Le gouvernement d'Aziz Akhannouch vient d'être nommé avec Nadia Fettah Alaoui qui prend la tête du Ministère de l'Economie et des Finances, en remplacement de Mohamed Benchaaboun. Devant elle, du pain sur la planche et une équation délicate : Comment relancer l'économie marocaine et tenir les promesses électorales de son parti ? La nouvelle ministre de l'Economie et des Finances aura à relever un défi de taille, celui de reprendre l'un des plus importants ministères du pays, et de trouver des solutions à court et moyen termes pour relancer rapidement l'économie marocaine post-pandémie, mais aussi mettre en pratique les promesses du RNI qui se sont inscrites à gauche. Une mission difficile et un exercice « très compliqué » pour le département de Nadia Fettah Alaoui qui devra « jongler entre plusieurs contradictions » prédit l'économiste Nabil Adel dans une déclaration à Hespress FR, en estimant que le département de Mme Fettah Alaoui ne pourra pas soutenir l'offre et la demande (promesse de son parti, ndlr) en même temps. Il s'agira pour elle, de mettre en place le nouveau modèle de développement qui, selon majorité gouvernementale a été au centre de leur programme électoral et sera au centre de leur mandat, avec des mesures pour assurer la croissance économique, développer le positionnement économique du Maroc à l'internationale, faire des choix sectoriels, et mettre en œuvre la numérisation de l'économie. Selon Nabil Adel, « le grand défi pour (Nadia Fettah Alaoui), sera de jongler entre la mise en place du nouveau modèle de développement et surtout tenir la promesse électorale de son parti, du RNI, qui s'engage à créer 1 million d'emplois, qui s'engage à augmenter les salaires des enseignants… « . En définitive il y aura une pression sur les finances publiques, estime-t-il. Le programme du RNI est « assez budgétivore » et « extrêmement à gauche », explique-t-il, avec plusieurs promesses sociales (dans l'enseignement, dans la santé, dans la création d'emploi, dans l'augmentation des salaires) et « en face nous ne sommes pas sûrs d'avoir des ressources fiscales stables pour le financer, donc on va certainement devoir recourir à l'endettement, ce qui va mettre en péril notre souveraineté internationale », d'où la question de savoir « comment maintenir les équilibres macro économiques dans ces conditions là? ». Relance économique: Mission difficile Après deux ans de pandémie de coronavirus ayant mis l'économie marocaine à rude épreuve, le nouveau gouvernement sera attendu pour donner un coup de fouet à cette économie, la rendre plus compétitive et concrètement la relancer pour sortir de la crise. « Pour faire de la relance économique, il faut en avoir les moyens », a relevé Adel qui y voit un exercice compliqué à mettre en place. Faire une relance voudrait dire qu'il faudrait « augmenter les dépenses publiques, faire des cadeaux fiscaux, et baisser les coûts des financements (…) donc si elle (la ministre de l'Economie et des Finances, ndlr) veut faire de la relance à court terme, elle n'aura pas 36.000 solutions, si elle veut faire de la relance à long terme, là cela va demander des réformes beaucoup plus structurelles et je ne pense pas qu'ils aient le temps de le faire et ça ne faisait pas partie de leurs engagements électoraux ». Or, les engagements du RNI ont été plus orientés vers la demande et pour la stimuler « il faut faire plus d'actions sociales, de dépenses publiques, de réductions d'impôts pour la classe moyenne, et là aussi on va retomber dans le problème du financement et les risques de dérapages budgétaires que cela pourrait occasionner », prédit notre interlocuteur. L'encouragement à l'investissement un autre défi Pour sortir le pays de la crise, plusieurs économistes ont estimé qu'il fallait encourager les investisseurs nationaux et étrangers et notamment les PME, pour créer de l'emploi et une nouvelle dynamique et remettre l'économie à flot, et cela se traduit par des baisses d'impôts sur l'investissement. Pour encourager à l'investissement, « il faut réduire les impôts sur le capital et pas sur le travail, il faut réduire les coûts sociaux, donc faut revoir le coût du travail, alléger le code du travail, il faut investir massivement dans les infrastructures et les énergies, et cela est en contradiction avec les engagements que le RNI a pris, et qui sont beaucoup plus du côté de la demande que celui de l'offre », réagit Nabil Adel. Et d'ajouter que pour faire de la relance cela est synonyme de déficit budgétaire et de hausse de l'endettement. « Si vous voulez faire une relance sans déficit et sans endettement, il va falloir la faire par l'offre, ce qui veut dire sacrifier momentanément tout ce qui est social », a-t-il ajouté en estimant que le nouveau gouvernement devra faire des choix et être cohérent. « On ne peut pas tout avoir », a-t-il conclu.