Alors que la pandémie du coronavirus fait rage en Algérie, doublée d'un manque de vaccins, les autorités ont appelé à ne pas dramatiser la situation sur les réseaux sociaux ou dans les médias dans une tentative de camoufler la réalité. La direction de santé d'une région a été obligée de faire son propre démenti. Au lieu de rassurer le peuple quant à la crise d'oxygène qui sévit dans le pays, et qui est responsable de la mort de plusieurs personnes, les autorités ont appelés à ne plus partager de messages sur les réseaux sociaux en particulier, de crainte d'une nouvelle vague de colère et de contestation sociale, au moment où le Hirak a été réduit au silence de force. Les internautes dépeignent en effet une situation dramatique, eux qui sont confrontés à la réalité non maquillée de l'Etat algérien. Sur les réseaux sociaux, les appels de détresse, les collectes de fonds, les gestes de solidarité entre algériens, se multiplient. « Je demande à notre peuple d'éviter les cas de panique qui sont propagés sur les réseaux sociaux avec la publication de fausses informations et l'exploitation de la détresse des malades et de leurs proches », a déclaré le Premier ministre algérien, Aïmene Benabderrahman, à la télévision nationale. Il a par ailleurs dénoncé la « publication par certains d'anciennes photos remontant au début de la pandémie de covid-19 » en jugeant que ces photos partagées sont « une exploitation de la détresse de citoyens malades et de leurs familles ». Il a en outre demandé aux citoyens Algériens de ne pas prendre en compte ce « genre de fausses informations ». Pourtant, les messages des internautes affirment le contraire, les Algériens annoncent le décès de leurs proches, leur panique est telle que des appels aux secours pour recevoir de l'oxygène sont partagés, et des campagnes de dons à l'étranger chez les citoyens mais aussi dans les consulats d'Algérie dans les pays étrangers. Le Premier ministre a lancé cet appel à ne plus partager de publications sur les réseaux sociaux les qualifiant d'office de mensongères, dans l'espoir d'alléger les accusations d'incompétence visant le ministre de la Santé Abderrahmane Benbouzid, principal accusé dans la mauvaise gestion de la crise sanitaire et le manque d'oxygène. Ce dernier a finalement reconnu que l'oxygène représentait le problème majeur des hôpitaux dans le pays et a annoncé il y a quelques jours l'importation de 6.000 concentrateurs d'oxygène. Mais le mal est déjà fait et face à la pression des autorités algériennes, la Direction de la santé et de la population de la wilaya (DSP) de la wilaya de Skikda a dû faire son propre démenti pour ne pas s'attirer de problèmes. « Nous informons tous les citoyens de la wilaya de l'incident enregistré hier soir, qui est l'épuisement du réservoir d'oxygène de l'hôpital de référence covid-19, en dépit du fonctionnement du générateur d'oxygène », avait-elle indiqué vendredi dans un communiqué en expliquant que l'épuisement de l'oxygène a été « accompagné malheureusement de décès de malades hospitalisés qui étaient dans un état critique, selon les rapports et les enquêtes médicales ». Dans un autre communiqué publié dans la soirée, le DSP de Skikda a démenti son propre communiqué en affirmant que « les décès enregistrés étaient des malades se trouvant dans des situations très critiques depuis plusieurs jours, selon les rapports médicaux, et ne sont pas liés à l'épuisement du réservoir d'oxygène », et de menacer de poursuites judiciaires toute personne ou partie voulant semer la peur ou les fausses informations. Cette réaction s'explique par les mises en gardes du Premier ministre qui faisaient suites à des directives dans la même lignée adressées aux médias cette fois-ci. L'Autorité Algérienne de l'audiovisuel (ARAV) a appelé les médias à ne plus se concentrer sur les informations liées à la crise sanitaire en Algérie. L'ARAV a appelé donc les médias audiovisuel à « s'acquitter de leurs missions envers les téléspectateurs, en évitant de se concentrer excessivement sur les nouvelles négatives et les histoires tragiques liées à la contamination au Covid-19 ». Et de prier les médias de « respecter les règles professionnelles, faire preuve de pondération dans la couverture, et d'exactitude dans la diffusion des informations ou des images », notamment lorsque les réseaux sociaux « constituent une source principale d'information ». Les responsables des journaux télévisés et des programmes d'information ont été invités à « éviter la dramatisation et l'effroi dans les discours », à ne éviter les informations qui seraient susceptibles de « semer la crainte, la hantise et le désespoir au sein de la société, et la situation devient encore plus difficile à traiter », ajoute le communiqué de l'instance. Avec ces nouvelles directives, les responsables du pays tente d'éteindre le feu des critiques et de sauver leur image à l'international, mais cela ne suffira pas à calmer la colère et le désarroi des Algériens qui dénoncent l'inaction des autorités, leur réaction trop tardive alors que les scientifiques ont alerté à de nombreuses occasions que la situation allait se détériorer si des mesures en urgences n'étaient pas prises. Des appels qui ont été complètement ignorés par le président algérien, aujourd'hui silencieux, lui qui a été soigné à l'étranger, laissant les hôpitaux de son pays incapables de gérer l'afflux des nouveaux cas graves car n'étant pas préparés et n'ayant pas les moyens techniques pour faire face à une situation d'épidémie.