissait d'une affaire nationale. Rappel immédiat de l'ambassadeur, menaces contre la France et ses intérêts... Autant de signaux qui montrent à quel point la décision française sur le Sahara était d'une importance capitale. La décision de Macron sur cette question maghrébine était aussi l'objet de critiques de la part d'une partie de la gauche et des verts en France. Sans minimiser cette réticence, il faut l'inclure dans un bras de fer politique que l'opposition de gauche livre à Emmanuel Macron. En attendant la formation du gouvernement, tout ce que fait Macron est objet de critiques. Mais gageons que si demain un gouvernement de gauche gouverne la France, il ne pourra plus, ou plus précisément ne voudra plus inverser le cours de ce soutien français à la marocanité du Sahara.