Un projet de loi sur l'usage légal du cannabis sera soumis à l'approbation du conseil de gouvernement du jeudi 25 février, indique un communiqué du département du chef du gouvernement. Venant du patron de l'Exécutif lui-même, fort à parier que les propositions de loi, demeurées jusque-là sans lendemains pourraient ne plus rester lettre morte. Cette initiative du gouvernement intervient suite à la décision prise le 2 décembre 2020 reconnaissant l'utilité thérapeutique du cannabis. Il faut bien également souligner qu'un projet de texte législatif sur l'usage légal du «Kif» s'il venait à voir le jour trouverait matière à faire dans les préconisations de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD). Depuis la date de classification du cannabis par l'ONU, le débat s'est passionné de plus belle, voire même plus politisé au Maroc et fort possible que l'on se dirigerait vers une finalité autre que le statuquo actuel à savoir la recherche d'un juste équilibre entre le toléré et l'interdit. Légiférer le cannabis en lui accordant un statut thérapeutique et non récréatif, pourrait rapporte gros aux caisses de l'Etat. L'opportunité en deviendra alors forte pour le Royaume de devenir l'un des principaux fournisseurs de cannabis médical pour l'Europe, ( l'étant déjà quant au cannabis récréatif). Il rattraperait du coup le retard envers le Canada, les Pays-Bas, l'Uruguay, l'Australie, la Californie et Israël, bien en avance dans le domaine pour l'avoir dépénaliser et légaliser depuis lurette. Mais le débat au Maroc ne date pas d'aujourd'hui, déjà en 2015 le Parti authenticité et modernité (PAM) avait tenté de mettre le sujet sur la table au Maroc. Il avait proposé un projet de loi resté dans les tiroirs de l'exécutif. Début de l'année Covid, le gouvernement avait daigné se pencher sur le dossier avant de se rétracter. Il y a de cela une année, la CSMD lancée sur instruction royale, a été mandatée pour chercher des solutions pour accélérer le développement du Maroc. Lors d'un atelier, organisé le 23 juillet de la même année sur la question du Cannabis, la Commission avait jugé que jusqu'ici, la répression du cannabis n'avait pas fonctionné et avait préconisé de légaliser la culture et la consommation de cannabis. La CSMD avait rappelé que le cannabis était légal au Maroc jusqu'en 1932, date à laquelle le protectorat français a décidé de prohiber sa culture et de la limiter à celle entreprise pour la Régie des tabacs et du kif jusqu'en 1954. Elle avait estimé qu'une légalisation renouerait avec la tradition marocaine, en plus de générer des revenus plus importants pour les agriculteurs et une industrie estimée à 800 millions € dès la première année jusqu'à 10 milliards à terme. Le cannabis fait vivre environ 90 000 ménages au Maroc, soit 700 000 personnes, selon les statistiques officielles du ministère de l'Intérieur (jusqu'à 140 000 familles, selon l'organisation Prohibition Partners). En Israël, l'exploitation du cannabis rapporte 1 milliard de shekels (plus de 2,5 millions d'euros), 60 000 Israéliens bénéficient de traitements à base de cannabis et quelque 150 entreprises opèrent dans le domaine. C'est une belle manne qui ferait du bien là où ça fait mal dans les caisses de l'Etat du Royaume. Tant il est vrai que culture de la feuille de cannabis dessine les paysages du nord du Maroc depuis des décennies, elle fait néanmoins vivre nombre de familles dans les provinces du Rif. Sa culture qui s'adopte parfaitement au sol de cette région du Royaume se transmet de génération en génération. Pourtant, le kif reste totalement illégal. Sa vente, son achat et sa consommation sont passibles de prison. Les nombreux agriculteurs marocains qui cultivent du cannabis dépendent néanmoins du marché noir qui récolte l'essentiel des bénéfices financiers liés à la plante. Néanmoins « 50% des revenus des ménages » dans les zones cultivées provient du cannabis, qui permet de gagner jusqu'à 80 000 DH (18 500 €) par an et par famille, ce qui reste largement supérieur à la moyenne des autres cultures.