L'Algérie a annoncé une nouvelle mesure concernant les visas pour attirer plus de touristes dans le sud algérien. Mais cette facilitation cache une réalité autre: Alger entretient un silence total sur ses zones du sud. Visiter l'Algérie pour un étranger est déjà chose difficile, le pays reste très fermé sur lui-même et les offres touristiques sont limitées et souvent pas à la hauteur, poussant les citoyens algériens à privilégier la Tunisie voisine pour leurs vacances. Mais visiter le sud du pays où se trouvent les régions moins habitées est une mission quasi impossible. Ces régions représentent toutefois les deux tiers de la surface du plus grand pays d'Afrique en termes de superficie. x Publicité Des étendues désertiques sur des milliers de kilomètres, des Touaregs, des palmiers dattiers, des chameaux, font partie des paysages que l'on peut voir dans ces régions là, sauf que le tourisme là-bas est extrêmement cadré au point où il est presque impossible d'y accéder en tant qu'étranger et même les Algériens se heurtent à des contrôles dès qu'ils s'approchent de la zone sud. Les autorités algériennes ont néanmoins annoncé une nouvelle mesure visant à rendre possibles des voyages touristiques dans le Sahara algérien (le désert algérien), seulement les conditions énoncées soulèvent plusieurs théories. Par ailleurs, l'annonce du nouveau visa, communiquée par le ministère de l'Intérieur en lieu et place du ministère des Affaires Etrangères ou du Tourisme, souligne la centralité et la sensibilité du sujet pour l'Algérie. Les touristes voulant se rendre dans le Sahara algérien ne pourront y accéder qu'à travers une agence de voyage algérienne agréée, le visa ne sera délivré qu'une fois sur place après l'ouverture en décembre d'une ligne aérienne Paris-Djanet, en outre, les touristes devront suivre le programme des agences de voyage à la lettre et la durée de validité de ce visa s'arrête à celle du voyage organisé. En d'autres termes, les touristes n'auront aucune liberté de circulation, de visiter d'autres lieux par leurs propres moyens, de rencontrer des locaux, ou de louer une voiture pour se promener dans le sud du pays. Les agences de voyage algériennes seront chargées de remplir les informations personnelles et les détails exacts de l'itinéraire durant la durée du séjour pour leurs clients et devront veiller à ce que le programme soit respecté de façon à ce que les touristes restent toujours sous leur surveillance. Cette façon très stricte d'aborder une « ouverture sur le tourisme » en Algérie dévoile les limites de la liberté dans ce pays où un simple article de presse sur le sud algérien peut mener à de la prison ferme ou même à la fermeture du journal. Les autorités algériennes ont plusieurs choses à craindre par l'ouverture de ces territoires du sud, dont la fuite d'informations et leur relais à l'international par des journalistes appelés par le système des « khabardji » (des espions, ndlr) est la plus inquiétante. Le sud algérien est un terrain de grande contestation et de revendications indépendantistes que le régime cherche à dissimuler, par ailleurs, le bas niveau de vie des habitants comparé à celui du nord du pays et le chômage donnent souvent lieu à des manifestations, systématiquement réprimées. Les habitants du sud algérien sont également très critiques vis à vis de la politique du pays s'agissant de la milice séparatiste du polisario. Ils désapprouvent que dans leur propre pays, une milice étrangère règne en maitre absolu, mène une vie de faste quand eux vivent dans des conditions déplorables. Plusieurs témoignages d'habitants du sud de l'Algérie ont décrit les pratiques des membres du polisario en citant des voitures se baladant sans immatriculation, des véhicules importés (alors que l'importation de voitures dans le pays est difficile), d'autres stationnant dans des rues interdites de stationnement, ou encore leur revente aux Algériens des aides humanitaires reçues gratuitement. Au delà de la présence de la milice du polisario et ses pratiques qui peuvent alerter la presse internationale sur la réalité du terrain et qui n'a rien à voir avec l'image véhiculée par l'Algérie, les autorités du pays craignent aussi pour la sécurité des étrangers et redoutent des enlèvements par d'autres groupes terroristes opérant dans le sud du pays et proches du nord du Mali, des réseaux de passeurs de migrants et de drogues aux frontières.